Pierre Le Vigan
Le mur de Berlin protégeait l’Est des
séductions et des conquêtes de l’imaginaire capitaliste. Le mur de
l’Ouest est celui qui permet l’extension maximum du capitalisme. Comment
? En confinant la Russie dans l’espace le plus petit possible. En
empêchant tout rapprochement entre la Russie et les autres pays
d’Eurasie. Et plus encore tout rapprochement entre la Russie et
l’Europe.
Hervé Juvin en appelle donc à la résistance. Il faut faire tomber ce mur de l’Ouest. Le premier mouvement de cette résistance c’est revenir à l’intelligence du monde. C’est se rappeler ce que l’esprit du temps veut nous faire oublier : que le monde est irrigué de rapports de force, de jeux de puissance. Derrière l’humanitaire, derrière les indignations pseudo morales, il y a la violence des déplacements de populations, et celle des changements de peuple. Décrypter cette réalité des rapports de force, cette réalité d’une guerre qui ne dit pas son nom, c’est ce qu’apporte Hervé Juvin. Au cœur de cette guerre, il fait un « point de situation ».
Pour comprendre le moment présent, l’auteur reprend un certain nombre de slogans de la pensée occidentaliste dominante. « La diversité est une richesse », « ‘le marché a toujours raison », « le droit est universel », … Une douzaine de thèmes sont ainsi analysés et démontés. Leur fausseté est montrée, leur imposture démontrée. Les intérêts que couvrent ces mots d’ordre sont mis à jour.
Prenons l’analyse du slogan « C’en est fini de l’hyperpuissance américaine ». Juvin montre que malgré des cafouillages évidents, les USA ont réussi dans leurs objectifs essentiels : éliminer les régimes qui voulaient mettre en cause le dollar comme unique monnaie d’échange international, éliminer ou marginaliser les amis de la Russie, créer un nouveau Moyen-Orient plus instrumentalisable que celui, antérieur, des États-nations, contrôler la nourriture du monde en mettant semences et espèces sous brevets, faire d’internet une colonie médiatique américaine, de l’espace une province des Etats-Unis. Il n’y a échec des Etats-Unis que si on croit que l’objectif des Américains était vraiment la paix, la démocratie et le développement.
Mais Juvin ne cache pas les points de fragilité de l’impérialisme américain, ceux qui peuvent annoncer un possible point de retournement : les faiblesses internes des Etats-Unis, en matière d’infrastructure, d’innovation, d’éducation, et les initiatives des autres pays, l’Inde et son développement économique endogène et (en partie) soucieux de son identité, la création d’une banque de développement des BRICS, une voie autre que la Banque mondiale et le FMI, l’émergence, aussi, de la notion de droits collectifs opposables aux stricts droits de l’individu.
Voilà bien des contre-pouvoirs, et de nouvelles forces qui peuvent renverser les tendances. La même mise au jour des lignes de force est faite pour chacun des thèmes du livre. Pour comprendre la réalité de notre servitude, et de la complicité de nos élites, mais aussi les voies de la libération de nos peuples. L’élucidation des enjeux par Juvinest toujours à la fois ferme quant à ce qui « menace notre être » comme disait Mao (On voit que Juvin ne craint pas les références iconoclastes et c’est le charme de la liberté de l’esprit, qui fut si française), et attentive à ce qui évolue dans les rapports de force, notamment intellectuels, car les idées sont aussi des forces. Pour Hervé Juvin, c’est essentiel.
Hervé Juvin, Le mur de l’Ouest n’est pas tombé, éd. Pierre-Guillaume de Roux, 280 pages, 23 €.
