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mercredi 18 juillet 2018

Mais arrêtez donc de beugler La Marseillaise !

Cela faisait un moment que ça me démangeait. Mais là, vraiment, je n’en peux plus, ça me gratte trop. Et tant pis si mes démangeaisons font désordre dans le magnifique paysage de concorde nationale que l’on nous brosse depuis hier soir. Je n’en peux plus d’entendre La Marseillaise non pas chantée, mais beuglée, à temps et contretemps, par des bandes de supporters de la dernière heure, plus ou moins ivres de joie et/ou d’alcool. Cela ne date pas d’hier, du reste. Et pour être tout à fait honnête, j’avoue que mon agacement ne se limite pas aux Marseillaise approximatives hurlées avant, pendant ou après un match de foot. Pour avoir assisté à des rassemblements politiques d’ampleur, j’ai pu constater cette fâcheuse manie d’entonner l’hymne national, notamment le refrain, n’importe quand, pour meubler l’espace sonore, entre les traditionnels « On a gagné » et « Ils ont perdu », dont je vous épargne la richesse des rimes. La Marseillaise n’est pas une chanson à boire.

Si La Marseillaise fut un chant révolutionnaire, une marche pour aller à la guerre, elle est aujourd’hui l’hymne de notre patrie, que les paroles plaisent ou déplaisent. Faut-il que ce soit un Allemand d’avant-guerre, Friedrich Sieburg, auteur du fameux Dieu est-il français ? – il paraît que nous aurions la réponse depuis dimanche soir – qui nous rappelle que « La Marseillaise continue la prière de Jeanne » ? Qu’on me pardonne une certaine déformation professionnelle, mais « à l’armée », on ne chante ou joue pas La Marseillaise n’importe quand : montée des couleurs, honneur au drapeau ou à l’étendard, à l’autorité qui préside une cérémonie lorsqu’elle vient saluer l’emblème. Et après la minute du silence qui suit la sonnerie aux morts : comme pour marquer que leur sacrifice n’a pas été vain. Point. Chanter, jouer l’hymne national ne relève pas du registre de la beuverie mais de la liturgie. 

Finalement, si l’on devait remercier Giscard d’Estaing pour une seule chose, ce n’est pas tant, comme l’a twitté dimanche soir l’ « humoriste » et conseiller d’Emmanuel Macron, Yassine Bellatar, d’avoir « permis le regroupement familial », et « la naissance de trois quarts des Bleus » – comme quoi, certains tiennent à jour des quotas – mais d’avoir voulu ralentir le rythme de La Marseillaise pour lui redonner son tempo d’origine. Il fut d’ailleurs beaucoup critiqué à l’époque pour cette décision. Il faut reconnaître que cela donnait à l’interprétation de notre hymne une solennité que l’on retrouve dans le God Save the Queen, qui, selon la tradition, trouve son origine en France sous le règne de Louis XIV. 

La Marseillaise est un chant de soldats, pas de soudards. On est pris parfois d’un doute, notamment en certain soir de victoire.