Lors
d'une rencontre avec le ministre du Budget Bernard Cazeneuve, le
ministre de l'Éducation nationale aurait proposé cette mesure qui
permettrait d'économiser 1,2 milliard par an. L'intéressé a démenti dans
la soirée.
C'est une proposition choc qui devrait
provoquer beaucoup de remous. Alors que le gouvernement a ouvert la
chasse aux dépenses publiques -plus de 50 milliards d'euros d'économies
sont à trouver de 2015 à 2017 pour ramener les comptes publics à terme à
l'équilibre mais aussi financer le pacte de responsabilité du président
de la République-, Vincent Peillon a voulu, comme tous les ministres, qui ont été ou seront amenés à le faire, apporter sa contribution. Et quelle contribution!
L'idée du ministre de l'Éducation, qu'il comptait soumettre mercredi soir à Bernard Cazeneuve,
son homologue du budget lors d'un entretien en tête-à-tête dans son
bureau: geler, pendant 2 ans, les avancements automatiques à
l'ancienneté et les promotions -le glissement vieillesse technicité, ou
GVT dans le jargon technique- des quelque 5,2 millions de fonctionnaires
au dernier recensement. C'est-à-dire de l'ensemble des trois fonctions
publiques (État, hospitalière et territoriale), et pas des seuls agents
de l'Éducation nationale sur lesquels Vincent Peillon a autorité. Cette
mesure ô combien radicale permettrait d'économiser, selon les calculs du
ministre, pas moins de 1,2 milliard par an.
4 années de gel du point d'indice
Vincent
Peillon devrait aussi défendre cette proposition samedi à l'Élysée,
lors de la deuxième réunion du conseil stratégique de la dépense
publique, piloté par François Hollande.
Pas sûr toutefois que le président de la République la valide. Car la
mettre en pratique serait impopulaire, et ce d'autant plus que le point
d'indice, autre composante importante du salaire des fonctionnaires, n'a
pas été revalorisé depuis 2010 et que les syndicats ont fait de sa
hausse un de leurs chevaux de bataille. Voire un casus belli au cas où
le gouvernement aurait le mauvais goût de le geler pour la cinquième
année.
L'Élysée reconnaissait d'ailleurs récemment que le
président devrait probablement procéder à un «petit geste» sur le
dossier sensible du point d'indice au second semestre 2014, dans le
cadre des discussions salariales pour 2015. Un tour de vis
supplémentaire, cette fois-ci via le gel du GVT comme le suggère Vincent
Peillon, braquerait donc un peu plus les fonctionnaires, à qui Jean-Marc Ayrault a récemment promis que les économies ne se feraient pas «sur leur dos».
Les dindons de la farce
Un
engagement, comme le disaient Jacques Chirac et Charles Pasqua, qui
n'engage toutefois que ceux qui le croient… Car outre la question de
rémunération, les fonctionnaires sont très remontés contre les efforts
que le gouvernement ne cesse de leur demander depuis l'élection de
François Hollande il y a 20 mois. Si la méthode du président change de
son prédécesseur -Hollande a mis en place la modernisation de l'action
publique (MAP) quand Sarkozy avait institué la Révision générale des
politiques publiques (RGPP)-, les résultats sont exactement les mêmes.
Mis à part dans l'Éducation nationale et les ministères prioritaires
(Justice, Sécurité), les départs en retraite ne sont pas remplacés
(parfois même au-delà du sacro-saint ratio de «un sur deux» imposé par
Nicolas Sarkozy) et les fonctionnaires ont donc l'impression d'être
devenus les dindons de la farce.
Cerise sur le gâteau, la
proposition de Vincent Peillon tombe la veille d'une journée de
mobilisation et de grève, lancée à l'appel de la CGT. Et devrait donc
naturellement gonfler les rangs des bataillons des contestataires, déjà
très pourvus parmi les fonctionnaires, à la politique de François
Hollande. Dans la soirée, le ministère de l'Éducation nationale a publié
un communiqué, dans lequel il «dément formellement avoir proposé un gel
des avancements et des promotions des fonctionnaires dans le cadre des
discussions budgétaires.»