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jeudi 21 décembre 2017

L'hôpital à bout de souffle

La responsabilité de la situation dramatique des hôpitaux incombe à un Etat qui a multiplié les injonctions contradictoires. Le point de rupture est proche.

Ce n'est plus de la microchirurgie mais de la chirurgie lourde qu'il va falloir pratiquer pour sauver l'hôpital public. Dévoilée lundi par la Fédération hospitalière de France, la perspective d'un déficit des hôpitaux de 1,5 milliard d'euros fin 2017 est tout sauf anodine. Elle doit obliger le gouvernement à revoir en profondeur un modèle sanitaire à bout de souffle. Car cette ardoise sans précédent est le symptôme d'un mal structurel. Elle n'a rien de conjoncturel. D'une certaine manière, il eût été rassurant d'apprendre que ce déficit considérable était la conséquence d'une mauvaise gestion des établissements hospitaliers. Mais il n'en est rien. Les directeurs d'hôpital ont rigoureusement tenu leurs effectifs. Et ils ont continué de profiter des effets pervers de la tarification à l'activité pour pratiquer des actes lucratifs à défaut d'être toujours pertinents pour les malades. En règle générale, ceux qui gèrent nos hôpitaux ont fait tout ce qui était en leur pouvoir pour tenir leur budget. Ils ont mutualisé les achats, de matériel et de médicaments. Ils ont externalisé les services, de restauration et de blanchisserie. Ils ont beaucoup demandé à des agents dévoués mais exténués. Si l'hôpital plonge dans le rouge à ce point, ce n'est pas la faute de l'hôpital. C'est celle de l'Etat. Qui, particulièrement depuis 2012, a voulu lui imposer l'impossible : geler les effectifs mais recruter en masse des contrats aidés pour améliorer les chiffres du chômage ; tenir sa dépense de personnel mais encaisser le coût exorbitant de la revalorisation des carrières et des salaires de la fonction publique ; mutualiser les achats pour payer moins cher mais acheter français ; être à la pointe de la médecine et accueillir tout le monde en toute circonstance 24 heures sur 24 ; investir dans les technologies d'avenir mais voir chaque année ses tarifs baisser. Remplir toujours plus de missions avec toujours moins de moyens, l'équation n'est pas propre aux hôpitaux. Mais, pour la résoudre, ceux-ci ont été privés de toute souplesse, empêchés de renégocier les 35 heures. Quant à leur réorganisation, elle est restée un voeu pieux. Lancés en 2016, les « groupements hospitaliers de territoire » ne remplacent pas un vrai plan de suppression des petits établissements inutiles, maintenus au seul titre de l'aménagement du territoire. L'Etat a si bien mis la pression sur l'hôpital qu'il est en burn-out. Jusqu'ici, les hôpitaux parvenaient à s'en sortir car le volume de leur activité augmentait. Ce n'est plus le cas. Le drap sur le blessé se retire et laisse apparaître une plaie béante, celle d'une désorganisation du système de santé dont l'hôpital public est devenu l'ultime garde-fou. C'est une immense réforme, imprévue, qui s'invite à l'agenda d'Emmanuel Macron. Il y a urgence car un hôpital en déficit est un hôpital qui n'investit plus.

Jean-Francis Pécresse

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