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dimanche 3 février 2013

Confiteor







Par Philippe Delbauvre





















































































































Confiteor
Voici un peu plus de deux ans que Marine le Pen se trouve au commande du Front national suite à une campagne qui s’écoula durant le dernier trimestre de l’année 2010. En matière de pourcentage, elle obtint un résultat similaire, pour les signatures des secrétaires départementaux ainsi que pour les suffrages des militants. A l’époque, c’est un euphémisme, je n’approuvais pas l’appui qu’apporta à Marine la structure à laquelle j’appartenais, à savoir Voxnr. Je le fis savoir à Christian Bouchet par l’intermédiaire d’un courriel qui fut probablement celui que j’ai le plus travaillé dans mon existence.

La campagne fut l’objet de nombreux dérapages et la mauvaise foi s’est par trop souvent manifestée. Justement pas par les deux protagonistes principaux mais plutôt par des individus soucieux d’envenimer les débats en faisant souvent preuve de méchanceté : la passion, au sens où la définissent les philosophes, pris l’ascendant sur la raison. Avec cette idée d’un comique surréaliste qu’une victoire des tenants de l’autre camp deviendrait de facto une catastrophe nationale.

Deux ans ont donc passé et l’on en trouve encore, peu certes, pour critiquer encore de façon systématique et caricaturale, l’actuelle direction du Front national. En ce qui me concerne, de manière quelque peu infantile, j’ai boudé, considérant que la structure à laquelle j’appartenais, se devait de maintenir ce que l’on a coutume d’appeler, un splendide isolement. Bien évidemment, et contrairement à d’autres, je me suis bien gardé de salir ce que j’avais auparavant célébré. Comme un enfant donc, confronté à des adultes qui ignorent ce qu’il faut bien appeler un caprice, je revins progressivement sur la scène politique, qu’au demeurant, je n’avais jamais réellement quittée : je n’allais tout de même pas stopper un engagement de plus de trente ans. Les communistes ne m’ayant pas fait reculer naguère, je n’allais pas fuir aujourd’hui devant les tradesmen.

La difficulté qu’éprouvent les Français à voter Front national est probablement la conséquence de la diabolisation connue de tous. Il suffit à cet égard d’observer et d’écouter le journaliste pour savoir que son attitude diffère selon qu’il interroge un invité labellisé Front national ou un autre. Au delà des chiffres qui doivent être interprétés, on constate que les électeurs du Front national ne sont pas toujours les mêmes et que le mouvement ratisse de plus en plus large. A titre d’exemple, les fonctionnaires issus de la catégorie C, sont désormais électeurs du Front. Or, ce qui me semble essentiel, c’est que le pas soit franchi, que le tabou soit levé : dès lors où un Français a voté, ne serait-ce qu’une fois pour le Front, il n’hésitera plus à recommencer.

Il y a, pour les tenants du Système, vocation à s’inquiéter encore davantage :

1/ Le traditionnel état de grâce n’a pas eu vraiment lieu et c’est donc toute une partie de l’électorat de gauche qui manifeste sa colère, y compris par l’intermédiaire de sénateurs qui n’hésitent plus désormais à faire obstruction : fracture au sein de la majorité qui se concrétisera probablement dans les urnes lors des prochaines élections.

2/ De part son positionnement « ni droite, ni gauche », le Front national déstabilise et la gauche et la droite. La gauche, parce qu’une grande partie de son électorat se définit avant tout par son opposition à la droite, le Front national leur apparaissant différent de l’Ump : un électorat de gauche donc, susceptible de rejoindre la mouvance nationale. La droite, quant à elle, malgré ses tentatives de séduction afin d’obtenir du Front qu’il lui assure les victoires lors des seconds tours à venir, n’est pas dans une situation plus réjouissante. A titre d’exemple, en refusant de s’aligner sur les positions de l’Ump en matière de mariage pour tous, Marine le Pen a montré, une fois de plus, que le Front et la droite, ce n’était nullement la même chose. Les Français l’ont compris.

3/ Ainsi que l’écrivait Alain de Benoist, l’ancien repère droite/gauche doit maintenant être remplacé par le référentiel centre/périphérie. Par centre, il faut bien sur comprendre les différents partis qui pratiquent la même politique, comme l’Ump, le parti socialiste ou le centre stricto sensu. Et des électeurs déçus, issus de la gauche comme de la droite, il y en a de plus en plus. Fatalement, on peut donc s’attendre lors de prochaines échéances à une poussée des deux fronts, celui qui se qualifie de gauche, et celui qui est national.

4/ Marx faisait remarquer que pour connaître l’avenir d’un pays capitaliste, il suffisait d’en considérer un autre à un stade plus avancé. Doux euphémisme, les perspectives ne sont pas bonnes (1). Par voie de conséquence, les gouvernements, qu’ils soient de gauche ou de droite, susciteront l’impopularité, sachant que c’est la structure même du Système qui impose la mise au pas : il faudra donc, et nous allons les y aider, que les Français comprennent que le problème n’est pas le fait du chauffeur mais du véhicule.

Je pense aujourd’hui que l’ennemi majeur n’est pas le segment qui s’autoqualifie de gauche mais bien la structure qui s’affuble du terme de droite. Longtemps le danger fut communiste, idéologie que l’on est bien obligé de classer à gauche. Aujourd’hui, c’est le capitalisme qui est principalement destructeur, y compris dans le cadre de son versant politique que l’on peut appeler individualisme. Même s’il est aussi propagé par des mouvements de gauche, le capitalisme ne peut donc être estampillé qu’à droite. Les soviets n’étant plus, reste les trusts...
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