.

.

lundi 20 octobre 2008




Les gouvernements étrangers font naturellement appel à l'étranger

Philippe Delbauvre



Les gouvernements étrangers  font naturellement appel à l'étranger
Alors qu'à ses débuts, l'immigration en France ou plus généralement en Europe, avait pour but de recruter une main d'œuvre peu qualifiée qui ne se réduisait qu'à des bras symbolisant une force presque exclusivement musculaire, l'adoption récente du pacte pour l'immigration vient d'entériner une évolution nouvelle.

En effet, sachant les effets de la mécanisation comme de l'automatisation, il n'y a aujourd'hui plus besoin contrairement à hier, de personnels non qualifiés, tant étrangers que Français. On remarquera au passage que, même si nos élites n'en ont cure, ce type de travailleur du passé a depuis fait souche et que sa descendance se trouve pour la majorité d'entre elle sans emploi : pour le plus grand malheur de nos compatriotes. En revanche, il existe une carence en cadres, notamment scientifiques, sur l'ensemble du territoire européen, ce qui vient de conduire les 27 à développer une immigration choisie dont l'objet est le recrutement de cerveaux, principalement issus d'Afrique.

Le pacte européen utilise deux termes pour caractériser l'immigration à venir : sélective et circulaire. Par le premier, on veut signifier que seule une partie de l'immigration pourra être désormais acceptée (comme si on avait pu empêcher l'autre d'exister et de se développer de par le passé), tandis que le second sous entend qu'il ne s'agit que d'une migration à durée déterminée (comme si les nouveaux migrants naturalisés auront l'envie de retourner au pays après quelques années passées ici).

Ces impératifs sont la conséquence de la volonté de rivaliser économiquement avec la puissance américaine en employant, comme on peut le constater, les mêmes méthodes : on a simplement éviter de traduire green card par carte verte, le bleu ayant été jugé plus seyant. Il est bon de savoir que la chasse aux cerveaux n'est pas en Europe, une réussite : en effet, seulement 5% de ce marché mondial vient à nous pour l'instant. D'où l'idée de le développer sachant qu'il est évident que d'un point de vue comptable, tant d'un côté que de l'autre de l'Atlantique, il est beaucoup plus rentable d'importer un ingénieur étranger qui est un produit fini, plutôt que d'en former un en France.

Une fois de plus, les gouvernements européens sont en phase lorsqu'il s'agit de faire fructifier la machine économique qui bien entendu n'a pas de frontières. En revanche, aucun d'entre eux n'a eu le mérite de penser les besoins de chacun des pays tant pour aujourd'hui que pour demain. C'est ainsi qu'aucune politique d'éducation digne de ce nom n'a été élaborée. Rien n'a par exemple été conçu afin d'inciter les jeunes Français à choisir l'orientation scientifique, alors que l'on sait très bien que c'est pourtant une bonne assurance contre le chômage.

Ce ne sont là que des gouvernements étrangers qui, tout naturellement, font appel à l'étranger.

mardi 14 octobre 2008

Le purisme est l'affaire des esthètes, pas des politiques

Philippe Delbauvre



Le purisme est l'affaire des esthètes, pas des politiques
Je ne pensais pas, après avoir écrit un article (1), que les faits allaient si tôt me donner raison. Je ne pouvais pas non plus imaginer que Jorg Haider allait disparaître dans les circonstances que l'on sait, depuis.

Que l'extrême droite autrichienne puisse atteindre 30% des suffrages, voilà qui ne peut que susciter l'admiration et l'envie de ses homologues européennes. Pourtant, la leçon est facile à retenir et elle peut être appliquée partout en Europe. Elle passe par le refus du dogmatisme et par la nécessaire flexibilité des prises de position politique de la mouvance.

Que Voxnr se soit fait une spécialité de l'anticapitalisme, ce n'est pas un fait nouveau. On nous le reproche assez. A tort. La récente et actuelle crise financière nous conforte dans nos prises de position. L'analyse marxienne, dont j'ai déjà fait l'apologie (2), consiste à postuler que, majoritairement, tout n'est qu'affaire de gros sous pour l'électorat. C'est tant vrai que sans une crise grave, qu'elle soit économique ou autre, les nationalistes peuvent historiquement aller se rhabiller. C'est peut être triste mais c'est vrai. Que reste t-il des contestataires en Allemagne entre 1924 et 1930 ? Presque plus rien. Le lecteur peut aller consulter l'histoire, c'est partout pareil. Désolé d'avoir désespéré Billancourt. Je ne suis pas Sartre.

Qu'il y ait des adeptes de la pensée folklorique en Autriche, c'est probable. Totalement déconnectés de la réalité, vivants entre eux, imperméables à toute forme de raisonnement logique, ils sont un fardeau pour la mouvance. C'est justement la raison pour laquelle FPÖ et BZÖ les ont cachés, tels les mongoliens dont on a honte, dans l'arrière cuisine, lors des dernières élections.

Qu'importe à Haider son attachement à l'entrée de la Turquie dans l'Europe. Le bon sens lui fait changer de cap.

Qu'importe à Strache sa célébration de l'Urvolk autrichien, la raison le mène à la défense du pouvoir d'achat.

Et ça marche !

Bien évidemment, ni l'un, ni l'autre n'ont intérieurement changé. Il ne s'agit que d'une adaptation à un système qui a ses règles et qu'on ne peut changer. Vous viendrait-il à l'idée d'utiliser les mains sur un terrain de football au motif que vous êtes un inconditionnel du ballon ovale ?

