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samedi 4 juin 2016

Le Front National regarde avec amusement le retour de Nicolas sarkozy (1) et il se trompe


Philippe Delbauvre 

Le Front National regarde avec amusement le retour de Nicolas sarkozy (1) et il se trompe
 
L'histoire nous enseigne qu'en politique, « tout désespoir est une sottise absolu ».

A titre d'exemple, on n'imaginait pas en 1957 que le général de Gaulle puisse avoir encore un avenir, ce un an seulement avant son retour au pouvoir. François Mitterrand, élu dans l'allégresse en 1981, fut le président le plus impopulaire en 1986, avec un bilan jugé comme détestable à l'issue de cinq ans de pouvoir, par la majorité des Français. Cela ne l'empêcha pas d'être réélu triomphalement deux ans plus tard. Qui pouvait imaginer l'absence de Lionel Jospin au second tour de l'élection présidentielle de 2002 ? Pas grand monde...

L'erreur, conséquence de la méconnaissance des avancées de la psychologie, des neurosciences et de l'éthologie, c'est de conférer à la rationalité, un rôle prépondérant dans le fonctionnement humain. C'est vrai de façon générale mais ça l'est aussi et encore plus, dans le cadre d'une élection.

Déclarer que Nicolas Sarkozy a un mauvais bilan présidentiel et qu'il est compromis dans ce que l'on a coutume d'appeler les affaires, c'est faire preuve de rationalité. Il n'en reste pas moins qu'une élection se joue bien davantage sur l'irrationalité. On sait que des petites phrases ont à plusieurs reprises joué un rôle prépondérant dans l'histoire des élections.

Ni les affaires, ni un comportement humain détestable, n'ont empêché Bernard Tapie d'être politiquement populaire. Je suis d'ailleurs persuadé, hypothèse d'école, que s'il se présentait à la magistrature suprême, il obtiendrait un très bon score. Si j'évoque cette personnalité, ce n'est pas fait du hasard. Il a beaucoup de points communs avec Nicolas Sarkozy, les affaires, comme une personnalité tout à fait détestable. Mais Bernard Tapie, qu'on l'aime ou non, c'est aussi, tout comme Nicolas Sarkozy, un battant.

En 1988, le candidat le plus sérieux à droite fut Raymond Barre. Ce fut le battant Chirac qui parvint au second tour. En 1995, la rationalité et le sérieux furent incarnés par Edouard Balladur. Terrassé par Jacques Chirac. Une des raisons de Lionel Jospin en 2002, indépendamment de la fuite d'une partie non négligeable des voix de gauche vers Chevènement ou l'extrême gauche, était qu'il est un triste : tout comme Barre ou Balladur d'ailleurs …

Lors de la primaire de 2007, les militants socialistes eurent le choix entre Dsk, Fabius et Ségolène Royal. La comparaison des trois cv impliquait le choix d'un des deux hommes aux dépens de la passionaria. On sait à quel point, ils furent écrasés. De la même façon, côté "droit", Villepin apparaissait rationnellement, comme d'une tout autre envergure que Sarkozy. Cela n'a pas empêcher ce dernier d'écraser son concurrent.

Quand bien même le candidat Sarkozy avait aux yeux des Français un bilan détestable en 2012 – il n'est crédité à l'origine que de 40% de suffrages au second tour – qu'il effectue sans difficultés et de façon constante une remontée à 49%. Contrairement à ce qu'affirme d'ailleurs les centristes, le positionnement droitier du candidat Sarkozy ne fut nullement une erreur stratégique. Ne lui a manqué que deux semaines pour remporter la mise : il eut simplement fallu qu'il entame sa campagne un peu plus tôt pour gagner …

Il va de soi, et encore aujourd'hui on peut le constater, que François Hollande n'est nullement un battant et que c'est lui aussi un triste. Même physiquement (Barre, Balladur, Hollande), cela se voit.

Considérer que Nicolas Sarkozy n'a aucune chance de gagner en 2017 est donc une erreur. Les Français sont tellement aujourd'hui habitués aux affaires qu'elles ne sont plus rédhibitoires à leurs yeux. Jacques Chirac n'avait-il pas été compromis ? Cela l'a t-il empêché de gagner et ce à deux reprises ? Ensuite, il est bien évident que le contexte lui est favorable : on ne voit pas comment l'exécutif pourrait redresser la barre d'ici 2017 sachant son impressionnante impopularité mais aussi du fait que les ennuis sont situés majoritairement devant. Ne pourrait réussir à « gauche », qu'un candidat se déclarant en rupture d'avec la magistrature actuelle (2). Pour Sarkozy, le problème ne se pose pas, puisqu'il apparaîtra en tant qu'Ump, comme d'opposition. A ce sujet, même si le Front National fustige le système Umps, le référentiel « Droite/gauche » reste néanmoins pérenne aux yeux de bien des français.

A moins donc d'une candidature atypique à « gauche », le second tour de la présidentielle verra s'opposer Nicolas Sarkozy et Marine le Pen. On ne voit pas comment Juppé et Fillon (des tristes encore une fois), freiner l'ascension de l'ancien président. C'est la raison pour laquelle, il faut dès maintenant prendre très au sérieux Nicolas Sarkozy et le considérer comme l'adversaire majeur. Il s'agit pour nous de l'empêcher d'obtenir une dynamique passant par un très bon résultat au premier tour. Quant à la « gauche », il ne me semble pas essentiel de la critiquer : ne se disqualifie t-elle pas elle même en gouvernant ?
 
Notes

(1) http://www.voxnr.com/cc/dep_interieur/EuEEEVlpFECbzBRPCm.shtml

(2) http://www.voxnr.com/cc/politique/EFZpAylAZubPdNkvLU.shtml


Article daté de septembre 2014