La France est le deuxième
producteur mondial de vin ; juste derrière l’Italie, qui vient de nous
doubler. S’agissant de sa consommation, nous ne sommes battus que par
les Portugais.
Des « premix » ou « alcopops » ont été conçus pour un piégeage précoce de nos jeunes. Ces ados accréditent désormais l’idée qu’il ne pourrait y avoir de vraies fêtes sans alcool, qu’ils associent souvent à d’autres drogues (cannabis, ecstasy…). Leurs premières ivresses sont de plus en plus précoces, tandis qu’un certain nombre d’entre eux s’adonnent aux « bitures express »/« alcoolisations aiguës », qui suscitent des comas alcooliques pouvant mettre en jeu leur survie. Le syndrome de Mendelson (létal dans plus de 50 % des cas) correspond au reflux, dans les poumons, du liquide gastrique qui les détruit par digestion. En outre, la répétition de ces alcoolisations est neurotoxique pour leurs cerveaux en phase de maturation.
Notre pays compte quatre à cinq millions de sujets « alcoolo-dépendants » (incapables de se priver un jour par semaine de toute boisson alcoolique) ; 6 % d’entre eux boivent la moitié de tout l’alcool consommé en France. Ces intempérants majeurs sont les « alcooliques » ; expression qui doit être exempte de connotation péjorative. Ces malades justifient de la compassion qu’on doit porter à toute victime d’une maladie grave ; car c’en est une, souvent même très grave. Ils sont les victimes de tout ce qui n’a pas été fait pour les empêcher de sombrer dans le tonneau duquel on est souvent incapable de les repêcher. Chaque jour, en France, meurent 150 victimes de l’intoxication alcoolique (49.000 morts par an). C’est douze fois plus que les victimes de la route dont on se préoccupe tant, alors qu’un tiers des accidents routiers portent la marque de l’alcool, de plus en plus souvent associé au cannabis ou à divers médicaments psychotropes. L’alcool, dans ces abus majeurs, est une drogue très « dure ». Celui dont la consommation serait stoppée brutalement verrait sa survie compromise (relisez Zola, L’Assommoir, la mort de Coupeau). Ces sevrages doivent être réalisés en milieu hospitalier ; ils recourent à des doses énormes de médicaments contre les crises d’épilepsie.
Ce n’est pas parce que la consommation d’alcool a diminué de moitié dans notre pays, au cours des quarante dernières années – passant annuellement de vingt litres d’alcool pur à dix désormais -, que l’on doit éprouver du soulagement ; différentes autres drogues sont venues s’y ajouter (cannabis, en particulier).
L’alcool est toxique dès les faibles doses ; exit, donc, la recommandation « à consommer avec modération ». Elle devrait être exprimée : « L’alcool est dangereux pour la santé. »
Des femmes enceintes consomment des boissons alcooliques, exposant leur progéniture au syndrome d’alcoolisation fœtale (qui affecte une naissance sur mille ; ce SAF n’ayant rien de safe), alors que sur les bouteilles, un pictogramme, souvent illisible, est censé matérialiser leur interdiction.
L’alcool est souvent associé aux violences faites aux femmes (confusion entre œnologie et « haine au logis »). La publicité a fait du vin rosé « le vin des femmes », au point qu’il est désormais plus vendu que le vin blanc. Des dames, en nombre croissant, ne dédaignent plus les bières aux degrés alcooliques (supérieurs à 5°) et aux volumes (plus de 250 millilitres) eux aussi croissants.
L’oxymore parfait consiste à lever son verre en disant « Bonne santé ! »
Aussi, ce n’est pas « emmerder les Français » (formule du Président Pompidou, reprise par le Président Macron se portant au secours du vin avant d’aller au Salon de l’agriculture) que leur rappeler ces faits qui ne doivent plus être occultés ; n’en déplaise au puissant lobby alcoolier.
NDLR : le professeur Costentin est l’auteur de l’ouvrage Le Désastre des toxicomanies en France
Pr. Jean Costentin
Président du Centre National de Prévention d’Etudes et de Recherches sur les Toxicomanies (CNPERT).
