Le premier juin 2017, à une large majorité et à main levée, le parlement européen a adopté une résolution sensée combattre l’antisémitisme. Mais voilà, in coda venenum, la résolution stipule aussi que critiquer Israël constitue un acte d’antisémitisme !
Oser dire qu’Israël est un Etat voyou qui viole un nombre incalculable de résolutions du Conseil et de l’Assemblée des Nations Unies le condamnant pour son occupation et l’accaparement de la terre palestinienne : antisémitisme.
Oser dire que l’extermination de près de 2000 femmes, enfants, vieillards palestiniens égorgés à Sabra et Chatila en septembre 1982, sans compter les tortures et viols, tout cela commis sous les ordres du général Sharon : antisémitisme.
Oser soutenir comme Mme Rime Khalef, secrétaire exécutive de la CESAO [1], le rapport du professeur Richard Falk, ancien rapporteur spécial des Nations Unies sur les droits de l’homme dans les territoires occupés de Palestine, parce qu’il écrit « Israël est coupable de politiques et de pratiques constitutives du crime d’apartheid » : antisémitisme.
Oser, comme Jimmy Carter dès 2006, mettre en garde Israël contre le crime d’apartheid ou encore déclarer, comme l’ancien procureur de la république d’Israël Ben-Yaer, « nous avons établi un régime d’apartheid dans les territoires occupés » : antisémitisme.
Publier le rapport « Goldstone » accusant Israël de crimes de guerre et de possibles crimes contre l’humanité lors de l’opération « plomb durci » contre Gaza qui fit plus de 1.300 morts essentiellement civils entre décembre 2008 et janvier 2009 : antisémitisme.
Appeler au boycott contre l’Etat d’Israël pour crimes de guerre, crime d’apartheid, 50 ans d’occupation et de violation de tous les droits palestiniens : antisémitisme.
Lorsqu’un parlement, celui de l’Europe, en arrive à un tel déni de droit – la liberté d’expression étant une valeur fondant toute démocratie – on ne peut que s’indigner et se révolter de ce qu’il se trouve une majorité pour adopter une telle résolution, sous la pression, le harcèlement même de réseaux de lobbyistes à la solde d’Israël.
Pour les défenseurs du droit international et de la solidarité avec le peuple palestinien et tous les peuples privés de leurs droits fondamentaux, dénonçons cette résolution, le chantage à l’antisémitisme, les menaces des cercles à la solde du gouvernement israélien.
Battons-nous contre la lâcheté, les compromissions des politiciens qui adoptent des résolutions anti-démocratiques et mortifères.
Résistons aux côtés de ceux qui, en Israël, dénoncent les politiques criminelles de leur gouvernement à l’encontre des Palestiniens et de ceux qui, en Palestine, combattent l’occupant.
N’ayons crainte de dire que les luttes pour forcer Israël à se conformer au droit des Palestiniens à leur autodétermination s’inscrit dans l’histoire des peuples et de leurs revendications pour mettre fin au colonialisme, à l’image du FLN algérien contre la France ou du Viêt-Cong contre les Etats-Unis.
N’hésitons pas à dénoncer l’apartheid pratiqué par les Israéliens à l’égard des Palestiniens en territoires occupés et en Israël. Il est pire que celui pratiqué par les blancs d’Afrique du Sud, ainsi que l’a dit avec force l’archevêque Desmond Tutu.
Le crime d’apartheid [2] est inclus depuis 1973, avec dix autres crimes contre l’humanité, dans le Statut de Rome qui fonde en 2002 la Cour pénale internationale.
Le rapport de Richard Falk défendu par Mme Rima Khalef dit clairement : « Israël a mis en place un régime d’apartheid qui instrumentalise de façon systématique l’oppression raciale et la domination du peuple palestinien dans sa totalité ». Ce ne sont pas seulement des critiques qu’il y a lieu d’opposer à Israël, ce sont des condamnations et un appel à ce que le gouvernement Netanyahou soit déféré devant la Cour pénale internationale.
Face aux manquements graves des Etats occidentaux et de l’ONU qui ne remplissent pas leurs obligations légales pour protéger les populations palestiniennes [3], oui, nous nous devons, en tant que citoyens, de boycotter Israël, puissance colonisatrice et occupante de la Palestine depuis 50 ans.
Notes
[1] CESAO : Commission économique et sociale pour l’Asie Occidentale des Nations Unies.
[2] Le crime d’apartheid : actes
inhumains perpétrés dans le but d’établir et de maintenir la domination
des membres d’un groupe racial sur les membres d’un autre groupe racial
et de les opprimer systématiquement.
[3] Voir à ce sujet les travaux du Tribunal Russell sur la Palestine.
Article paru sur le site VoxNr.