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mercredi 10 juillet 2013

Elections municipales et européennes de 2014 : la branlée qu'on va leur mettre...

Philippe DELBAUVRE

Elections municipales et européennes de 2014 : la branlée qu'on va leur mettre...
 
 
( L'ancien ministre des Affaires étrangères du gouvernement Fillon s'est inquiété des élections européennes de juin 2014, où les partis anti-européens «vont faire campagne de manière virulente» et pourraient faire un bon score. «Aujourd'hui, l'Europe est menacée de dislocation et pour moi c'est un enjeu essentiel», a-t-il dit, en estimant qu'il fallait «absolument se mobiliser» )(1).

Et bien sur, l'ancien premier ministre, au demeurant intellectuellement brillant, de ne pas se tromper.

A moins d'un an des échéances électorales, on peut déjà dresser un tableau de la situation telle qu'elle se présente aujourd'hui, mais aussi en extrapolant la conjoncture actuelle, en déduire ce que sera demain.

Tour d'horizon

L'extrême gauche: alors qu'elle avait le vent en poupe en 2002, ce au point d'obtenir 10% des suffrages lors du premier tour des élections présidentielles, elle a aujourd'hui presque disparu. Pourtant, ces marxistes de vocation, sont dans une situation optimale puisque justement le capitalisme est en crise. Paradoxalement, ils ont donc disparu des écrans radars et ce pour plusieurs raisons: la fin de la personnalisation du vote extrême gauche qui passait principalement par la sympathie naturelle qu'enfantaient les personnalités originales de Besancenot et Laguiller sont la conséquence de la disparition de ces deux acteurs politiques majeurs voici une dizaine d'années. On peut aussi ajouter à des fins d'explication de la quasi disparition de l'extrême gauche, la bêtise proverbiale des militants, par trop férus d'idéologie, ce qui répugne aux Français soucieux de résultats concrets. Lorsque à l'époque, la Lcr avait le vent en poupe, se transformant en Npa, ils furent nombreux et de bonne foi à le rejoindre, espérant la naissance d'un monde meilleur. Décontenancés par les discussions idéologiques et stériles des anciens de la Lcr, ils partirent...

La vraie gauche: Melenchon, qu'on l'aime ou pas, la représente. L'ancrage à gauche, avec toutes les caricatures idéologiques que cela présuppose, est ici marqué. Le problème du front de gauche, c'est qu'il repose uniquement sur la personnalité de son chef qui apparaît, malheureusement pour lui même s'il a sa part de responsabilité, comme fantasque aux yeux des Français. Plus grave, les études de sociologie politique montre que son électorat n'est nullement populaire alors que c'est justement celui-ci qui était de prime abord visé. Cela ne signifie nullement qu'il faille voir l'avenir de la structure en noir. Il faudra bien que l'électorat qui a porté François Hollande au pouvoir, suite aux désillusions qu'il est en train de connaître, se trouve une nouvelle auberge. Il ne faut pas sous-estimer un fait essentiel: bien des électeurs de gauche préfèrent voter pour le Front National plutôt que pour l'Ump. De même, et c'est évidemment encore plus flagrant, bien des électeurs Ump préfèrent voter pour le Front National plutôt que pour la gauche. Le Front National recueille ici les bénéfices de son refus de choisir entre droite et gauche, se déclarant français. Alors, cet électorat hollandiste, logiquement déçu ira ailleurs, dont une partie vers le front de gauche. C'est ainsi que François Hollande va être atteint du syndrome Jospin: à faire une politique considérée comme pas assez à gauche, son électorat va se déporter vers le front de gauche, les écolos et l'extrême gauche. L'idée que François Hollande, de nouveau candidat en 2017 puisse être absent du second tour est à prendre en considération.

« Nos amis les bêtes »: Parce que bêtes ils le sont vraiment... La candidature et la campagne d'Eva Joly sont ici éclairantes. Ce qu'eurent du faire les écologistes, c'est prôner le courant environnementaliste qui n'est ni de droite et de gauche, et ainsi ratisser très large. A titre d'exemple, c'est Nicolas Hulot qui eut du être choisi en 2012, parce que personnage humainement aimé par les Français, qui eut alors réalisé très probablement un bon score. Las, ce sont les idéologues qui ont triomphé, assez facilement d'ailleurs, idéologues dont les Français ne veulent justement plus, ce, quelle que soit leur tendance. A moins donc, d'une prise réelle de conscience, les écolos vont dans l'avenir végéter.

