
Source : exposition « Corto Maltese et la franc-maçonnerie »
Par Stéphane François1
Pour une proportion importante de la population, les
expressions « franc-maçonnerie » et « extrême droite » sont opposés et
inconciliables2.
Cela est vrai dans une certaine mesure. Si l’opinion publique a gardé
en mémoire les campagnes antimaçonniques de l’extrême droite, formulées
dès l’apparition des clivages politiques au sens contemporain du terme,
c’est-à-dire dès le début du XIXe siècle avec l’apparition de
la droite contre-révolutionnaire (avec Augustin de Barruel, Joseph de
Maistre ou Louis de Bonald par exemple), elle ne sait pas qu’il existe
des exemples, moins connus, de militants d’extrême droite membres de
loges maçonniques. Surtout, ces loges ne sont pas forcément des
scissions ou des dissidences conservatrices ou d’extrême droite, mais
des loges régulières, mêmes si elles sont parfois d’obédiences
marginales…
Le mythe du complot maçonnique
L’un des premiers livres à condamner la
franc-maçonnerie est celui d’un jésuite conservateur, antidémocrate et
rejetant les idées des Lumières, Augustin de Barruel (1741-1820)3. En effet, le prêtre dénonce dans Mémoires pour servir l’histoire du jacobinisme, un ouvrage en 5 tomes paru à Hambourg entre 1797 et 17994,
le rôle supposé des francs-maçons dans le déclenchement de la
Révolution française. Toutefois, « il est précédé en cela par la
brochure du comte Ferrand, publié à Turin en 1790, Les Conspirateurs démasqués. »5.
Cependant, Ferrand voit surtout dans ce complot l’action d’un
protestant, Necker. Barruel va plus loin : il estime que le complot est à
la fois antichrétien, antimonarchique et cherchant à détruire la
société d’Ancien régime. Les acteurs changent aussi : il ne s’agit plus
d’un complot protestant, mais maçonnique. Cette idée se cristallisera
dans les milieux catholiques intégristes. Pour s’en convaincre, il
suffit de garder à l’esprit la prégnance du « complot judéo-maçonnique »
dans ces milieux, comme le montrent les catalogues des Éditions
Barruel, des Éditions Saint Rémi, les Éditions de Chiré et, sur
Internet, la Bibliothèque Saint-Libère6. Récemment encore, le Vatican voyait dans la franc-maçonnerie une secte7…
Cette idée de complot vient notamment de l’usage de
l’expression « Supérieurs Inconnus », forgé initialement par des
francs-maçons. En effet, en 1751, le baron Charles-Gotthelf von Hund
fonde une nouvelle forme de maçonnerie : la Stricte Observance ou plus
exactement l’Ordre supérieur des chevaliers du Temple sacré de
Jérusalem. L’idée était que la franc-maçonnerie serait une perpétuation
des Templiers dirigée par des « Supérieurs Inconnus » (sortes d’êtres
suprêmes guidant certains initiés) dont Hund était, selon ses dires, le
seul mandataire, s’étant lui-même fait initier par un mystérieux
chevalier au « plumet rouge », en 1747. Cette légende va connaître un
succès considérable au cours des XIXe et XXe siècles.
Récupérés par les antimaçons, ces « Supérieurs Inconnus » vont devenir les vrais maîtres occultes de la franc-maçonnerie8.
Ils seront assimilés aux satanistes, aux juifs, aux maîtres de
l’Himalaya de la Société théosophique, etc., devenant le symbole de la
sphère dirigeante du complot mondial, selon la vulgate
conspirationniste. Cette idée de complot maçonnique se retrouve
également chez un auteur écossais, John Robison qui publie, également en
1797, un ouvrage développant la même thèse, intitulé Preuve d’une
conspiration contre toutes les religions et les gouvernements d’Europe
fomentées les assemblées secrètes des francs-maçons et des illuminés9. Pour
ce dernier, les Illuminés de Bavière auraient infiltré les loges
françaises et auraient provoqué la révolution française dans le but de
mettre en place un gouvernement mondial.
