Le Conseil constitutionnel a été saisi
le 6 mars 2017 par le Conseil d'État d'une question prioritaire de
constitutionnalité relative à la conformité aux droits et libertés que
la Constitution garantit des articles du code de la santé publique
(CSP), dans leur rédaction résultant de la loi n° 2016-87 du 2 février
2016 créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en
fin de vie.
Les trois articles contestés par l’Union nationale de familles de traumatisés crâniens et de cérébro-lésés (UNAFTC) portent
- pour le premier (article L. 1110-5-1 du CSP), sur le principe d'un arrêt des traitements en cas d'obstination thérapeutique déraisonnable,
- pour le deuxième (article L. 1110-5-2 du CSP), sur les cas où une sédation profonde et continue provoquant la perte de conscience peut être administrée en même temps que des traitements de maintien en vie sont arrêtés
- pour le dernier (article L. 1111-4 du CSP), sur la prise en compte de la volonté du patient pour l'administration des traitements médicaux, y compris lorsqu'il est hors d'état d'exprimer sa volonté.
- L'article L. 1110-5-1 prévoit une telle procédure uniquement lorsqu'un arrêt des traitements est envisagé au titre du refus de l'obstination déraisonnable, pour un patient hors d'état de s'exprimer.
- L'article L. 1110-5-2 l'impose, que le patient soit en mesure ou non d'exprimer sa volonté, afin que l'équipe médicale examine si les conditions médicales requises pour mettre en œuvre une sédation profonde et continue, simultanément à l'arrêt des traitements, sont réunies.
- L'article L. 1111-4 rappelle l'exigence d'une procédure collégiale dans le cas prévu à l'article L. 1110-5-1.
En premier lieu, le médecin doit
préalablement s'enquérir de la volonté présumée du patient. Il est à cet
égard tenu de respecter les directives anticipées formulées par ce
dernier, sauf à les écarter si elles apparaissent manifestement inappropriées ou non conformes à la situation médicale du patient. En leur absence, il doit consulter la personne de confiance désignée par le patient ou, à défaut, sa famille ou ses proches.
En deuxième lieu, il n'appartient pas au Conseil constitutionnel de substituer son appréciation à celle du législateur
sur les conditions dans lesquelles, en l'absence de volonté connue du
patient, le médecin peut prendre, dans une situation d'obstination
thérapeutique déraisonnable, une décision d'arrêt ou de poursuite des
traitements. Lorsque la volonté du patient demeure incertaine ou
inconnue, le médecin ne peut cependant se fonder sur cette seule
circonstance, dont il ne peut déduire aucune présomption, pour décider
de l'arrêt des traitements.
En troisième lieu, la décision du
médecin ne peut être prise qu'à l'issue d'une procédure collégiale
destinée à l'éclairer. Cette procédure permet à l'équipe soignante de vérifier le respect des conditions légales et médicales d'arrêt des soins et de mise en œuvre, dans ce cas, d'une sédation profonde et continue, associée à une analgésie.
En dernier lieu, la décision du médecin
et son appréciation de la volonté du patient sont soumises, le cas
échéant, au contrôle du juge.
Le Conseil constitutionnel a en outre apporté les compléments suivants, en statuant sur le fondement du droit à un recours juridictionnel effectif :
Le Conseil constitutionnel a en outre apporté les compléments suivants, en statuant sur le fondement du droit à un recours juridictionnel effectif :
- d'une part, une décision d'arrêt ou de limitation de traitements de maintien en vie conduisant au décès d'une personne hors d'état d'exprimer sa volonté doit être notifiée aux personnes auprès desquelles le médecin s'est enquis de la volonté du patient, dans des conditions leur permettant d'exercer un recours en temps utile ;
- d'autre part, une telle décision doit pouvoir faire l'objet d'un recours aux fins d'obtenir sa suspension, examiné dans les meilleurs délais par la juridiction compétente.
Après avoir apporté ces précisions, le
Conseil constitutionnel a, en conséquence, déclaré conformes à la
Constitution, les mots « et, si ce dernier est hors d'état d'exprimer sa
volonté, à l'issue d'une procédure collégiale définie par voie
réglementaire » figurant au premier alinéa de l'article L. 1110-5-1 du
code de la santé publique, le cinquième alinéa de l'article L. 1110-5-2
du même code et les mots « la procédure collégiale mentionnée à
l'article L. 1110-5-1 et » figurant au sixième alinéa de l'article L.
1111-4 du même code.