.

.

dimanche 4 février 2018

Nasrallah sur Trump et le terrorisme "islamiste" / Finkelstein sur Trump et Jérusalem

Hassan Nasrallah : les USA utilisent Daech pour légitimer l'Occupation du Moyen-Orient
Hassan Nasrallah répond à Trump : Il n'y a pas de terrorisme «islamiste»

Norman Finkelstein: Trump a reconnu Jérusalem capitale d'Israël pour récompenser ses donateurs



Hassan Nasrallah : les USA utilisent Daech pour légitimer l'Occupation du Moyen-Orient

Discours du Secrétaire Général du Hezbollah, Sayed Hassan Nasrallah, le 19 janvier 2018, à l’occasion de la commémoration du décès du père des martyrs Jihad, Fouad et Imad Moghniyeh


Transcription:

[...] Quant aux questions régionales, j'ai deux mots à dire et je ne serai pas long. Ce qui s'est passé durant les derniers jours prouve de manière irréfutable tout ce que nous et d'autres avons dit au début des événements dans la région (en 2011) au sujet des objectifs américains.
Eh bien, hier, le Secrétaire d'Etat américain, Tillerson, a annoncé– bien sûr, il ne s'agit pas d'un Tweet de Trump : Tillerson s'est exprimé posément après une réunion avec son entourage, une réflexion poussée, etc., ce n'est pas un simple Tweet ; car pour sa part, Trump peut publier des Tweets (inconsidérés) –, (Tillerson) a annoncé que les forces américaines resteraient en Irak, et que les forces américaines resteraient en Syrie (durablement). Eh bien, pourquoi est-ce que vous voulez rester en Irak et en Syrie ? Alors que lorsque vous avez créé la coalition internationale, et que vous êtes venus en Irak et en Syrie, à l'époque, vous avez déclaré que vous n'aviez pas l'intention de rester – voyez donc l'hypocrisie des Etats-Unis –, que vous n'aviez pas l'intention de rester, mais que vous étiez seulement venus pour faire reculer Daech. Et les personnes qui ont le moins contribué à faire reculer et vaincre Daech, c'est bien vous, les Américains !
Eh bien, que dit maintenant (Tillerson) ? Il dit que les forces et les bases américaines resteront en Irak et en Syrie pour empêcher le retour de Daech. Magnifique. Je veux rappeler ce que nous avons dit il y a quelques années – vous pouvez consulter les archives. Lorsque nous avons dit – et pas seulement nous, beaucoup l'ont dit dans la région – que les Américains ont créé Daech pour avoir un prétexte et une excuse pour le retour de leur forces armées dans la région, et surtout en Irak, après que le peuple, le gouvernement et la résistance héroïque d'Irak les aient fait sortir, et que les Irakiens aient refusé que les Américains aient des bases militaires et que leurs soldats et officiers reçoivent une immunité diplomatique, (après quoi) Obama a pris la décision de se retirer. 
Eh bien, comment les Américains veulent-ils revenir en Irak ? Ils ont besoin d'un prétexte pour revenir en Irak. Ils ont donc créé Daech, pour revenir en Irak. Et aujourd'hui, au prétexte de Daech, ils veulent rester (durablement) en Irak. De même, au prétexte de Daech, ils sont venus en Syrie, et au prétexte de Daech, ils veulent rester (durablement) en Syrie. Alors que le monde entier sait bien, comme l'a reconnu Trump, que ce sont les Etats-Unis qui ont créé Daech.
Aujourd'hui, je peux dire aux Américains, pour qu'ils ne trompent pas l'opinion publique : vous voulez que Daech ne revienne pas ? Il suffit que vous ne le fassiez pas revenir, et Daech ne reviendra pas. Ne demandez pas à vos alliés du Golfe et de la région de lui donner de l'argent et des armes, et Daech ne reviendra pas. Ne demandez pas à différents pays du monde d'accorder des facilités aux takfiris pour qu'ils rejoignent Daech, et Daech ne reviendra pas. Empêcher Daech de revenir en Irak et en Syrie ne nécessite nullement de bases américaines ni de forces américaines. Les Irakiens se chargeront d'empêcher Daech de resurgir. Et les Syriens se chargeront d'empêcher Daech de resurgir. Et ce que prétend le Secrétaire d'Etat américain n'est que mensonges, hypocrisie, duperie et imposture à l'encontre des peuples de la région, il façonne de toutes pièces des prétextes spécieux pour maintenir les forces et les bases américaines dans la région, qui est le véritable objectif. Aujourd'hui, cela est clair et évident.
Bien sûr, en Syrie, le gouvernement syrien a annoncé sa position, et il est évident que les forces américaines ne se sont pas coordonnées avec les Syriens. Mais en Irak, on ne sait pas si le gouvernement américain a conclu un accord avec le gouvernement irakien pour le maintien de ces bases. Nous n'avons pas d'informations à ce sujet. Ou est-ce que les Américains se contentent d'informer l'rak et les Irakiens qu'ils vont rester sur leur territoire, sans leur consentement ou leur accord, qu'ils le veuillent ou non. Je considère que cela fait partie des grands défis auxquels doit faire face le gouvernement irakien, le peuple irakien et les dirigeants et forces politiques irakiens, le fait que les Etats-Unis veuillent imposer à nouveau, à leurs conditions, leur bases aux Irakiens au prétexte de Daech. [...]