Hervé Juvin |
Nous,
la France, sommes du côté américain de ce mur de l’Ouest, et c’est
pourquoi notre pays n’est pas libre, et c’est pourquoi l’Europe est
asservie. « La résistance est à l’ordre du jour. […] l’occupation
mentale, technique, économique que nous subissons n’est pas de moindre
conséquence politique que celle que nous avons subie [pendant la Seconde
guerre mondiale] ; car elle aussi nous prive du pouvoir que la
République nous a donné, que les institutions du Conseil National de la
Résistance avaient assuré, que le projet d’union de l’Europe avait fait
espérer. Et ce rejet du pouvoir perdu, du pouvoir à reprendre, est au
cœur de la conscience malheureuse des Français – de ceux du moins pour
qui la France est autre chose qu’un hôtel ».
Hervé Juvin en appelle donc à la résistance. Il faut faire tomber ce mur de l’Ouest. Le premier mouvement de cette résistance c’est revenir à l’intelligence du monde. C’est se rappeler ce que l’esprit du temps veut nous faire oublier : que le monde est irrigué de rapports de force, de jeux de puissance. Derrière l’humanitaire, derrière les indignations pseudo morales, il y a la violence des déplacements de populations, et celle des changements de peuple. Décrypter cette réalité des rapports de force, cette réalité d’une guerre qui ne dit pas son nom, c’est ce qu’apporte Hervé Juvin. Au cœur de cette guerre, il fait un « point de situation ».
Pour comprendre le moment présent, l’auteur reprend un certain nombre de slogans de la pensée occidentaliste dominante. « La diversité est une richesse », « ‘le marché a toujours raison », « le droit est universel », … Une douzaine de thèmes sont ainsi analysés et démontés. Leur fausseté est montrée, leur imposture démontrée. Les intérêts que couvrent ces mots d’ordre sont mis à jour.
Prenons l’analyse du slogan « C’en est fini de l’hyperpuissance américaine ». Juvin montre que malgré des cafouillages évidents, les USA ont réussi dans leurs objectifs essentiels : éliminer les régimes qui voulaient mettre en cause le dollar comme unique monnaie d’échange international, éliminer ou marginaliser les amis de la Russie, créer un nouveau Moyen-Orient plus instrumentalisable que celui, antérieur, des États-nations, contrôler la nourriture du monde en mettant semences et espèces sous brevets, faire d’internet une colonie médiatique américaine, de l’espace une province des Etats-Unis. Il n’y a échec des Etats-Unis que si on croit que l’objectif des Américains était vraiment la paix, la démocratie et le développement.
Mais Juvin ne cache pas les points de fragilité de l’impérialisme américain, ceux qui peuvent annoncer un possible point de retournement : les faiblesses internes des Etats-Unis, en matière d’infrastructure, d’innovation, d’éducation, et les initiatives des autres pays, l’Inde et son développement économique endogène et (en partie) soucieux de son identité, la création d’une banque de développement des BRICS, une voie autre que la Banque mondiale et le FMI, l’émergence, aussi, de la notion de droits collectifs opposables aux stricts droits de l’individu.
Voilà bien des contre-pouvoirs, et de nouvelles forces qui peuvent renverser les tendances. La même mise au jour des lignes de force est faite pour chacun des thèmes du livre. Pour comprendre la réalité de notre servitude, et de la complicité de nos élites, mais aussi les voies de la libération de nos peuples. L’élucidation des enjeux par Juvinest toujours à la fois ferme quant à ce qui « menace notre être » comme disait Mao (On voit que Juvin ne craint pas les références iconoclastes et c’est le charme de la liberté de l’esprit, qui fut si française), et attentive à ce qui évolue dans les rapports de force, notamment intellectuels, car les idées sont aussi des forces. Pour Hervé Juvin, c’est essentiel.
Hervé Juvin, Le mur de l’Ouest n’est pas tombé, éd. Pierre-Guillaume de Roux, 280 pages, 23 €.
Notes |
*Pierre Le Vigan est essayiste et philosophe. Son dernier ouvrage paru est Soudain la postmodernité aux éditions La barque d’or (labarquedor@gmail.com) 20€ + 4 € de frais de port pour la France |
Source |