À compter de ce moment, la franc-maçonnerie est
assimilée à une société secrète, bien que ses rituels fussent divulgués
dès 1730 par Pritchard, dans son Masonry Dissected. Malgré cette
divulgation ancienne, la question du secret est restée capitale dans les
milieux d’extrême droite, qui voient dans la franc-maçonnerie une
société secrète. À compter de ce moment, l’idée d’un complot mondial
d’une société secrète cherchant à renverser les gouvernements va se
diffuser dans différents milieux et dans différents pays. Jusqu’à
récemment, cette thèse était surtout mise en avant par des auteurs ou
des groupes que l’on peut classer à l’extrême droite, principalement
dans la mouvance catholique traditionaliste et contre-révolutionnaire.
Encore aujourd’hui, des militants notoires de
l’extrême droite, considèrent que la Révolution française est à chercher
dans l’action de la franc-maçonnerie. C’est par exemple le cas de
l’antisémite et ancien collaborateur Henry Coston qui diffusa cette idée
des années 1930 à sa mort en 2001. C’est le cas également de Philippe
Ploncard d’Assac. Nous pourrions multiplier les exemples… Henry Coston
et Jacques Ploncard (dit d’Assac), le père de Philippe Ploncard d’Assac,
étaient des militants d’extrême droite dont l’amitié était soudée amis
par des antisémitisme et antimaçonnisme virulents. Conspirationnistes10,
ils participèrent durant la guerre au dépouillement des archives du
Grand Orient de France et à la recherche d’une supposée subversion
maçonnique. Ils étaient en outres des membres influents de la Commission
d’études judéo-maçonniques (CEJM)11,
qui siégeait dans les locaux du Grand Orient de France. Le financement
de leurs activités provenait des occupants nazis, qu’ils fréquentaient
dès 193412,
mais également de l’État français. Leurs thèses furent reprises
après-guerre par différents groupes extrémistes, allant des néonazis aux
catholiques traditionalistes.
Dans les années trente, l’idée fut reprise par Julius Evola13. Il voyait dans celle-ci une création moderne ex nihilo
et non pas une persistance d’une tradition immémoriale et s’opposait
par conséquent à René Guénon, qui voyait en la franc-maçonnerie
spéculative une héritière, certes dégénérée, de la franc-maçonnerie
médiévale. Il intégra dans sa pensée antimoderne des éléments
conspirationnistes issus des thèses antisémites et
contre-révolutionnaires d’auteurs comme Emmanuel Malynski et Léon de
Poncins, en particulier au livre La Grande conspiration d’Emmanuel Malynski, dont Léon de Poncins cosigna une version abrégée sous le titre La Guerre occulte. Juifs et Francs-Maçons à la conquête du monde14, qu’Evola traduisit et préfaça15.
Dans ses articles, il se penchait sur la notion de « guerre occulte »,
c’est-à-dire la guerre menée par les sociétés secrètes, notamment la
franc-maçonnerie, et par les Juifs contre la tradition, et analysait
l’action de ces dernières au prisme de la « contre-initiation »16.
Cet antimaçonnisme se porte toujours bien. Il est
réapparu quasiment dès la fin de la Seconde Guerre mondiale, reprenant
ses vieilles antiennes. Toutefois, il a muté dans les années
quatre-vingt-dix, intégrant au vieil anti-judéo-maçonnisme
d’avant-guerre des considérations antisionistes qui se nourrissent d’un
anti-maçonnisme musulman17.
Nous trouvons ce « nouvel anti-maçonnisme » par exemple chez Paul-Éric
Blanrue ou chez Alain Soral. Toutefois, leur antimaçonnisme se nourrit
encore des textes « classiques » parus au début du XXe siècle. Ainsi, Soral a réédité en 2012 la brochure du publiciste Maurice Talmeyr18, La Franc-maçonnerie et la Révolution française19, paru à l’origine en 1904. Kontre Kulture, sa maison d’éditions, a aussi publié en 2016 et 2017 Les Illuminés de Bavière de Jean Sébastien20 et Franc-maçonnerie. L’effroyable vérité de Stéphane Blet21. Soral s’inspire également des ouvrages d’Henri Coston, et de son héritier intellectuel Emmanuel Ratier, décédé en 2015.