On peut d'ailleurs noter que nos adversaires ne se privent pas de ce genre de cabriole : ainsi, à titre d'exemple, les autres faisant de même, Delanoé, autoproclamé libéral et socialiste (sic), vient de déclarer vouloir « démolir le libéralisme économique ». Et sans aucune gêne.

Le purisme est l'affaire des esthètes. Pas des politiques.

"Nous n'avons pas davantage d'électeurs d'extrême droite qu'en 2006, quand ils avaient fait 15% ensemble", analysait le politologue Peter Filzmaier à la veille du scrutin. Le succès des formations d'extrême droite tient, selon lui, à "un sentiment négatif de frustration, de méfiance à l'égard de la grande coalition" gauche-droite, au pouvoir entre janvier 2007 et juillet 2008.

"Ils ont su reléguer leur rhétorique xénophobe au second plan au profit des thèmes sociaux, qui sont apparus comme la première des préoccupations des électeurs", analyse le politologue Emmerich Talos, de l'Université de Vienne.

"FPÖ et BZÖ ont aussi su capter le mécontentement vis-à-vis des partis au pouvoir, sans que tous les suffrages en leur faveur ne soient forcément motivés idéologiquement", souligne le politologue Peter Ulram.

notes


(1) Tirer toutes les conséquences de la conjoncture

(2) Marxisme et mouvance nationale

Photo : Jorg Haider

jeudi 9 octobre 2008

Vive la crise

Philippe Delbauvre



Vive la crise
Comme on pouvait s'y attendre, la crise financière qui vient de toucher les Etats Unis m'a réjoui.

Ne serait-ce qu'en raison de la réaction des communistes qui voient bien évidemment dans cet épisode, pourtant très ponctuel, les signes évidents des contradictions intérieures au capitalisme qui lui seront fatales. C'est bien sur une erreur stupide et le gouvernement américain vient de montrer que le libéralisme pouvait faire preuve de souplesse et d'adaptation en cas de nécessité vitale.

Néanmoins, en étant obligé de nationaliser quatre groupes face à une crise financière importante, les libéraux viennent de montrer leur limite. Le soutien massif des foules européennes à ce système économique commence à s'étioler et la peur parallèlement grandit. En nationalisant, les libéraux viennent de payer les frasques des actionnaires avec l'argent des simples contribuables. Outre la nationalisation qui remet en selle l'idée de l'état régulateur, les libéraux commettent aussi une seconde erreur en volant au secours des actionnaires qui sont ravis de l'aubaine et qui n'en espéraient peut être pas tant. La leçon a toute chance d'être retenue et les aggioteurs auraient tort de se priver de ne pas recommencer.

Reste évidemment le peuple qui, à la base, paie les pots cassés comme à l'accoutumé. Si certains cherchent outre atlantique à lui venir en aide, d'autres considèrent que suffisamment a été fait et que pour la majorité, c'est la loi du marché qui doit s'appliquer. Une chose est certaine, c'est que la sacro sainte croissante est aux Etats Unis en berne. C'est une mauvaise nouvelles pour eux ainsi que pour les économies européennes qui n'avaient pas besoin de ça. Moins de croissance en Europe, c'est moins de ressources pour les états qui ne pourront comme il le faudrait effectuer leur rôle de redistributeurs.

Or les Français ont besoin d'aide comme le montre le faible pourcentage de vacanciers cette année. Des Français qui ne peuvent même plus se permettre de faire grève, serrés qu'ils sont, par des crédits à des taux quelquefois vertigineux. C'est justement parce que le budget est calculé au plus juste que les Français sont aussi sensibles à la baisse du pouvoir d'achat. Cela ne se traduit pas pour eux par moins d'épargne mais par la disparition de certaines dépenses. On songe à nouveau aux vacances.

La manifestation au profit de la défense de la poste a ravi les syndicats au motif qu'un postier sur quatre fut gréviste. Objectivement, si la libéralisation est aussi catastrophique qu'ils le disent, il faut bien reconnaître que c'est peu. Malhonnêteté intellectuelle ou inconscience ? Mystère.

En fait je suis persuadé que les Français n'acceptent de se mobiliser que lorsqu'ils ont le couteau sous la gorge. C'est à dire au moment où il est trop tard. Attendre d'être victime d'une délocalisation pour se manifester, c'est l'assurance de perdre son emploi. Accepter dès maintenant la libéralisation d'un secteur, c'est approuver par la suite des licenciements ainsi que l'augmentation des coûts des services.

Peut être que les nationalistes feraient bien autour d'eux de sensibiliser ceux qu'ils rencontrent aux problèmes économiques qui les touchent. Peut être aussi que des campagnes d'information sont nécessaires. Je doute quand même quant à l'efficacité pédagogique exclusive de la démarche parce que je pense les Français inaptes aujourd'hui à la rébellion comme le montre l'actualité où les masses sont passives. Néanmoins, si on commençait à entendre les nationalistes parler d'économie, cela leur donnerait une toute autre crédibilité. Il n'en reste pas moins qu'un jour ou l'autre le seuil de tolérance sera franchi parce que les Français ne pourront plus faire autrement que de se révolter suite à leur propre faillite.

C'est aussi à cela que les nationalistes doivent se préparer au cas où. Il serait en effet catastrophique de laisser l'extrême gauche récupérer un mouvement de contestation majeure au motif que nous aurions laissé de côté la principale source de mécontentement des Français.