Des « premix » ou « alcopops » ont été conçus pour un piégeage précoce de nos jeunes. Ces ados accréditent désormais l’idée qu’il ne pourrait y avoir de vraies fêtes sans alcool, qu’ils associent souvent à d’autres drogues (cannabis, ecstasy…). Leurs premières ivresses sont de plus en plus précoces, tandis qu’un certain nombre d’entre eux s’adonnent aux « bitures express »/« alcoolisations aiguës », qui suscitent des comas alcooliques pouvant mettre en jeu leur survie. Le syndrome de Mendelson (létal dans plus de 50 % des cas) correspond au reflux, dans les poumons, du liquide gastrique qui les détruit par digestion. En outre, la répétition de ces alcoolisations est neurotoxique pour leurs cerveaux en phase de maturation.
Notre pays compte quatre à cinq millions de sujets « alcoolo-dépendants » (incapables de se priver un jour par semaine de toute boisson alcoolique) ; 6 % d’entre eux boivent la moitié de tout l’alcool consommé en France. Ces intempérants majeurs sont les « alcooliques » ; expression qui doit être exempte de connotation péjorative. Ces malades justifient de la compassion qu’on doit porter à toute victime d’une maladie grave ; car c’en est une, souvent même très grave. Ils sont les victimes de tout ce qui n’a pas été fait pour les empêcher de sombrer dans le tonneau duquel on est souvent incapable de les repêcher. Chaque jour, en France, meurent 150 victimes de l’intoxication alcoolique (49.000 morts par an). C’est douze fois plus que les victimes de la route dont on se préoccupe tant, alors qu’un tiers des accidents routiers portent la marque de l’alcool, de plus en plus souvent associé au cannabis ou à divers médicaments psychotropes. L’alcool, dans ces abus majeurs, est une drogue très « dure ». Celui dont la consommation serait stoppée brutalement verrait sa survie compromise (relisez Zola, L’Assommoir, la mort de Coupeau). Ces sevrages doivent être réalisés en milieu hospitalier ; ils recourent à des doses énormes de médicaments contre les crises d’épilepsie.
Ce n’est pas parce que la consommation d’alcool a diminué de moitié dans notre pays, au cours des quarante dernières années – passant annuellement de vingt litres d’alcool pur à dix désormais -, que l’on doit éprouver du soulagement ; différentes autres drogues sont venues s’y ajouter (cannabis, en particulier).
L’alcool est toxique dès les faibles doses ; exit, donc, la recommandation « à consommer avec modération ». Elle devrait être exprimée : « L’alcool est dangereux pour la santé. »
Des femmes enceintes consomment des boissons alcooliques, exposant leur progéniture au syndrome d’alcoolisation fœtale (qui affecte une naissance sur mille ; ce SAF n’ayant rien de safe), alors que sur les bouteilles, un pictogramme, souvent illisible, est censé matérialiser leur interdiction.
L’alcool est souvent associé aux violences faites aux femmes (confusion entre œnologie et « haine au logis »). La publicité a fait du vin rosé « le vin des femmes », au point qu’il est désormais plus vendu que le vin blanc. Des dames, en nombre croissant, ne dédaignent plus les bières aux degrés alcooliques (supérieurs à 5°) et aux volumes (plus de 250 millilitres) eux aussi croissants.
L’oxymore parfait consiste à lever son verre en disant « Bonne santé ! »
Aussi, ce n’est pas « emmerder les Français » (formule du Président Pompidou, reprise par le Président Macron se portant au secours du vin avant d’aller au Salon de l’agriculture) que leur rappeler ces faits qui ne doivent plus être occultés ; n’en déplaise au puissant lobby alcoolier.
NDLR : le professeur Costentin est l’auteur de l’ouvrage Le Désastre des toxicomanies en France
Pr. Jean Costentin
Président du Centre National de Prévention d’Etudes et de Recherches sur les Toxicomanies (CNPERT).