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mardi 1 mai 2007

Dire tout haut ce que Jean Marie Le Pen pense tout bas

Mardi, 1 Mai 2007


Dire tout haut ce que Jean Marie Le Pen pense tout bas

Philippe Delbauvre

Politique
Dire tout haut ce que Jean Marie Le Pen pense tout bas
Cela n’aurait pas été la première fois que Jean Marie Le Pen aurait été le personnage principal d’une émission ou d’une élection auxquelles pourtant il n’aurait pas participé. Une véritable présence, pour ne pas écrire une omniprésence, eut passé par un choix en faveur de Ségolène Royal. Bruits et fureurs dans le Landernau politique où l’éternel jouet fabriqué pour les besoins de la cause eut été cassé.

Explications :

Dans la mouvance, c’est bien connu, on est ni « droite, ni gauche » mais … surtout pas de gauche. C’est là une grave erreur. D’abord parce que pour des raisons strictement tactiques il peut être des plus intéressants de défavoriser ce que l’on continue à appeler, et bien à tort, la droite. Ensuite parce que ce réflexe pavlovien est considéré par l’électorat comme un retour à la sagesse: enfants turbulents de la droite, les membres de la mouvance au moment du choix fatidique, en reviennent à leurs origines. Voilà qui donne aussi du grain à moudre à la célèbre analyse communiste faisant des nationalistes la partie la plus réactionnaire de la bourgeoisie. Voilà également qui donne du crédit à la droite qui n’en mérite aucunement: en effet, si les nationalistes qui par définition sont ceux qui font du bien commun la clef de voute de leur système politique s’en retournent systématiquement à la droite, c’est que celle ci mérite considération. Cela d’autant plus lorsqu’elle présente un homme dont les accents sont inhabituellement droitiers: au passage on comprend mieux l’hémorragie du premier tour. Enfin et surtout parce que les nationalistes ne se situent plus au dessus du lot mais en bas et à droite, ce qui ne peut que les déconsidérer. Notons que la démarche opposée qui systématiquement les placerait en bas et à gauche aurait les mêmes conséquences.

Cet appel en faveur de Ségolène Royal aurait eu de multiples conséquences. Le Front National eut été placé dans la position du faiseur de roi. De reine en l’occurrence. Elle eut brisé toutes attaches avec un passé antérieur et enfin tenu compte de l’effondrement du mur de Berlin. Elle eut fait comprendre que sans les nationalistes aucune perspective de victoire, proportionnelles ou pas, n’était possible. Elle eut mis toute la gauche dans l’embarras aussi, ce qui n’est pas peu. D’une pierre deux coups, à l’aide d’un splendide isolement vis à vis des deux blocs dont à l’un elle est attachée depuis trop de temps, elle se fût placée sous les projecteurs de l’actualité, rayonnant tant en France qu’en Europe. Ce qu’aucun autre nationalisme n’a fait, le Français l’aurait réalisé.

Evidemment, ces soutiens ne peuvent être que ponctuels et factuels. Si les nationalistes faisaient l’erreur d’apporter leur soutien qu’à la gauche exclusivement, ils y perdraient toute crédibilité. Il faut que le choix, si choix il y a, soit explicité. On peut être certain que le corps journalistique avide de sensations, s’en irait alors rechercher les informations à la source. Dans le cas présent, je ne file pas le grand amour avec Ségolène Royal ni avec la gauche d’ailleurs tout en sachant très bien que leur arrivée au pouvoir ne pourra que nous être favorable : la gauche au pouvoir est un faire valoir pour nos idées. Si le candidat de la droite avait été le premier ministre, l’abstention pouvait se justifier. En ce qui concerne l’ancien ministre de l’intérieur, c’est tout à fait différent : rupture avec une économie qui nous évite la proportion de pauvres que l’on trouve chez Tony Blair, rupture avec la notion de communauté au profit de l’individualité, rupture avec la politique étrangère faite de non-alignement. Il ne s’agit donc pas d’une rupture avec l’actualité française mais avec la tradition historique de la France.

Voilà la raison du soutien à Ségolène Royal. D’ailleurs, Jean Marie Le Pen, fin politique et sachant très bien à qui profite son abstention ne s’y est pas trompé. Il suffit de lire entre les lignes et de savoir pour qui voterait sans consignes son électorat pour comprendre.

Il n’est pas impossible que je dise tout haut ce que Jean Marie Le Pen pense tout bas.