Celui-ci est une figure intéressante de l’extrême
droite : diplômé de Science Po, journaliste, éditeur, ancien membre du
GRECE, militant néopaïen, pourfendeur des « lobbies » (ie juifs et francs-maçons), il est régulièrement accusé d’avoir été franc-maçon. Sa feuille confidentielle d’informations, Faits et Documents,
est très bien informée, dévoilant les noms d’hommes politiques
appartenant, ou soupçonnés d’appartenir, à une loge. De fait, il reprend
la tradition d’un Henri Coston, mais sans son antisémitisme délirant.
Cependant, l’antimaçonnisme actuel peut encore prendre l’aspect de
discours hallucinés typiques de certains milieux chrétiens de la fin du
XIXe siècle (au moment de l’« affaire Taxil »22), tels les ouvrages, articles ou conférences de Laurent Glauzy23.
Ce nouvel antimaçonnisme s’exprime également dans les milieux
catholiques réactionnaires par une condamnation publique, comme l’action
des Hommens (un groupuscule né des manifestations contre le droit au
mariage des homosexuels), déclamant contre l’incarnation du Diable,
devant le siège du Grand Orient de France en 2014. L’antimaçonnisme
reste donc d’actualité dans l’extrême droite la plus radicale.
La « vraie maçonnerie », ou la franc-maçonnerie contre-révolutionnaire
L’un des points de rencontre entre l’extrême droite
et la franc-maçonnerie se situe autour de René Guénon et du recours à la
« Tradition ». Ce dernier, à l’opposé d’un Evola qui considérait la
franc-maçonnerie comme « antitraditionnelle », voyait dans la
franc-maçonnerie l’un des derniers vecteurs de la « Tradition »
occidentale. Selon lui, la franc-maçonnerie pourrait se prévaloir d’une
origine « traditionnelle » authentique et d’une transmission initiatique
réelle, même si celle-ci a dégénéré par la suite, sous l’influence des
pasteurs protestants à l’origine de la maçonnerie moderne, James
Anderson et Jean-Théophile Désaguliers. Ainsi Guénon n’hésite pas à
écrire que « la véritable régularité réside essentiellement dans
l’orthodoxie maçonnique ; et cette orthodoxie consiste avant tout à
suivre fidèlement la tradition… »24
Dans plusieurs textes il a affirmé « la filiation existant entre la
franc-maçonnerie moderne, spéculative, et la maçonnerie ancienne,
médiévale et opérative. Mieux encore, il a fait de cette continuité
institutionnelle – ne fût-elle que subtilement décelable […] la
condition sine qua non de la légitimité traditionnelle et de la régularité initiatique de la maçonnerie.25 ».
Cette idée de « Tradition » immémoriale séduit une frange de l’extrême
droite allant des « traditionalistes-révolutionnaires » aux
nationalistes-révolutionnaires , en passant par des anciens de la
Nouvelle Droite26.
Il faut également garder à l’esprit qu’il existe
quelques loges maçonniques d’extrême droite, au discours réactionnaire
sur le plan des mœurs et faisant l’éloge de la hiérarchisation, les
loges servant à recruter et à former une nouvelle élite intellectuelle
et spirituelle. Ces loges, souvent irrégulières et/ou issues
d’obédiences marginales ultra-conservatrices, cherchent à maintenir la
« Tradition », abandonnée par les loges « révolutionnarisées », ainsi
qu’un élitisme spirituel et moral contre le délitement du monde
contemporain. En outre, de sa naissance officielle jusqu’à la fin du XIXe
siècle, la franc-maçonnerie fut théiste, et donc ouverte à des
développements mystiques, voire ésotériques/occultistes. Ces premières
loges furent aussi empreintes de positions élitistes, expression de
l’aristocratisme de l’époque : outre les athées, les femmes, les serfs
et les personnes de condition modeste étaient exclues des loges. Cet
aristocratisme persista27 et se mêla aux thèses guénoniennes.
