Né le 16 avril 1932 à Paris d’un père italien et d’une mère française originaire de la Mayenne – il a retracé ses origines dans son ouvrage Voyage en Ritalie (Plon, 1993) –, le cursus honorum de Pierre Milza est celui d’un enfant issu d’un milieu modeste qui doit à l’école publique, à laquelle il était profondément attaché, d’être devenu l’un des historiens français les plus connus et les plus estimés. Après avoir exercé pendant près de dix ans le métier d’instituteur puis de professeur de collège, Pierre Milza est reçu premier à l’Agrégation d’histoire en 1964. Il commence alors une carrière universitaire comme attaché de recherche au CNRS puis à l’Institut d’Études Politiques (IEP) de Paris. Docteur ès lettres en histoire en 1977, il devient l’année suivante Professeur à l’IEP de Paris où il fera toute sa carrière, dirigeant le Centre d’histoire de l’Europe du XXe siècle, aujourd’hui Centre d’histoire, à la direction duquel lui ont succédé Jean-François Sirinelli puis Marc Lazar.
Chevalier des arts et des lettres, commandeur de l’Ordre national du Mérite français et de celui de la République italienne, Pierre Milza avait été fait récemment Commandeur de la Légion d’honneur, distinction qu’il avait reçue des mains d’Aurélie Filippetti, alors ministre de la Culture. Sans orgueil mais sans fausse modestie, il était fier que la République française et celle italienne lui aient accordé ces hautes reconnaissances.
Le premier livre qu’il publie, l’Italie fasciste devant l’opinion française 1920-1940, aux éditions Armand Colin en 1967, l’impose d’emblée comme un spécialiste de l’histoire italienne du XXe siècle et de l’histoire française de l’entre-deux-guerres. Viendront ensuite ses premiers succès éditoriaux avec les manuels et essais universitaires qu’il co-écrit avec son collègue et ami Serge Berstein : L’Italie, la Papauté 1870-1970 (Masson, 1970), Le fascisme italien 1919-1945, publié dix ans plus tard au Seuil. L’année suivante voit la publication de sa thèse d’État, Français et Italiens à la fin du XIXe siècle dans la prestigieuse collection de l’École française de Rome.
Spécialiste incontesté du fascisme italien, de l’immigration en particulier italienne et des relations internationales, Pierre Milza publie en 1987 aux éditions Flammarion une histoire du fascisme français, sous le titre Fascisme français. Passé et Présent qui va nourrir le débat politique et idéologique après la renaissance du Front National. Tout en continuant à travailler sur ces champs de prédilection, en publiant par exemple un très bel ouvrage sur l’Europe en chemise noire, fruit des cours qu’il va donner à l’université de Genève à la fin de sa carrière universitaire, Pierre Milza va connaître les faveurs du grand public, dans le sens noble du terme, à partir de la fin des années 1990. En 1999 les éditions Fayard publient sa magistrale et monumentale biographie de Mussolini à laquelle suivront des biographies qui sont de véritables succès éditoriaux : Verdi et son temps (Perrin, 2000), Napoléon III qui reçoit le prix des ambassadeurs en 2004, Voltaire en 2007 toujours chez Perrin, puis, chez Fayard, Garibaldi suivi de Pie XII respectivement en 2012 et en 2014.
Son Histoire de l’Italie des origines à nos jours (Fayard, 2012) s’impose comme un ouvrage de référence et un bestseller de part et d’autre des Alpes. L’un de ses derniers essais était une analyse minutieuse et documentée des rapports entre Hitler et Mussolini publiée sous le titre Conversations Hitler-Mussolini (Fayard, 2013).
Chef de file d’une génération entière d’étudiants qui ont travaillé sur l’Italie, qu’ils aient suivi avec passion ses cours ou qu’ils aient, comme l’auteur de ces lignes d’hommage, eu la chance qu’il soit leur directeur de thèse, Pierre Milza laisse un souvenir de rigueur, de clarté et d’honnêteté intellectuelle.