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vendredi 17 août 2018

Embauche de migrants : les hôteliers-restaurateurs font marche arrière

L’annonce avait sonné comme une provocation. En plein débat sur la question de l’accueil des migrants, les représentants des hôteliers-restaurateurs annonçaient que des discussions étaient en cours avec le gouvernement « pour faciliter la régularisation des migrants qui souhaitaient travailler dans le secteur ».
L’annonce avait sonné comme une provocation. En plein débat sur la question de l’accueil des migrants, les représentants des hôteliers-restaurateurs annonçaient que des discussions étaient en cours avec le gouvernement « pour faciliter la régularisation des migrants qui souhaitaient travailler dans le secteur ».

Un pavé dans la mare et quel pavé ! L’information surréaliste parue dans le Parisien du 5 août était aussitôt reprise par l’ensemble des médias. L’Union des métiers de l’hôtellerie (UMIH) expliquait qu’elle était désespérément à la recherche de personnel dans les différents secteurs, qu’il s’agisse des hôtels, des cafés, des restaurants et des brasseries.



La bagatelle de 130 000 postes à pourvoir au total dans ces commerces. Les raisons de cette désaffection ? La mauvaise image de ces métiers dans l’opinion et des conditions de travail pénibles selon les représentants de la profession.

Comment résoudre le problème ? C’est tout simple voyons, il suffit de faire appel aux migrants ! Et de lancer cette surprenante proposition dans la presse. « On attend maintenant du gouvernement qu’il donne des papiers à ces personnes-là. La formation, le boulot, on est là pour les fournir », lançait Didier Chenet, président du groupement national des indépendants(GNI) de l’hôtellerie-restauration. On reste confondu devant tant de naïveté… ou de cynisme ! Comment les responsables de ces professions en contact avec le gouvernement n’ont-ils pas imaginé les conséquences politiques d’une telle annonce ? Comment ont-ils pu se fourvoyer à ce point en touchant à un dossier aussi explosif que l’immigration, sans penser un seul instant que leur proposition allait susciter un véritable tollé.

Encouragement à l’immigration

Demander, voire exiger du gouvernement la régularisation dans les plus brefs délais de gens entrés clandestinement en France pour travailler dans le secteur de la restauration, voilà un encouragement à l’immigration dont les passeurs n’auraient même pas rêvé ! « La France a besoin de vous pour travailler dans ses cafés, ses hôtels et ses restaurants. Régularisation immédiate ». Quelle aubaine pour les migrants !
Pourtant, il n’est pas interdit de penser que sous l’aspect « humanitaro-utilitariste » de cette proposition se cachait une réalité bien moins reluisante avec, peut-être, l’arrière-pensée de disposer d’une main-d’œuvre abondante et à bon marché, rendue docile par le fait qu’elle ne parlait pas ou mal le français. Et que, dans l’ignorance de la réglementation en matière de droit du travail, elle accepterait les travaux les plus pénibles sans compter ses heures.

Mais le 13 août, face à l’indignation suscitée par cette proposition aussi absurde que provocatrice, c’est marche arrière toute. Dans un communiqué publié dans la revue professionnelle « Tendancehôtellerie.fr » – et ignoré par la presse -, Didier Chenet se déballonne piteusement et enterre sa proposition : « Bien entendu, il ne s’agissait pas d’embaucher des personnes en situation illégale ou irrégulière sur notre sol, mais d’embaucher des réfugiés ayant leurs papiers en règle et toutes les autorisations de travailler ». Et de préciser à l’intention de ceux qui avaient sans doute mal compris ses propos : « Il ne s’agissait pas non plus d’un appel général à une régularisation des sans-papiers comme d’aucuns, par provocation ou besoin de sensationnel, ont bien voulu le prétendre ou l’écrire ». Là, il y va un peu fort le président du GNI de l’hôtellerie-restauration. N’est-ce pas lui qui a interpellé le gouvernement pour « qu’il donne des papiers à ces personnes-là » ? Quant à parler de « provocation » et de « besoin de sensationnel », il est vraiment mal placé pour les dénoncer, lui qui est à l’origine de cette surprenante annonce. Mais ce n’est pas tout. Comme son discours pro-migrants a dû indisposer nombre de ses adhérents, il croit utile de rassurer ceux qui s’inquiétaient de cette dérive : « Assurément il ne s’agit pas non plus d’exclure de nos offres d’emploi nos concitoyens et encore moins nos jeunes ». ajoute-t-il, comme si cela n’allait pas de soi.

Fausse bonne idée

Bref, une polémique totalement inutile dans laquelle les responsables de ces organisations professionnelles se sont ridiculisés. Pire, ils se sont même discrédités auprès des membres de la profession en se fourvoyant avec cette fausse bonne idée.
Plutôt que de chercher des pis-aller, les hôteliers-restaurateurs devraient avant tout revoir la gestion de leurs entreprises afin de les rendre plus attractives pour le personnel et d’attirer les demandeurs d’emploi. Dans un pays qui est la première destination touristique mondiale, où les visiteurs se pressent chaque année plus nombreux pour découvrir la richesse de son patrimoine, la beauté de ses sites tout autant que sa gastronomie, il n’est pas acceptable que les employés de ce secteur soient si mal payés et que leurs efforts ne soient pas davantage reconnus par leur employeur.

Ils exercent un métier ingrat dans des conditions parfois difficiles avec des horaires de travail atypiques qui les privent souvent de toute vie de famille les week-ends et jours fériés. Tout cela doit être pris en compte par l’État qui n’aide pas vraiment ces petits patrons en leur imposant des normes toujours plus contraignantes et en les ponctionnant de charges et de taxes.

Il faut espérer que l’État prendra en compte toutes ces problématiques dans le cadre du plan-emploi qui sera présenté à l’automne par l’UMIH pour favoriser le recrutement et la formation des personnes en recherche d’emploi. Sans avoir besoin de « faciliter la régularisation des migrants ».

Alain Marsauguy pour ripostelaique.com