Philippe DELBAUVRE Editorial
Niels Bohr
«
Le contraire d’une vérité banale, c’est une erreur stupide. Le
contraire d’une vérité profonde, c’est une autre vérité
profonde. »
Niels Bohr, prix nobel de physique 1922.
Niels Bohr, prix nobel de physique 1922.
On
sait l'aphorisme de Nietzsche : «Toute vérité est simple,
n'est ce pas doublement un mensonge ? » Doublement donc.
Dans un premier temps, Nietzsche postule que la vérité est
nécessairement complexe. Par la suite, il souhaite aussi s'impliquer
en affirmant qu'il n'existe pas réellement de vérité. Ceux qui
connaissent la philosophie et notamment celle de ce penseur
germanique devenu Suisse d'adoption, savent que son terroir
philosophique initial est celui de la « philosophie de la vie »
(1) dont sont aussi issus des penseurs aussi différents que Freud et
surtout Schopenhauer. Cela à un point tel que Nietzsche ira jusqu'à
écrire un chapitre entier intitulé « Schopenhauer
éducateur ». En aucun cas, celui veut des certitudes émanant
de vérités, n'a vocation à lire Nietzsche dont l'objectif est
plutôt de nous apprendre la vie en modifiant notamment notre rapport
à celle ci. On sait aussi que Nietzsche est un penseur méconnu
malgré sa célébrité, ce au motif d'interprétations erronées de
certains de ses aphorismes ou de paragraphes écrits en trop peu de
lignes, favorisant ainsi les mésinterprétations.
Ainsi,
les citations suivantes de Friedrich Nietzsche:
«Que
de bière dans la pensée allemande.» Façon pour le philosophe de
fustiger toute pensée par trop conceptuelle, spéculative, comme
c'est souvent le cas pour les penseurs allemands.
«Quelle
bénédiction qu'un Juif au milieu d'allemands.»Nulle ironie dans
cette phrase: elle est à comprendre au premier niveau.
D'ailleurs,
«Pour être antisémite, il faut détenir une bonne couche de
mentalité populacière.» Friedrich Nietzsche.
«L'homme
de l'avenir est celui qui aura la plus longue mémoire.» Bien
évidemment pour Nietzsche, la mémoire est un fardeau, une chaîne,
qui empêchent l'homme de vivre libre.
Bien
évidemment, cette parenthèse concernant Nietzsche qui n'est qu'une
introduction, a deux vocations d'être: montrer que Friedrich
Nietzsche n'est probablement pas celui qu'on croit, mais aussi
s'interroger sur l'aphorisme mis en exergue dès l'origine «Toute
vérité est simple, n'est ce pas doublement un mensonge ?»
L'appartenance
caractérologique de Nietzsche est telle que c'est un impulsif de
type émotif. Cela se perçoit dans sa façon d'écrire, utilisant
très souvent aphorismes et courts paragraphes. L'aphorisme, parce
qu'il est slogan utilisé à l'écrit, est le plus souvent réducteur,
quand il n'est pas erratique. C'est ainsi que:
«Toute
vérité est simple, n'est ce pas doublement un mensonge ?» est
assez facilement récusable: six multiplié par sept font quarante
deux. Non seulement c'est vrai (la vérité dans le cas présent
s'impose), mais on m'avouera aussi que c'est simple.
Dans
les faits, si certaines vérités sont triviales, d'autres ne le sont
pas. L'individu non lettré par exemple, a accès naturellement aux
vérités de base: par exemple, si un groupe humain vous dit qu'il
pleut, c'est probablement parce qu'il pleut (vrai et facile). Tel
n'est malheureusement pas des cas bien particuliers où la vérité
ne peut s'obtenir que par un long travail. L'inflation, par exemple,
n'est pas la hausse des prix, puisqu'un pays peut connaître
simultanément inflation et baisse des prix de façon concomitante.
De même, la planète terre, approximativement de forme sphérique, a
un contenu physique, non pas plein, mais presque vide. Tel est aussi
le cas pour des problématiques où la notion de vérité est
inopérante ou, autre cas, dans les circonstances où on ne peut
encore se prononcer.
J'aurai
par la suite à revenir beaucoup plus en détail sur cet aspect, y
voyant une des caractéristiques majeures de la postmodernité. Dès
maintenant, il faut bien avouer qu'une structure dirigeante a tout
intérêt à favoriser que chacun puisse s'exprimer comme bon lui
semble, y compris sur des sujets qui n'ont pas été travaillés (se
souvenir des deux exemples que j'ai pris en considération:
l'inflation et le contenu de la planète terre). Il s'ensuit alors
une cacophonie généralisée, bien entretenue par les tenants du
Système, les prises de position des uns et des autres se
neutralisant, laissant les pouvoirs sans adversaires réels.
(1) Lebensphilosophie pour utiliser le terme technique.
Article publié sur Voxnr