De plus, il ne faut pas oublier que le fascisme eut
dans un premier temps un accueil favorable dans les milieux maçonniques
italiens, du fait de l’anticléricalisme affiché du mouvement fasciste.
La franc-maçonnerie italienne, héritière des idéaux du Risorgimento,
était plutôt nationaliste, ce qui favorisa encore le rapprochement. En
effet, le fascisme reçut un accueil favorable de la part de tout un
courant mêlant tradition gibeline, franc-maçonnerie, occultisme et
paganisme italique. Ce courant mystico-intellectuel, autour notamment de
l’Italien Arturo Reghini, se caractérisait par un nationalisme et un
antichristianisme virulents.
Il fut attiré par le fascisme croyant que Mussolini
restaurerait la grandeur de l’Italie. Certains d’entre eux firent même
partie des premiers fascistes, tel Eduardo Frosini. Arturo Reghini était
un ami et un correspondant de Guénon, mais aussi de Julius Evola.
Occultiste, il était membre à la fois de l’Ordo Templis Orientis28
(ou OTO) et de la principale obédience maçonnique italienne (il a même
créé son propre rite maçonnique, le Rite philosophique italien). En
1903, il fonda la Biblioteca Teosofica et fut à l’origine de la
section italienne de la Société Théosophique dans laquelle il aurait
développé son anticléricalisme. Violemment antichrétien, Reghini signait
parfois des articles sous le pseudonyme « le vicaire de Satan ». En
effet, « Inconsciemment et à sa manière, Reghini puisait à cette source
et en faisait le jeu, exaltant les anciennes “vertus italiques” et la
doctrine gibeline de l’Empire, et adressant d’âpres critiques au
christianisme, accusé d’être une “croyance asiatique” dont le fondateur
Jésus, n’était qu’“un mégalomane hypocondriaque et sentimental, dont la
vision du monde créé par Dieu menait à la compassion et aux pleurs” »29.
Selon Arturo Reghini, pour en finir définitivement
avec « […] “l’exotique croix chrétienne” il fallait “rétablir une
religion, au sens étymologique et païen du terme, entre l’humain et le
divin. Mais ce lien, ce rapport, doit être effectif, magique, religieux
et ne peut être établi par une religion qui n’est plus qu’une croyance
et un résidu sentimental” »30.
Reghini fut aussi le théoricien principal de la « religion italique »,
une variante italienne du néopaganisme, dans sa variante impériale
romaine. C’est en effet avec cet auteur « […] que la Voie romaine tend à
devenir plus explicite, même s’il appartient au courant
“orphico-pythagoricien”, marginal par rapport à la Tradition romaine
proprement dite. Ce fut précisément autour des revues de Reghini, Atanor (1924), puis Ignis (1925), et enfin, après les ordonnances de Bodrero et les lois sur les sociétés secrètes, Ur
(1927-1928) officiellement dirigée par Julius Evola, que se
rassembleront tous ceux qui cherchaient à donner au régime [fasciste] un
caractère néo-païen et romain »31.
De fait, comme beaucoup de partisans de la « voie
romaine », Arturo Reghini était un ardent nationaliste qui soutint
l’expédition de Gabriele D’Annunzio à Fiume en septembre 1919. Il
défendit l’État fasciste, qu’il jugeait anticatholique, jusqu’aux
accords de Latran. Il affirmait également l’aspect païen de la
franc-maçonnerie, en particulier ce qui concerne son aspect
méditerranéen, égyptien et pythagoricien32.
Cette franc-maçonnerie païenne existe encore, et elle
n’est pas confinée aux rites marginaux. Ces francs-maçons païens
recherchent en fait une supposée tradition maçonnique, abandonnée à la
suite des pressions de l’Église catholique. La christianisation forcée
de la franc-maçonnerie est un thème récurrent chez certains maçons
hétérodoxes, notamment chez ceux qui se réclament de la tradition
celtique ou de la tradition italique. Un thème qui plaît beaucoup aux
militants d’extrême droite initié à la franc-maçonnerie… Enfin, la
franc-maçonnerie attire aussi des catholiques intransigeants, en dépit
du rejet général pour celle-ci dans ce milieu. Ces maçons d’un genre
particulier se placent dans la filiation du penseur
contre-révolutionnaire et catholique intransigeant Joseph de Maistre33.
