Mardi, 7 Juin 2005 |
Pourvu que je perde
Philippe Delbauvre | Politique |
Il semblerait qu'en France, la mode soit à l'article 16 ces derniers temps. Et comme les solidaristes ne sont pas au pouvoir, on va être obligé de faire une double analyse droite/gauche pour constater une similitude de comportement dont le pays une fois de plus va faire les frais. Un article que l'on n'a guère envie d'écrire tant il annonce une véritable rupture dans l'histoire nationale. Commençons par la droite qui détient en France l'exécutif, l'assemblée nationale et le sénat.
Personne n'a pu échapper au battage médiatique entourant le référendum. Maastricht en son temps avait déclenché une campagne officielle des plus méprisantes à l'égard de la moitié des français souhaitant voter non, choix digne d'écervelés, d'incultes de bons à rien. Et Maastricht n'est rien en comparaison de ce que l'on vient de subir.
Je ne sais plus si c'est trois ou quatre fois que le président de la république s'est adressé aux français. C'est en tout cas beaucoup trop. Un président qui s'invite si fréquemment ne peut que perdre en crédibilité. Son comportement pose un autre problème, à savoir si c'est lui le représentant de la nation ou si c'est la nation qui le représente. En indiquant, en forçant le choix des français il ne fait nul doute que c'est la seconde hypothèse qui doit être validée. Ainsi, la politique nationale n'est plus la concrétisation des voeux de la nation, transmis du bas vers le haut, mais au contraire la légitimation des choix effectués en haut par le bas. On comprend mieux dès lors le nombre d'allocutions.
Phénomène des plus inquiétants, le déséquilibre en terme de temps d'antenne existant entre les deux parties. Déséquilibre souligné par la partie flouée mais aussi par le très officiel conseil supérieur de l'audiovisuel qui ne pouvait d'ailleurs nier l'évidence.
Ces deux phénomènes (le président/le déséquilibre) ne seraient que peu d'importance s'ils avaient contribué à déclencher une réaction salvatrice. A savoir, et en pesant bien les mots, que cette élection ne fût pas démocratique en raison des faits qui viennent d'être mentionnés. Le résultat du scrutin qui sauve la morale a contribué à escamoter une protestation légitime, à tout le moins une interrogation sur les fondements de notre système politique. Pourtant la situation est devenue grave: elle pèse sur notre liberté et sur notre droit à exprimer notre point de vue dans un système dont les règles n'ont pas à être faussées. Et c'est peut être là que cette consultation fût un échec au delà du oui et du non dans la mesure où son caractère illicite n'a pas été souligné. Derrière cette idée, se profile la suite des événements dont paradoxalement on commence à s'inquiéter sur le tard. Une réflexion sur le processus de déroulement de l'avant scrutin aurait permis de prévoir l'après. Ainsi:
pourquoi un président omniprésent durant la campagne sans que cela ne déclenche de vagues, se sentirait t-il contraint de démissionner ? Non critiqué pour ses multiples interventions, ou si peu, c'est tout à fait logiquement qu'il reste en place, sans se sentir concerné.
L'arrivée d'un nouveau gouvernement n'est pas une conséquence du référendum. C'était un choix effectué voilà bien longtemps, courbe de confiance oblige. En revanche, dans la mesure où le non au référendum était la négation d'une certaine économie politique, une influence de la consultation sur la composition du gouvernement aurait du se traduire par une métamorphose. Ainsi, et fort logiquement, on pouvait s'attendre à une arrivée massive de centristes afin de mener une politique moins libérale. Là encore, malgré le vote des français, il n'en est rien: on voit de nouveau les mêmes têtes, avec en prime un soupçon de libéralisme en plus. La rapide nomination de Sarkozy défie toute concurrence si je puis formuler les choses ainsi. En conséquence, ni au sujet du président de la république, ni au sujet du premier ministre (la voix de son maître), ni au sujet de la composition du gouvernement on ne peut parler d'influence du résultat du scrutin. Il semblerait au contraire que l'on baigne là haut dans l'autosatisfaction. Au vu des 55% de votes négatifs c'est de l'indécence.
Oui, mais il y a la gauche: c'est à dire la symétrie de la bêtise de droite par rapport au centre. Parce que la gauche pouvait agir. Le champ était libre. Ceux qui minoritaires s'étaient opposés au texte européen, pouvaient être mis en première ligne. Les autres défaits, pouvaient eux d'une part déclarer se soumettre au vote des français (ce que la droite n'a pas fait) et faire l'unité avec les minoritaires en s'accordant sur un non de gauche qui dépasse de loin les frontières du parti socialiste. La dynamique pouvait dans ces conditions se poursuivre. De vils calculs politiciens en ont voulu autrement. Les vaincus ont gagné et les vainqueurs qui ont su déclencher une vague de sympathie dans le pays sont désormais au placard.
