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vendredi 1 juin 2012

Obsolescence du référentiel gauche/droite



Par Philippe DELBAUVRE


1982 : Je suis alors en Terminale et n’ai pas été mécontent de la défaite l’année précédente de Valéry Giscard d’Estaing, ainsi que, à un degré moindre de l’élection de François Mitterrand dont je n’ignorais pas, grâce à la lecture d’un hebdomadaire bien connu, ce que l’on appellera par la suite, la jeunesse française. L’orientation consumériste et matérialiste du giscardisme, bien décrite dans l’ouvrage « Démocratie française » ne pouvait alors séduire le jeune homme idéaliste et assez naïf d’ailleurs que j’étais alors. Elève dans une classe majoritairement constituée de ce qu’il faut bien appeler des petits bourgeois et participant à ce que l’on appelle des rallyes où la fine et jeune fleur bourgeoise aimait à se rencontrer, je faisais alors l’apologie d’un mouvement alors inconnu du grand public, qui ne connaitrait la notoriété que deux ans plus tard. Haineux de la gauche pour des raisons très intéressées, mon jeune public n’en était pas moins réceptif à une alternative plus radicale au chiraquisme alors triomphant, jugé trop mou par beaucoup.

Dans ce contexte, le Front National du milieu des années quatre vingt, puisque c’était ce mouvement dont je me faisais le thuriféraire, aspirait via les déclarations de son chef, à devenir la quatrième composante de l’opposition dont le Front souhaitait être la pointe. Le succès des élections législatives de 1986 permis d’envoyer à l’assemblée nationale des députés qui, très majoritairement, entonnaient un catéchisme particulièrement libéral qui s’opposait frontalement à une gauche nationalisatrice depuis 1981.

Le hiatus, dès cette époque, c’est que la gauche depuis quelques années déjà, avait abandonné ses dogmes, confrontée qu’elle fut aux exigences de l’intégrisme économique qui s’était déjà fait jour et que l’on n’appelait pas encore le nouvel ordre mondial. La chute du mur de Berlin et la désagrégation du pacte de Varsovie, symboles de l’univers soviétique, consacrèrent la fin d’un siècle et d’une époque dont nous sommes désormais bien éloignés. Paradoxalement pourtant, il en reste encore pour bégayer en répétant le logiciel frontiste de l’époque dont je viens d’écrire, et de justifier via la mise en exergue de la mutation d’alors de la gauche, qu’il était déjà en ces temps, obsolète.

L’un des problèmes majeurs de notre univers politique national, et d’ailleurs européen, n’est autre que la survie du référentiel droite-gauche dans une configuration qui, elle, a radicalement changé. Non seulement la gauche, comme indiqué précédemment, a mu, mais de surcroît, la droite, elle aussi ne mérite plus son nom : entendons nous ! C’est un ancien anticommuniste obsessionnel qui s’exprime, grand pourfendeur de la gauche durant les années quatre vingt. Il n’en reste pas moins que je fais parti de ceux qui ont réinitialisé le logiciel, conscient qu’aujourd’hui, si un choix devait être fait, ce serait vers la gauche profonde que nous devrions nous diriger et trouver nos sources d’inspiration sachant que le nouvel ordre mondial est lui, d’origine droitière. A titre d’exemple, le parti de la France, aussi bien via Carl Lang ou Thomas Joly, qui continue inlassablement à se réclamer de la droite et à fustiger la gauche, comme si l’une et l’autre existaient encore, n’ont pas saisi et intégré les évolutions majeures de ces dernières décennies.

En conséquence, la compréhension du monde contemporain doit nous pousser à instruire les foules en leur montrant l’obsolescence du référentiel droite/gauche, sachant que l’une et l’autre se sont soumises, le centre aussi d’ailleurs, aux mêmes desiderata, principalement issus du monde économique.