DU SIXIEME SENS A L'ORDINATEUR ORGANIQUE
Michel Lhomme
L'armée et les services secrets américains utilisent des rats que
l'on appelle dans le milieu militaire US, les rats DARPA ou plus
communément "rat-bot" du nom d'une agence qui dépend du Ministère de la
défense américain et de son programme intitulé précisément ''rat-bot''.
Ce programme vise à guider un rat à distance en lui envoyant des
impulsions électriques indolores dans le cerveau. Il a été pour le
Pentagone ou la NSA plus que concluant. On n'arrête pas, en fait,
d'expérimenter sur les rats pour préparer le trans-humain.
Des chercheurs américains sont parvenus, par exemple, à mettre au point un implant cérébral sur des rats qui leurs donne la capacité de percevoir la lumière infrarouge que leurs yeux ne peuvent pas distinguer. Or, qui n'a pas rêvé au moins une fois dans sa vie d'avoir un sixième sens et surtout de disposer de facultés supérieures à la normale, comme celles de tout voir et de tout entendre ? Cette possibilité, le fantasme privé du Big Brother, on vient aujourd'hui d'en franchir un bon pas avec la prouesse réalisée par des chercheurs de l'université Duke aux Etats-Unis.
Rapportés dans la revue Nature Communication,
ces travaux sont les premiers à aboutir sur un dispositif capable de
donner un nouveau sens à un animal. L'implant en question est une
neuroprothèse composée d'un détecteur infrarouge relié à des
microélectrodes, elles-mêmes connectées à une région du cortex liée au
toucher. C'est notamment cette dernière région cérébrale qui reçoit des
informations provenant des vibrisses, les fameuses moustaches
ultrasensibles des rats. Pour tester leur dispositif, les chercheurs ont
procédé en plusieurs étapes. Dans un premier temps, ils ont entrainé
des rats exposés à trois diodes à se diriger vers celle qui s'allumait
afin de pousser un levier leur permettant d'obtenir quelques gouttes
d'eau. Puis, ils ont équipé les rongeurs de la neuroprothèse et ont
recommencé l'expérience avec trois lumières infrarouges. Les premiers
jours, les sujets ne se sont pas toujours dirigés vers la bonne
direction, celle de la lumière. Toutefois, les chercheurs ont constaté
qu'après avoir appuyé sur l'interrupteur, les rats se mettaient à se
frotter les moustaches, suggérant ainsi qu'ils "sentaient" bien la
lumière infrarouge, comme s'ils la touchaient. Il a alors fallu
seulement un mois pour confirmer complètement l'efficacité du
dispositif. Passé ce délai, les rats avaient pleinement associé la
nouvelle sensation avec les sources de lumière et étaient capables de
trouver dans 100% des cas, laquelle des lumières étaient allumées. Les
rats qui ne possédaient pas le dispositif, eux, ne parvenaient pas, la
plupart du temps, à trouver la bonne. La démonstration ne s'arrête pas
là puisqu'elle a également permis de faire une découverte d'importance.
En
effet, cette étude démontre qu'une région cérébrale et des neurones,
impliqués dans un sens précis peuvent aussi interpréter d'autres types
d'informations sensorielles. « Les nerfs ont répondu en même temps au
toucher et à la lumière infrarouge. Ceci montre que le cerveau humain
peut acquérir de nouvelles capacités qui n'ont jamais été expérimentées
sur l'animal avant cela », a ajouté le scientifique. En théorie, une
personne aveugle pour cause de dommage au niveau du cortex visuel
pourrait recouvrer la vue en utilisant un implant sur une autre partie
de son cerveau. Tout comme pourrait le faire une personne devenue sourde
en raison de dommages au niveau du cortex auditif. « Ceci suggère
que, dans le futur, il serait possible d'utiliser des dispositifs de
type prothèses pour restaurer des modalités sensorielles qui ont été
perdues, telles que la vision, en utilisant une partie cérébrale
différente », a confirmé le Dr Nicolelis cité par le Telegraph.
En somme, cette recherche ouvre la voie à la possibilité d'améliorer ou
d'exacerber les capacités dont disposent déjà les animaux y compris
l'être humain. « Cela pourrait être de détecter des rayons X, des ondes radio, ou n’importe quoi d’autres »,
a précisé le scientifique. Déjà, on a réussi à mettre au point un œil
bionique capable de restaurer une partie de la vision à des aveugles. Nous
entrons donc bien dans l'ère des NBIC
(Nanotechnologie-Biotechnologie-Informatique et sciences Cognitives)
sans réellement en mesurer toutes les conséquences perceptives car si
l'on parvient à exacerber un sens, le sujet pourra-t-il vraiment
contrôler cette "amélioration" ? Le sixième sens ne sera-t-il pas vécu
comme une hypersensibilité pour le sujet ? Aujourd'hui, les rayons
infrarouges ne nous gênent pas car nous ne les percevons pas, mais si
demain nous les percevions, cela ne risquerait-il pas d'altérer notre
vision du monde ? Il pourrait, en effet être très désagréable de
percevoir ce qu'on ne perçoit pas en temps normal et de forcer en
quelque sorte la nature des choses.
Du rêve télépathique à l'ordinateur organique
Cette inquiétude légitime ne va-t-elle pas pourtant passer dans les oubliettes de la science avec la connexion intercontinentale envisageable du cerveau de deux souris (via des implantes et des câbles) et la possibilité ainsi de concevoir demain un super ordinateur organique.
En effet, dans le genre transhumain, il y aura plus que le sixième sens. Toujours à la Duke University, les scientifiques de l'équipe Nicolelis s'étaient distingués l'année dernière en réalisant la première interface cerveau-cerveau. Ils avaient réussi à connecter les cerveaux de deux rats, séparés de 5 000 km, par voie électronique, puis à transférer une information motrice ou tactile de l’un à l’autre pour guider l’accomplissement d’une tâche simple. Dans cette expérience, les chercheurs avaient utilisé des rats « encodeurs » et « décodeurs ». Les rats encodeurs étaient entraînés à répondre à un signal visuel ou tactile, en appuyant sur la touche correspondante, pour obtenir une récompense. Les chercheurs enregistraient ensuite l'activité cérébrale de ces rats encodeurs à l'aide d'un réseau de microélectrodes implantées dans leur cerveau. Ils transmettaient alors ces informations, sous forme de micro stimulations intra corticales (MSIC), aux aires corticales correspondantes chez le rat décodeur. Le rat décodeur, ainsi "informé" des actions visuelles ou tactiles de son congénère encodeur, devait reproduire les mêmes actions en choisissant d'actionner différentes touches, ce qu'il fit avec un excellent taux de réussite. « Par ces expériences, nous avons pu établir un lien de communication direct d'un nouveau type entre des cerveaux et montrer la validité du concept d'"ordinateur organique"», souligne le Professeur Nicolelis qui ajoutait aussitôt : « La prochaine étape de nos recherches sera d'essayer de construire un vaste réseau de cerveaux qui pourrait permettre l'émergence de propriétés et capacités nouvelles ». L'ordinateur quantique serait-il déjà mort né et remplacé par l'ordinateur organique ?