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vendredi 17 novembre 2017

Peut-on récuser un jury parce qu’il ne comprend pas assez de musulmans ?

Philippe Kerlouan

Un quotidien britannique nous apprend qu’un homme, condamné pour viol et menaces de mort envers son épouse, a fait appel. Quoi de plus normal, direz-vous : l’appel est une voie de recours habituelle dans la procédure. En l’occurrence, c’est le motif de l’appel qui peut surprendre : le jury, majoritairement composé de catholiques blancs, était trop « homogène » et ne comprenait pas assez de musulmans !

Ce n’est pas une fausse nouvelle ni l’invention d’un site d’information parodique. C’est un fait rapporté par le très sérieux journal The Times, qu’on ne peut soupçonner de tomber dans l’islamophobie primaire.
Ainsi donc, à Londres, on peut faire appel si l’on estime que le jury n’est pas assez représentatif de la diversité. Passe encore qu’on récuse, avant le procès, quelques jurés susceptibles de n’être pas suffisamment impartiaux. Mais, dans cette affaire, le problème posé est bien plus grave qu’une simple récusation.
Le fait même qu’un tel argument puisse être tenu montre qu’il est susceptible a priori d’être entendu. Serait-ce le signe d’une société où non seulement le multiculturalisme est entré dans les mœurs, mais où l’idée qu’on ne jugerait pas les choses de la même façon selon sa religion passe pour naturelle ?
Allons jusqu’au bout du raisonnement. On peut mettre en doute des preuves ou les discuter mais, si le viol est incontestable, il devrait rester un crime quelle que soit la religion de l’accusé ou des jurés. En faisant appel, l’avocat du prévenu espère un jugement plus clément. Ce qui suppose qu’un membre du jury pourrait, en fonction de sa religion, se montrer plus ou moins indulgent face au viol ou aux mauvais traitements infligés à une femme. 
 Pire : un tel appel laisse entendre qu’un juré de confession musulmane pourrait mieux comprendre l’attitude de l’accusé. Son avocat, en utilisant ce recours, présume que le viol pourrait être moins lourdement condamné par des adeptes de cette religion.
Certes, on reconnaît généralement que la femme, dans l’islam, est par nature inférieure à l’homme. Une sourate est très explicite à cet égard : « Les hommes ont autorité sur les femmes à cause des qualités par lesquelles Dieu les a élevés au-dessus d’elles. » Ce qui n’est pas acceptable dans nos sociétés occidentales.
Mais on ne sache pas que le Coran prévoie expressément que les musulmans puissent violer leurs femmes – à moins qu’on ne prenne modèle sur les combattants de l’État islamique qui prient avant et après avoir violé leurs captives, en assurant que ces pratiques sexuelles satisfont Dieu.
La Justice se doit d’être universelle. Elle doit tendre à s’approcher de la vérité. En acceptant de tels recours, l’institution admet implicitement le relativisme de notre droit. Voilà qui donne raison, une fois de plus, à Pascal qui résumait l’incapacité de l’homme à trouver la justice dans sa formule devenue proverbiale : « Vérité en deçà des Pyrénées, erreur au-delà. » À part que, dans cette circonstance, c’est à l’intérieur d’un même pays que des divergences de jugement pourraient se manifester.
Verra-t-on bientôt, en France, des recours exercés pour de tels motifs ? Il faut souhaiter que la Justice reste assez lucide pour ne pas céder à ce type d’arguments. Il y va de l’intérêt même des Français de confession musulmane.
Chaque fois qu’on cède sur les principes, que ce soit pour des raisons d’ordre religieux ou, plus généralement, au nom d’une idéologie, on entre un peu plus dans l’engrenage qui broie les valeurs fondamentales de notre société.

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