Il fut initié au rite écossais rectifié et fut membre de la loge La
Sincérité de Chambéry. Au sujet de la franc-maçonnerie, il a pu écrire
au baron Vignet des Étoles que « la franc-maçonnerie en général, qui
date de plusieurs siècles […] n’a certainement, dans son principe, rien
de commun avec la révolution françoise »34.
En 1810, il regrettait de n’avoir pas pu accepter une invitation d’une
loge russe. Il était aussi membre de sociétés initiatiques maçonniques
et paramaçonniques chrétienne, notamment de l’Ordre des Élus Coëns,
fondé par Martinès de Pasqually35.
En somme, Maistre défendait une franc-maçonnerie
religieuse contre une franc-maçonnerie rationaliste, moderniste. Cette
franc-maçonnerie spirituelle serait selon lui beaucoup plus ancienne et
respectable que la franc-maçonnerie moderne, qui, ne serait,
quant-à-elle, qu’une branche divergente corrompue. Une idée que nous
retrouvons chez René Guénon. D’ailleurs, il est fréquent de voir des
guénoniens proches de l’extrême droite devenir maçons et abandonner
ensuite leur guénonisme pour un illuminisme influencé par Maistre. C’est
le cas, par exemple, de Jean-Marc Vivenza, qui est un personnage
intéressant : il fut membre de Troisième Voie, un groupuscule
nationaliste-révolutionnaire dirigé par Jean-Gilles Malliarakis, puis
lors de la scission des radicaux, il rejoignit la Nouvelle Résistance de
Christian Bouchet – dont il s’éloigna rapidement. Il fut également un
compagnon de route de Synergie Européenne, une structure
nationaliste-révolutionnaire et völkisch fondée par l’ancien néo-droitier belge Robert Steuckers36. Chantre du futurisme dans les années quatre-vingt (il publia plusieurs brochures sur la question, dont Fondements bruitistes, paru en 1984 et réédité en 201537) et musicien brutitiste38, il abandonna ses thématiques initiales au profit d’une forme d’antimodernité traditionnelle39, inspirée du christianisme illuministe40.
Si la franc-maçonnerie est globalement rejetée par
l’extrême droite, dans son acception générique, il est cependant
impossible de la considérer dans son intégralité comme antimaçonnique.
En effet, il existe des liens entre franc-maçonnerie et droite radicale,
comme nous venons de le voir. Cet intérêt pour la franc-maçonnerie
rejoint le goût de certains de ces militants, cadres ou théoriciens pour
l’ésotérisme, en particulier dans la variante guénonienne. Il rejoint
également l’intérêt pour la magie et la maçonnerie de marge. En outre,
le rejet croissant de l’islam et des musulmans par certains
francs-maçons, au nom de la supposée incompatibilité de cette religion
avec la laïcité à la française, fait qu’un certain nombre de ces
derniers développent sans s’en apercevoir un discours raciste, et
trouvent des charmes au Front national, voire pour quelques uns adhèrent
à ce parti.
Notes
1 Une première version de ce texte est parue dans le premier numéro hors-série de Critica Masonica,
« L’Extrême droite et l’ésotérisme. Retour sur un couple toxique »
(2016), que nous avons écrit. Il s’agit du chapitre intitulé
« Franc-maçonnerie et extrême droite », pp. 69-77.
2 Voir à ce sujet, Politica Hermetica, « Maçonnerie et antimaçonnisme : de l’énigme à la dénonciation », n°4, 1990.
3 Sur Augustin de Barruel, cf. Gérard Gengembre, « Barruel, Augustin de », in Jean-Clément Martin (dir.), Dictionnaire de la contre-révolution, Paris, Perrin, 2011, pp. 83-85. Voir aussi, avec des réserves, Michel Riquet, Augustin de Barruel : un jésuite face aux jacobins francs-maçons, Paris, Beauchesne, 1989.