Tout se passe comme si la dérive libérale, présente à droite évidemment, s'inscrivait aussi maintenant de manière définitive à gauche. Et cette fois ci, que l'on ne sorte pas les excuses habituelles: la situation dans laquelle se trouvait la gauche après les résultats était exceptionnelle. Elle pouvait voir grand et vite. L'état major a tranché. L'électorat a été floué.
Personne n'a pu échapper au battage médiatique entourant le référendum. Maastricht en son temps avait déclenché une campagne officielle des plus méprisantes à l'égard de la moitié des français souhaitant voter non, choix digne d'écervelés, d'incultes de bons à rien. Et Maastricht n'est rien en comparaison de ce que l'on vient de subir.
Je ne sais plus si c'est trois ou quatre fois que le président de la république s'est adressé aux français. C'est en tout cas beaucoup trop. Un président qui s'invite si fréquemment ne peut que perdre en crédibilité. Son comportement pose un autre problème, à savoir si c'est lui le représentant de la nation ou si c'est la nation qui le représente. En indiquant, en forçant le choix des français il ne fait nul doute que c'est la seconde hypothèse qui doit être validée. Ainsi, la politique nationale n'est plus la concrétisation des voeux de la nation, transmis du bas vers le haut, mais au contraire la légitimation des choix effectués en haut par le bas. On comprend mieux dès lors le nombre d'allocutions.
Phénomène des plus inquiétants, le déséquilibre en terme de temps d'antenne existant entre les deux parties. Déséquilibre souligné par la partie flouée mais aussi par le très officiel conseil supérieur de l'audiovisuel qui ne pouvait d'ailleurs nier l'évidence.
Ces deux phénomènes (le président/le déséquilibre) ne seraient que peu d'importance s'ils avaient contribué à déclencher une réaction salvatrice. A savoir, et en pesant bien les mots, que cette élection ne fût pas démocratique en raison des faits qui viennent d'être mentionnés. Le résultat du scrutin qui sauve la morale a contribué à escamoter une protestation légitime, à tout le moins une interrogation sur les fondements de notre système politique. Pourtant la situation est devenue grave: elle pèse sur notre liberté et sur notre droit à exprimer notre point de vue dans un système dont les règles n'ont pas à être faussées. Et c'est peut être là que cette consultation fût un échec au delà du oui et du non dans la mesure où son caractère illicite n'a pas été souligné. Derrière cette idée, se profile la suite des événements dont paradoxalement on commence à s'inquiéter sur le tard. Une réflexion sur le processus de déroulement de l'avant scrutin aurait permis de prévoir l'après. Ainsi:
pourquoi un président omniprésent durant la campagne sans que cela ne déclenche de vagues, se sentirait t-il contraint de démissionner ? Non critiqué pour ses multiples interventions, ou si peu, c'est tout à fait logiquement qu'il reste en place, sans se sentir concerné.
L'arrivée d'un nouveau gouvernement n'est pas une conséquence du référendum. C'était un choix effectué voilà bien longtemps, courbe de confiance oblige. En revanche, dans la mesure où le non au référendum était la négation d'une certaine économie politique, une influence de la consultation sur la composition du gouvernement aurait du se traduire par une métamorphose. Ainsi, et fort logiquement, on pouvait s'attendre à une arrivée massive de centristes afin de mener une politique moins libérale. Là encore, malgré le vote des français, il n'en est rien: on voit de nouveau les mêmes têtes, avec en prime un soupçon de libéralisme en plus. La rapide nomination de Sarkozy défie toute concurrence si je puis formuler les choses ainsi. En conséquence, ni au sujet du président de la république, ni au sujet du premier ministre (la voix de son maître), ni au sujet de la composition du gouvernement on ne peut parler d'influence du résultat du scrutin. Il semblerait au contraire que l'on baigne là haut dans l'autosatisfaction. Au vu des 55% de votes négatifs c'est de l'indécence.
Oui, mais il y a la gauche: c'est à dire la symétrie de la bêtise de droite par rapport au centre. Parce que la gauche pouvait agir. Le champ était libre. Ceux qui minoritaires s'étaient opposés au texte européen, pouvaient être mis en première ligne. Les autres défaits, pouvaient eux d'une part déclarer se soumettre au vote des français (ce que la droite n'a pas fait) et faire l'unité avec les minoritaires en s'accordant sur un non de gauche qui dépasse de loin les frontières du parti socialiste. La dynamique pouvait dans ces conditions se poursuivre. De vils calculs politiciens en ont voulu autrement. Les vaincus ont gagné et les vainqueurs qui ont su déclencher une vague de sympathie dans le pays sont désormais au placard.
Tout se passe comme si la dérive libérale, présente à droite évidemment, s'inscrivait aussi maintenant de manière définitive à gauche. Et cette fois ci, que l'on ne sorte pas les excuses habituelles: la situation dans laquelle se trouvait la gauche après les résultats était exceptionnelle. Elle pouvait voir grand et vite. L'état major a tranché. L'électorat a été floué.