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lundi 22 mai 2017

En attendant Godot : enfin le 2ème tour des élections législatives



Yves-Marie Laulan* , Président de l’Institut de Géopolitique des Populations ♦

Emmanuel Macron a réussi un joli coup en nommant à Matignon un Premier Ministre d‘une taille de géant, barbu, boxeur et, dit-on, gentiment égrillard.

Tout ce qu’il faut pour conduire la France vers son nouveau destin. L’homme fait peur. Gare aux délinquants, politiques et autres. Il cogne. Ceci étant, il est significatif que les sondages montrent bien un fond de méfiance de l’opinion envers ces nouveaux venus à la politique qui ne bénéficient nullement du fameux état de grâce. On demande à voir.
De fait, notre nouveau président, spécialiste des coups de baguette magique et des tours de prestidigitation devrait faire attention . En multipliant les symboles et les signes à l’infini, notre président risque fort de ne plus se faire prendre très au sérieux. Il n’est plus sur une scène de théâtre mais les pieds dans la boue de la réalité au quotidien, même s’il réside désormais à l’Elysée.
C’est bien joli de déambuler en « command car » le jour de son élection, puis de partir dare-dare au Mali pour affirmer sa vocation de chef des armées (même s’il n’a jamais fait le service militaire vue sa jeunesse et jamais tiré un coup de fusil de son existence, même à la chasse). Autant apprendre sur le tard. Mais il ne sera jamais un de Gaulle pour autant. Il faudra faire mieux.
D’autant plus que la période est troublée à l’extrême, et donc éminemment dangereuse, sur le plan international, avec un président américain menacé de destitution à peine élu, une Angleterre qui ne songe qu’à prendre la tangente avec le Bréxit, la crise des migrations de masse qui ne fait que commencer (tiens ,tiens, on n’en a absolument pas parlé pendant la campagne des présidentielles), la Corée du Nord qui ne rêve que d’atomiser à distance l’Amérique, la Russie devenue championne du hacking pour influencer, en vain d’ailleurs, la politique étrangère de ses voisins, bref , rien ne manque pour que « La Fête commence ».

Le nouveau gouvernement comporte deux verrues gênantes

La première est François Bayrou, champion du monde toutes catégories des faux semblants, des retournements de veste, des contorsions politiques les plus acrobatiques . Bayrou a dû commencer à faire de la politique «  à la béarnaise » dès qu’il a tenu sur ses deux jambes . Parfait pour En Marche mais tant pis pour le renouvellement promis. Il ne parait pas un choix idéal pour la Justice qui réclamerait plutôt un patron ferme et résolu pour mettre un terme aux innombrables conflits entre la justice et la police, lasse de voir relâchés l’après midi les voyous arrêtés le matin . On sait bien qu’il fallait le caser quelque part pour le remercier. Mais les Anciens Combattants auraient été parfaits. A moins qu’il ne s’agisse que d’une affectation provisoire en attendant le retour des urnes.
La seconde verrue est Nicolas Hulot. Elle est de taille. Là encore la volonté de jouer sur l’image s‘impose. Ce pauvre garçon a fait sa carrière de montreur d’image en allant polluer en hélicoptère les dernières terres encore vierges de la planète pour vendre de beaux clichés qui ont fait sa fortune et celle de sa Fondation. Un beau score. Et l’on voit ce rigolo s ’attaquer à ce cactus d’épines que constitue le projet de l’aéroport de Notre-Dame des Landes ? Les mêmes « possédés » qui s’attaquaient tantôt au barrage de Sievens y font obstacle à grand renfort d’occupation du terrain. Parions qu’il va s’empresser de refiler ce bébé remuant à plus courageux. Ces gens là font leur carrière sur la consensualité, la convivialité, bref, tout ce qui fait plaisir et ne froisse personne au nom du fameux axiome de Jean Yann : « tout le monde il est beau , tout le monde il est gentil  ». On n’a rien trouvé de mieux. Or la politique, c’est malheureusement faire des choix et s’en tenir à ce qui a été décidé, même impopulaire.
Dans le cas présent, tout le monde veut cet aéroport, à part une poignée de voyous chevelus et de braves filles qui ne doivent pas se laver souvent Apparemment, ils aiment le camping par beau temps et n’ont pas grand chose à faire dans la vie. De plus, avec le RSA, ils n’ont pas trop à s’inquiéter pour leurs fins de mois. Le nouveau gouvernement a choisi de nommer un nouveau médiateur . Encore génial : quelques mois de gagnés pour repousser le problème aux calendes grecques . D’ici là peut-être l’aura-t-on oublié avec un peu de chances. Comme le disait avec philosophie un radical socialiste jadis : « il n’y a pas de problèmes insolubles que l’absence de solution ne puisse résoudre ». Ah ! la sagesse des anciens !
De toute façon, ce gouvernement, nommé, en principe ,pour l’éternité, risque fort de ne faire long feu ; il ne fera que « trois petits tours et puis s’en vont » comme dit la chanson, si les législatives, le fameux 3° tour, ne sont pas favorables. Alors pourquoi s‘en faire ? Quoi qu’il en soit, les heureux élus, même pour 3 jours, pourront, et c’est là l’essentiel, se faire appeler « Monsieur (ou Madame ) le Ministre » pour le reste de leur existence terrestre.
En tout état de cause, les ministres de nos jours, et surtout dans une période de transition, ne servent rigoureusement à rien, si ce n’est occuper des sièges vides, serrer les mains des huissiers de service, signer peut-être quelques décrets oubliés, accorder éventuellement quelques médailles aux copains si les quotas du ministère le permettent encore.
Il n’y a que la presse, cette grande bavarde, à y prêter la moindre attention quand elle n’est pas elle-même à l’origine de quelques drames affreux , comme le départ de l’inamovible David Pujadas du 20 h de France 2, qui sèment la tristesse et la désolation dans les chaumières.
*Yves-Marie Laulan a été haut fonctionnaire international et professeur à l’université . Il est également l’auteur de : “Un itinéraire français : Des Landes à l’Everest, en passant par les cocotiers”, éditions Dualfa, “Les nations suicidaires” éditions de Guibert (publié en France et à l’étranger) et “Allemagne ; chronique d’une mort annoncée”, éditions de Guibert.