4 Une édition abrégée, Abrégé, en deux volumes parut à Londres en 1798-1799.
5 Gérard Gengembre, « Barruel, Augustin de », art. cit., p. 83.
7 Jérôme Rousse-Lacordaire, Rome et les francs-maçons. Histoire d’un conflit, Paris, Berg international, 1996.
8 Marie-France James, Ésotérisme et christianisme autour de René Guénon, vol. 1, Paris, Lanore, 2008, p. 157.
9 John Robison, Proofs
of a Conspiracy against all the Religions and Governments of Europe,
carried on in the Secret Meetings of Free-Masons, Illuminati and Reading
Societies, etc. collected from good authorities, Edinburgh, 1797. Traduction française, d’après la troisième édition de 1798 : Preuves
de conspirations contre toutes les religions et tous les gouvernements
de l’Europe, ourdies dans les assemblées secrètes des Illuminés, des
Francs-Maçons et des sociétés de lecture, recueillies auprès de bons
auteurs.
10 Ainsi, Jacques Ploncard participe, dès la fin des années 1920, à la Revue Internationale des Sociétés Secrètes
(fondée en 1912) du très antisémite et anti-maçon Monseigneur Ernest
Jouin (1844-1932). En 1979, Jacques Ploncard d’Assac publie un ouvrage
intitulé Le Secret des francs-maçons (Édition de Chiré, Chiré en
Montreuil). Cet ouvrage a été plusieurs réédité depuis sa publication et
est toujours considéré par les milieux de l’extrême droite catholique
comme un ouvrage de référence. Henry Coston publiera une vingtaine
d’ouvrages antimaçonniques durant toute sa carrière, sous son nom ou
sous différents pseudonymes.
11
Cette commission fut créée à l’instigation du lieutenant SS Moritz en
1942. Moritz était le chef de l’action antimaçonnique en zone occupée.
12 Michaël Lenoir, « Henry Coston (Henri Coston, dit) et Jacques Ploncard d’Assac (Jacques Ploncard, dit), in Pierre-André Taguieff (dir.), L’Antisémitisme de plume. 1940-1944. Études et documents, Paris, Berg International, 1999, pp. 370-384.
13 « Evola, l’antisémitisme et l’antimaçonnisme », Critica Masonica, n°6, 2015, pp. 103-122.
14 Emmanuel Malynski et Léon de Poncins, La Guerre occulte. Juifs et Francs-Maçons à la conquête du monde, Paris, Gabriel Beauchesne, 1936.
15 Emmanuel Malynski et Léon de Poncins, La Guerra occulta. Ebrei e massoni alla conquista del mondo, Hoepli, Milano, 1939.
16 Voir notamment, Julius Evola, « Sur la contre-initiation », Ur & Krur. Introduction à la Magie, t. III, Milan, Arché, 1986, pp. 209-224.
17 Hervé Hasquin, Les pays d’islam et la franc-maçonnerie, Bruxelles, L’Académie en Poche, Académie royale de Belgique, 2013.
18 Né en 1850 et mort en 1931, Maurice Talmeyr est un auteur antimaçon, ayant publié par exemple : La conspiration maçonnique contre les mœurs (Ligue antimaçonnique, s.d.) ; La Franc-maçonnerie et la Révolution française (Paris, Perrin, 1904).
