Rédigé par Philippe Maxence
Au-delà de leurs aspects consternants, les dernières
élections présidentielles ont montrél’inquiétude grandissante d’une
partie des Français face aux effets de la mondialisation et des
décisions des instances supranationales qui en constituent le pouvoir
séculier. Pour beaucoup, l’heure est venue du grand affrontement
idéologique entre le mondialisme et le souverainisme.C’est dans ce contexte que vient de paraître le petit livre d’un jeune professeur de philosophie qui a décidé d’aller voir de plus près si non seulement cette opposition tenait bien la route, mais si le souverainisme constituait bien cette solution à laquelle aspirent les peuples pour retrouver à la fois leur indépendance et le goût du bien commun.
L’enquête (philosophique) menée par Guilhem Golfin sur la notion de souveraineté est passionnante. Elle se lit presque comme un roman policier dans lequel l’enquêteur serait confronté à une énigme à double face. S’il est relativement aisé de s’accorder sur les effets et les dangers réels du mondialisme et de ses bras séculiers que constituent les instances supranationales (Onu, Union européenne, etc.), la réponse exacte à lui apporter apparaît beaucoup moins évidente.
Fin du politique ?
Depuis quelques décennies, le souverainisme forme la pointe avancée de cette opposition et, loin de se réduire en France à un seul parti, il rassemble dans cette opposition des mouvements, des revues et des personnalités venus de tous les horizons politiques. Veut-on des noms ? Parmi les plus visibles, on avancera ceux d’Éric Zemmour, de Paul-Marie Coûteaux, de Natacha Polony, de Jean-Pierre Chevènement sans oublier Marine Le Pen ou Nicolas Dupont-Aignan. Talentueux, ils mettent des mots et des concepts sur une inquiétude et un état de fait. Leur solution ? Exprimée à des degrés divers, elle postule que la France doit se réapproprier sa souveraineté afin de retrouver le cours de son Histoire, aussi difficile celle-ci sera-t-elle. Qui ne leur accorderait pas raison, au moins en partie ?C’est là qu’interviennent notre jeune philosophe et son enquête. Quand tout va mal dans une maison, il faut commencer par remettre les choses en ordre, ranger les pièces, mettre des chaises autour de la table et discuter.
De l'ordre dans les concepts
C’est ce qu’il fait, à sa manière. Il commence par mettre de l’ordre dans les concepts. Son rangement s’effectue à l’aune de la philosophie classique, antique et chrétienne. Elle a fait ses preuves et un chrétien ne saurait y renoncer. Autour de la table, on retrouve ainsi Platon et Aristote, saint Augustin et saint Thomas, d’autres encore. L’enquête débouche sur le constat que la souveraineté participe du mal qu’elle tente d’enrayer en raison de ses racines communes qui se situent dans la modernité philosophique, cette immense rupture avec la conception classique et chrétienne de l’homme et du cosmos.Mais, au-delà, l’enquêteur met le doigt sur un autre aspect que révèle au fond le premier. C’est la notion même de politique qui a été entièrement subvertie, détachée de toute notion de bien et de finalité, porte ouverte au pouvoir discrétionnaire et au nihilisme.
Avouons-le : le jeune enquêteur nous secoue dans nos habitudes. Il nous force à une remise en question, mais celle-ci est en fait un retour vers nous-mêmes, c’est-à-dire vers nos véritables origines. La crise est là, il n’est nul besoin de le démontrer. Guilhem Golfin, non content d’en indiquer les causes, nous offre des pistes pour en sortir.
Pour aller plus loin :
Souveraineté et désordre politique
Guilhem Golfin
Le Cerf, 208 pages, 19 €