_____________________________________


Hassan Nasrallah répond à Trump : Il n'y a pas de terrorisme « islamiste »

Discours du Secrétaire Général du Hezbollah, Sayed Hassan Nasrallah, le 19 janvier 2018, à l’occasion de la commémoration du décès du père des martyrs Jihad, Fouad et Imad Moghniyeh

Dans cet extrait, Nasrallah réagit également au propos de Donald Trump selon lequel certains pays africains et Haïti seraient des « pays de merde ».



Transcription :

[...] (Je tiens) également (à évoquer) un autre point à ce sujet, (à savoir) la persistance de la fatuité, de la morgue, de l'arrogance,du mépris et du racisme des Etats-Unis à travers l'administration Trump et les déclarations que nous avons entendues. En ce qui concerne les musulmans et l'Islam, il ne leur a épargné aucun affront durant la campagne présidentielle et après qu'il ait remporté les élections. Et son insistance à employer l'expression « terrorisme islamiste » est l'une des preuves les plus flagrantes de sa grande hostilité pour l'Islam.

Il n'y a pas de « terrorisme islamiste ». Par exemple, serait-il acceptable que de notre côté, un musulman proclame que l'emploi de l'arme atomique au Japon par les Etats-Unis, à Hiroshima et ailleurs, constitue du « terrorisme chrétien » ? Est-ce que tous les massacres perpétrés par le passé et jusqu'à présent par les Etats-Unis dans de nombreuses régions du monde, parce qu'ils sont chrétiens, pouvons-nous dire que c'est du « terrorisme chrétien » ? Nous refusons de caractériser le terrorisme américain comme du « terrorisme chrétien ». Nous le refusons (catégoriquement). [Dans un discours précédent, Nasrallah a affirmé la même chose à propos d'Israël, rappelant que le Hezbollah dénonçait toujours le terrorisme « sioniste » et non pas « juif »].

Je ne dis pas ça pour flatter les chrétiens. Si nous disions que c'était là du terrorisme chrétien, nous agresserions injustement les chrétiens et la religion chrétienne. Ce n'est pas pour faire plaisir aux chrétiens (que je dis cela). Mais les chrétiens doivent eux aussi rejeter cette expression (« terrorisme islamiste »), et je vous affirme que Trump fait exprès de décrire le terrorisme comme « islamiste ». Il ne dit pas, par exemple, le « terrorisme takfiri », ou le « terrorisme wahhabite », car ce sont ses agents, ses alliés. Il ne dit pas le « terrorisme x ou y », il dit (sciemment) le « terrorisme islamiste », afin de salir l'Islam, la religion musulmane et le Prophète de l'Islam en les décrivant comme (intrinsèquement) terroristes.

Eh bien aujourd'hui, je vous dis davantage en ce qui concerne les musulmans : en plus de l'insulte adressée à 1,4 milliard de musulmans et des centaines de millions de chrétiens avec la question d'Al-Quds (Jérusalem, reconnue capitale d'Israël), (Trump) se met à insulter les pays d'Afrique ainsi qu'Haïti, avec les termes dégradants qu'il a utilisés à l'encontre de ces peuples [« pays de merde »]. 

C'est là une continuité de la fatuité, de la morgue,de l'arrogance des Etats-Unis, que certains dans le monde considèrent comme (la puissance) qui règle les problèmes, qui garantit le respect du droit, de la justice et des droits de l'homme... Si le Président de ce pays est un homme raciste, haineux, arrogant, méprisant à l'égard d'êtres humains, des enfants d'Adam, du fait de leur couleur, de leur langue, de leur religion ou de leur région géographique, sur qui comptent donc ces pro-américains ? [...]


_____________________________________

Norman Finkelstein: Trump a reconnu Jérusalem capitale d'Israël pour récompenser ses donateurs

Interview de Norman Finkelstein sur Democracy Now, le 10 janvier 2018 






Transcription:
Amy Goodman : Avant de parler plus longuement de Gaza, je voulais vous demander brièvement ce qui a selon vous motivé le Président Trump à reconnaitre Jérusalem comme capitale (d’Israël), déclarant qu'il déplacerait l'ambassade américaine de Tel Aviv, et ce que vous pensez de la réponse massive à l'ONU après que cette reconnaissance ait été annoncée, le vote écrasant contre les États-Unis, et le fait que les États-Unis ont menacé ceux qui ont voté contre eux.