19 Maurice Talmeyr, La Franc-maçonnerie et la Révolution française, Kontre Kulture, 2012.
20 Jean Sébastien, Les Illuminés de Bavière, Kontre Kulture, 2016.
21 Stéphane Blet, Franc-maçonnerie. L’effroyable vérité, Kontre Kulture, 2017.
22
Léo Taxil (pseudonyme de Gabriel Jogand-Pagès, 1854-1907) était un
publiciste exclu d’une loge. Pour se venger, il monte un canular qui
dura 12 ans, de 1885 à 1897, et qui chercha à la fois à discréditer la
franc-maçonnerie (qui serait une structure luciférienne pratiquant la
magie sexuelle) et à tourner en ridicule les catholiques anti-maçons. En
1897, il annonce publiquement son canular. Malgré tout, ses thèses
connaîtront une postérité dans les milieux anti-maçons de l’extrême
droite. Sur cette « affaire », Eugen Weber, Satan franc-maçon : la mystification de Léo Taxil, Paris, Julliard, 1964 ; Jean-Pierre Laurant, « Le Dossier Léo Taxil du fonds Jean Baylot de la Bibliothèque Nationale », Politica Hermetica, no4, 1990, pp. 55-63.
23 Voir par exemple Laurent Glauzy, Pédo-satanisme et franc-maçonnerie. L’autel des élites, Maison du Salat, 2015.
24 Cité in Jean-Pierre Laurant, « Avant-propos » in René Le Forestier, L’Occultisme et la franc-maçonnerie écossaise, Milan, Archè, 1987, p. VIII.
25 Roger Dachez, « René Guénon et les origines de la franc-maçonnerie. Les limites d’un regard », in Jean-Pierre Brach et Jérôme Rousse-Lacordaire (dir.), Études d’histoire de l’ésotérisme. Mélange offert à Jean-Pierre Laurant pour son soixante-dixième anniversaire, Paris, Éditions du Cerf, 2007, p. 187.
26
Lors de discussions, une fois la confiance établie, j’ai appris par
d’anciens néo-droitiers leur appartenance à des loges, de différentes
obédiences. De ce fait, je ne donnerai ni les noms, ni les loges, afin
de ne pas mettre ces personnes dans une position désagréable.
27
Cette tradition conservatrice est encore la norme dans certains pays,
comme la Grande-Bretagne, la Scandinavie ou l’Allemagne. Ce le cas
particulier de ce pays, voir l’excellente étude de Jacob Katz, Juifs et francs-maçons en Europe 1723-1939, Paris, Cerf, 1995.
28
Cet ordre magique fut fondé vers 1895 par un journaliste allemand,
Theodor Reuss et un riche industriel autrichien, Karl Kellner, tous deux
passionnés par l’ésotérisme et l’Orient. À la mort de Kellner en 1905,
Reuss le réorganisa sur des bases nouvelles, en particulier sur la magie
sexuelle. Le célèbre occultiste anglais Aleister Crowley implanta
l’ordre en Angleterre en 1912. À partir des années vingt, il est
impossible de distinguer l’OTO de la « religion de Thélème » de Crowley,
les deux fusionnant.
29 « G. M. », « Guénon, De Giorgio et la “réorientation” de Julius Evola », pp. 30-31, in G. De Giorgio, L’instant et l’éternité, Milan, Archè, 1988.
30 Ibid., p. 31.
31 Renato Del Ponte, « Les courants de la Tradition païenne romaine en Italie », Antaïos, nº 10, été 1996, p. 168.
32 Cf. Arturo Reghini, Tous les écrits de UR & KRUR, Milan, Archè, 1986.
33 Sur les idées de Joseph de Maistre, voir Jean-Yves Pranchère, L’Autorité contre les Lumières. La philosophie de Joseph de Maistre, Genève, Droz, 2004.
34 Joseph de Maistre, Écrits maçonniques de Joseph de Maistre et de quelques-uns de ses amis francs-maçons, Œuvres, t. II, Genève, Slatkine, 1983, p. 133.
35
Martinès de Pasqually fut le principal inventeur de la franc-maçonnerie
occultisante. Participant à l’activité de plusieurs loges jacobites, il
va décider de créer sa propre organisation, L’Ordre des Élus Coëns, un
système théosophique qui se greffe rapidement sur la franc-maçonnerie.
