La grimace de Najat Vallaud-Belkacem, à l’annonce de la nomination de
Jean-Michel Blanquer, en dit long sur son dépit. Si elle fait ainsi la
tête, c’est que son successeur ne s’inscrit pas dans la ligne qu’elle a
suivie. Beaucoup jugent, au contraire, que c’est sans doute le meilleur
des ministres possibles, c’est-à-dire le moins imparfait.
Un détail est passé inaperçu : le BO, Bulletin officiel hebdomadaire de l’Éducation nationale, a été suspendu pendant trois semaines, marquant une rupture – ce qui ne s’est pas produit en 2012 : preuve, s’il en fallait, que la politique de Vincent Peillon ne détonnerait pas avec celle de Luc Chatel.
Notre ministre se souvient-il de la maxime latine In medio stat virtus, idéal du juste milieu, qui condamne les excès ? En tout cas, il a immédiatement lancé deux mesures susceptibles, non pas de réparer (le mal est trop grand pour pouvoir être soigné rapidement, fût-ce par un remède de cheval) mais de pallier les défauts les plus flagrants des réformes mises en place par son prédécesseur.
Pour les rythmes scolaires, un projet de décret prévoit des assouplissements, notamment « des adaptations à l’organisation de la semaine scolaire ayant pour effet de répartir les heures d’enseignement hebdomadaires sur huit demi-journées réparties sur quatre jours ».
Autrement dit, les territoires satisfaits pourront continuer d’appliquer le système actuel, les autres changer de dispositif. Il était difficile d’aller plus loin, à trois mois de la prochaine rentrée.
L’autre nouveauté, qui réjouira la majorité des professeurs et des familles, c’est la modification de l’organisation des enseignements au collège. Un projet d’arrêté réécrit le texte de référence de la réforme contestée, sur deux points essentiels.
Les fameux EPI, véritables casse-tête pédagogiques à l’efficacité douteuse, deviendront facultatifs. D’autre part, une marge d’autonomie de trois heures sera allouée aux établissements pour « favoriser le travail en groupes à effectifs réduits, les interventions conjointes de plusieurs enseignants, et les enseignements facultatifs ». Ce qui permettra, notamment, le retour officiel du latin et du grec, voire le rétablissement des parcours bilangues et des classes européennes.
On peut regretter, bien sûr, que les décisions soient fixées « par le conseil d’administration sur proposition du conseil pédagogique », ce qui conduira nécessairement au développement des rapports de force entre disciplines et à des disparités entre les établissements.
Ce texte constitue, en effet, un pas de plus vers l’autonomie, à laquelle le ministre semble attaché. Terme aux multiples sens, selon qui l’emploie : pouvoirs accrus du chef d’établissement sur ses personnels, voire leur recrutement ; élaboration d’un projet adapté au public scolaire ; à terme, concurrence entre les établissements et suppression de la carte scolaire.
Les adversaires de l’autonomie rétorquent, non sans raison, que cette autonomie libérerait le pouvoir de petits chefs qui caporaliseraient l’école, accentuerait les inégalités entre élèves et établissements ou bénéficierait d’abord aux CSP+ (catégories socio-professionnelles supérieures), comme on dit dans le jargon ministériel.
Dans ce domaine, encore, dont il faut débattre sans préjugés et par un examen approfondi, la maxime latine In medio stat virtus permettrait sans doute d’écarter les excès et d’apaiser les craintes.
Philippe Kerlouan
Source
Un détail est passé inaperçu : le BO, Bulletin officiel hebdomadaire de l’Éducation nationale, a été suspendu pendant trois semaines, marquant une rupture – ce qui ne s’est pas produit en 2012 : preuve, s’il en fallait, que la politique de Vincent Peillon ne détonnerait pas avec celle de Luc Chatel.
Notre ministre se souvient-il de la maxime latine In medio stat virtus, idéal du juste milieu, qui condamne les excès ? En tout cas, il a immédiatement lancé deux mesures susceptibles, non pas de réparer (le mal est trop grand pour pouvoir être soigné rapidement, fût-ce par un remède de cheval) mais de pallier les défauts les plus flagrants des réformes mises en place par son prédécesseur.
Pour les rythmes scolaires, un projet de décret prévoit des assouplissements, notamment « des adaptations à l’organisation de la semaine scolaire ayant pour effet de répartir les heures d’enseignement hebdomadaires sur huit demi-journées réparties sur quatre jours ».
Autrement dit, les territoires satisfaits pourront continuer d’appliquer le système actuel, les autres changer de dispositif. Il était difficile d’aller plus loin, à trois mois de la prochaine rentrée.
L’autre nouveauté, qui réjouira la majorité des professeurs et des familles, c’est la modification de l’organisation des enseignements au collège. Un projet d’arrêté réécrit le texte de référence de la réforme contestée, sur deux points essentiels.
Les fameux EPI, véritables casse-tête pédagogiques à l’efficacité douteuse, deviendront facultatifs. D’autre part, une marge d’autonomie de trois heures sera allouée aux établissements pour « favoriser le travail en groupes à effectifs réduits, les interventions conjointes de plusieurs enseignants, et les enseignements facultatifs ». Ce qui permettra, notamment, le retour officiel du latin et du grec, voire le rétablissement des parcours bilangues et des classes européennes.
On peut regretter, bien sûr, que les décisions soient fixées « par le conseil d’administration sur proposition du conseil pédagogique », ce qui conduira nécessairement au développement des rapports de force entre disciplines et à des disparités entre les établissements.
Ce texte constitue, en effet, un pas de plus vers l’autonomie, à laquelle le ministre semble attaché. Terme aux multiples sens, selon qui l’emploie : pouvoirs accrus du chef d’établissement sur ses personnels, voire leur recrutement ; élaboration d’un projet adapté au public scolaire ; à terme, concurrence entre les établissements et suppression de la carte scolaire.
Les adversaires de l’autonomie rétorquent, non sans raison, que cette autonomie libérerait le pouvoir de petits chefs qui caporaliseraient l’école, accentuerait les inégalités entre élèves et établissements ou bénéficierait d’abord aux CSP+ (catégories socio-professionnelles supérieures), comme on dit dans le jargon ministériel.
Dans ce domaine, encore, dont il faut débattre sans préjugés et par un examen approfondi, la maxime latine In medio stat virtus permettrait sans doute d’écarter les excès et d’apaiser les craintes.
Philippe Kerlouan
Source