Norman Finkelstein : Eh bien, le fonctionnement de la politique américano-israélienne est une question un peu compliquée. Mais en général, on pourrait dire que lorsque des intérêts nationaux majeurs sont en jeu, le lobby israélien a très peu de pouvoir. Nous l’avons vu, par exemple, lors des négociations sur l’accord avec l’Iran. C’était un intérêt national majeur pour les États-Unis. Le lobby y était radicalement opposé. Netanyahou y était radicalement opposé. Mais l’accord est passé. Et de nombreux partisans d’Israël – Dianne Feinstein, Nancy Pelosi, l’ensemble du gang – ont soutenu l’accord. Mais quand un intérêt majeur des États-Unis n’est pas en jeu, le lobby est assez puissant.

Donc dans ce cas particulier, il était clair que les Saoudiens, qui constituent un intérêt majeur pour les États-Unis, se fichaient de ce que les États-Unis feraient de Jérusalem. Ils ont donné le feu vert : « Si vous voulez la donner à Israël, ça ne nous pose pas de problème, on s’en moque ». Donc, aucun intérêt national américain n’était en jeu, et Trump a donc fait ce que tout le monde fait : il a récompensé ses donateurs. Dans ce cas, c’était Sheldon Adelson, le magnat des casinos milliardaire, qui soutenait fortement la reconnaissance américaine de Jérusalem comme capitale indivise d’Israël. 

Mais nous devons garder à l’esprit que ce n’était pas seulement Trump. Vous savez, parfois les médias veulent accabler Trump. Et ils oublient qu’il ne s’agit pas seulement de Trump. Charles Schumer, l’actuel leader de la minorité sénatoriale, Schumer attaquait constamment Trump, juste après son élection : « Pourquoi ne reconnaissez-vous pas Jérusalem comme la capitale indivise (d’Israël) ? » Quand Trump l’a reconnue, Schumer, Charles Schumer,  a dit : « Il l’a fait grâce à moi, c’est moi qui l’ai poussé à reconnaître Jérusalem capitale d’Israël. » Voilà les propos du chef de la minorité sénatoriale.

Et pour la même raison, si vous regardez l’argent de Schumer, il l’obtient principalement des Juifs conservateurs de droite et de Wall Street, les mêmes sources d’argent que Trump, les mêmes financeurs. Et sur ces questions, beaucoup de démocrates, y compris Schumer – ou plutôt surtout Schumer, devrais-je dire – sont pires que Trump. 

Par exemple, après l’incident du Mavi Marmara en 2010, quand Israël a tué les passagers à bord du navire humanitaire, le Mavi Marmara, ils ont tué 10 passagers, Charles Schumer s’est rendu devant un groupe de Juifs orthodoxes et a déclaré : « Les habitants de Gaza ont voté pour le Hamas, ils ont voté pour le Hamas, et par conséquent, la strangulation économique est la voie à suivre. » Ayez bien conscience du fait que nous parlons d’une population, dont plus de la moitié est composée d'enfants, qui vit sous un siège médiéval. Et ce qu’il dit en substance, c’est que nous devrions continuer à les affamer, jusqu’à ce qu’ils votent contre le Hamas ou se débarrassent du Hamas. Que dire d’un tel personnage ?

Vous savez, Charles Schumer était dans le même lycée que moi, tout comme Bernie Sanders du reste. Je ne le connaissais pas. Il avait, je crois, quatre ans d’avance sur moi. J’ai assez bien connu sa sœur, Fran. Extrêmement intelligente. Vous savez, même maintenant, près d’un demi-siècle plus tard, je m’en souviens toujours aussi bien. Une jeune femme extrêmement brillante. Ils étaient décents, en fait. Chuck – on l’appelait Chuck –, son père était un exterminateur. Vous savez, c'est très marquant. C’était un spectacle impressionnant. C’était quelqu'un d'extrêmement brillant. Il était major de sa classe, et il était très en avance sur tout le monde, comme Fran, vous voyez ? Mais que dire de ce qu’ils sont devenus ? 

Il a grandi à Kings Highway à Brooklyn, tout près de l’endroit où Bernie [Sanders] a grandi. Je passais devant sa maison tous les jours, en allant à la piscine en vélo. Que peut-on dire d’une personne qui recommande d’affamer des enfants ? C’est ce qu’il a préconisé, vous savez. C’est un monstre moral. Et il faut reconnaitre ce fait. C’est un monstre moral. Et pourtant, tout le monde veut cracher sur Trump. Que dire de personnes comme Schumer ?

Amy Goodman : Eh bien, nous allons faire une pause, et ensuite, nous parlerons de la situation que vous décrivez à Gaza. Votre nouveau livre s'intitule Gaza: une enquête sur son martyre. Nous parlons avec l'auteur et chercheur Norman Finkelstein. Le livre vient tout juste d'être publié. Restez avec nous. [...] 

Traduction des deux dernières parties sur Gaza à venir sur dailymotion.com/Sayed_7asan.