Cet Ordre connut un succès grandissant et très rapidement compta treize
loges en fonction. Son contenu théorique était marqué par la kabbale
hébraïque et par le mysticisme chrétien : son objectif était en effet de
réintégrer l’état adamique d’avant le péché originel. Pour atteindre
cet objectif, des pratiques à la fois hygiénique (jeûnes, exercices
respiratoires), moraux (stricte fidélité conjugale) et magique
(théurgie) étaient demandés. À la mort de Pasqually, ses thèses furent
diffusées par deux disciples : Louis-Claude de Saint-Martin et
Jean-Baptiste Willermoz. Ceux-ci apportèrent des modifications aux
pratiques martinésistes, comme la conversation avec « la voix
intérieure », l’introspection et la spiritualité (Saint-Martin).
Willermoz, quant à lui, fit fusionner le martinésisme avec des rites
maçonniques templiers allemands, la Stricte Observance Templière. Le
résultat de cette fusion devint l’Ordre des Chevaliers Bienfaisants de
la Cité Sainte, grade final du régime et du Rite Écossais Rectifié.
Willermoz fut aussi à l’origine du mythe de l’origine égyptienne de la
franc-maçonnerie.
36 Sur l’histoire des nationalistes-révolutionnaires français, voir Nicolas Lebourg, Le Monde vu de la plus extrême droite. Du fascisme au nationalisme-révolutionnaire, Perpignan, Presses Universitaires de Perpignan, 2010.
37 Vivenza, Le Bruit et son rapport historique, L’Oeuvre bruitiste, 1987 ; Fondements bruitistes, Paris, Rotorelief, (1984) 2015 (livre accompagné de deux cds).
38 Vivenza, Modes réels collectifs (1983) ; Réalité de l’automation (1983) ; Veriti Plastici (1983) ; Réalités servomécaniques (1985) ; Europe-Force-Unité-Métal (1987) ; Aérobruitisme dynamique (1994) ; Fondements bruitistes (2015).
39 Jean-Marc Vivenza, Essai d’ontologie négative, 2 vol., Grenoble, Hélios, 1993-1995 ; L’Être, La pensée fondatrice de l’Europe, Grenoble, Hélios, 1993 ; Racines grecques et modernité, Grenoble, Hélios, 1993 ; Nuit, Vérité, Silence, Grenoble, Hélios, 1997 ; L’Existence, la domination réelle de l’être, Grenoble, Hélios, 1998 ; Le Dévoilement de la réalité, la vérité de la présence, Grenoble, Hélios, 1999 ; François
Malaval, 1627-1719, et la contemplation de la « Divine Ténèbre ». Vie
et doctrine d’un pieux aveugle marseillais impliqué dans la controverse
sur le quiétisme, La Bégude-de-Mazenc, Arma Artis, 2004 ; Le
Martinisme. L’enseignement secret des maîtres. Martinès de Pasqually,
Louis-Claude de Saint-Martin et Jean-Baptiste Willermoz, fondateur du
Rite écossais rectifié, Grenoble, Le Mercure Dauphinois, 2006 ; La prière du coeur selon Louis-Claude de Saint-Martin dit le philosophe inconnu, La Bégude-de-Mazenc, Arma Artis, 2007 ; La « Sophia » et ses divins mystères, La Bégude-de-Mazenc, Arma Artis, 2009 ; Louis-Claude de Saint-Martin et les anges. De la théurgie des élus coëns à la doctrine angélique saint-martiniste, La Bégude-de-Mazenc, Arma Artis, 2012 ; Joseph de Maistre. Prophète du christianisme transcendant. Textes choisis et présentés par Jean-Marc Vivenza, Éditions Signatura, 2015.
40 L’Église
et le sacerdoce selon Louis-Claude de Saint-Martin. L’accès au
sanctuaire intérieur et la pratique du culte divin dans la pensée
saint-martiniste, La Pierre philosophale éditions, 2013 ; Le culte en esprit de l’Église intérieure, La Pierre philosophale éditions, 2014 ; Pratique de la prière intérieure pour conduire l’âme à l’union avec la divinité…, La Pierre philosophale éditions, 2015 ; Le Mystère de l’Église intérieure, la Pierre philosophale éditions, 2016.