Le centre: il représente, et c'est là une constante en France, environ 15% de l'électorat. On comprend donc très bien pourquoi que depuis le début de la cinquième république, aucun candidat centriste n'ait été élu à la présidentielle. Comme de surcroît, il se partage désormais entre deux hommes, Bayrou et Borloo, l'avenir est assez sombre pour eux. Pour autant, l'élection européenne est pour eux majeure, européistes qu'ils sont. Encore faudrait-il savoir combien de listes seront constituées, ce que nous ne savons toujours pas à ce jour. Bayrou ne recueille nullement les bénéfices de son positionnement atypique préférant le Ps à l'Ump, démocrate chrétien d'origine qu'il est: je crains pour lui qu'il ne soit désormais politiquement fini, ne serait-ce qu'en raison de son trop important nombre de candidatures, vieux qu'il apparaît donc aujourd'hui...

L'Ump : elle n'est à l'évidence pas en joie actuellement. Les difficultés qu'elle connaît, aussi bien en matière de recrutement de candidats que de d'équilibre financier, sont à ce titre emblématiques. Le désamour des militants parisiens, ne renouvelant pas leur adhésion, aussi. La guerre entre Fillon et Copé semble avoir disqualifié les deux hommes, Sarkozy et Nkm tirant les marrons du feu. Et le choix viscéralement européen de l'Ump, comme du centre d'ailleurs, ne va pas les gratifier aux yeux des Français, de plus en plus opposés à Bruxelles, la dernière déclaration provocatrice de Barroso ne les ayant pas aidé.

Le Front: parti de 10% en 1984, il a désormais franchi la barre, à l'échelle nationale, des 20%. Par voie de conséquence, sa présence au second tour est désormais, bien davantage qu'une simple probabilité. Les derniers scrutins le montrent d'ailleurs. Le slogan de Coluche, « un pour tous, tous pourris » fait maintenant des ravages, de plus en plus de Français l'ayant adopté. A force de voir alterner des gouvernements de droite et de gauche pratiquant la même politique, les Français sont écoeurés. Et fatalement, le Front National, tant insulté et diffamé par la gauche comme par la droite, se trouve aujourd'hui de facto valorisé par réaction. A titre d'exemple la dernière élection de Villeneuve-sur-Lot est assez révélatrice. Les voix qui se sont reportées au second tour sur le candidat du Front National sont issues aussi bien des terroirs de droite et de gauche. Là encore, la stratégie «ni droite, ni gauche» du Front paie. Au sujet des européennes à venir par exemple, ils ne sont vraiment pas nombreux les partis à être viscéralement anti-européens et il y a matière à en déduire puisqu'il s'agit d'Europe, que le Front devienne la bouée de secours et le refuge de tous les eurosceptiques. Au sujet des municipales, le sujet est plus complexe, au motif des deux tours qui implique un report des voix. Si l'idée du splendide isolement est théoriquement séduisante, elle risque de différer la victoire du Front National, dont il faut bien admettre au motif de la situation catastrophique dans laquelle se trouve notre pays – les problèmes majeurs sont en plus devant nous – qu'elle est désormais vitale pour notre pays. A titre d'exemple, le Front pourrait de facto sanctionner les candidats de droite comme de gauche, qui ont fait preuve d'une haine marquante à son encontre. A titre d'exemple, Nkm candidate à Paris, qui par haine du Front National, n'a pas hésité à commettre un livre, mensonger d'ailleurs, se doit à mon avis, d'être sanctionnée. Réciproquement, des alliances locales ponctuelles peuvent être nouées dans le cadre d'un second tour, aussi bien avec des candidats de gauche que de droite, à condition que ceux-ci aient fait preuve de respect envers le Front National et qu'ils aient de la gestion des villes une approche positive. D'ailleurs, ces alliances locales ponctuelles, dans la mesure où elles s'opéreront avec droite et gauche, renforceront chez les Français que le Front est honnête quant à son refus de la bipolarisation. Quant au candidats battus en raison du positionnement du Front, ils comprendront très vite la leçon.

L'essentiel n'est-il pas que cela soit la France qui gagne ?

notes

(1) http://www.20minutes.fr/politique/1183589-20130703-juppe-candidat-ump-a-presidentielle-on-verra#xtor=EPR-182-[welcomemedia]--[article_politique]--