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jeudi 6 octobre 2016

Ezra Pound : Un poète rebelle, immortel et toujours debout




Au mois de novembre 1972, disparaissait le génial Ezra Pound dont la lutte contre l’usure fut une direction fondamentale de la vie et de l’œuvre. Les “Cantos prohibidos” (Chants interdits) sont une création poétique admirable qu’aucun usurier ne pourra faire oublier malgré les efforts pour salir tout ce qui est beau, noble et généreux. La haine des banksters s’est traduite par la proclamation que Pound était un “malade mental” qui fut enfermé dans un établissement pour psychopathes.


Le poète fuit le grand asile d’aliénés

 
Ezra Loomis Pound naquit aux Etats-Unis dans l’Etat d’Idaho en 1885 et mourut à Venise en novembre 1972. S’il a été la plus grande gloire littéraire jamais née dans ce pays, il fut le plus européen de tous ses écrivains. Peu après la fin de ses études (Université de Pennsyvania), il édita la revue “Poetry” dans laquelle il fit connaître entre autres William Butler Yeats et Thomas Stearns Eliot. Il quitta les Etats-Unis en 1911, quasi définitivement. Il y retourna contraint et forcé après la seconde guerre mondiale.


Il s’installa en Angleterre où il fonda le mouvement “imagisme” et en rédigea, en 1914, la première anthologie “Hommage à Properce” où il parle de la décadence de l’Empire Romain. Il prophétisa ensuite la chute de l’Empire britannique dans “Hugh Selwyn Mauberley”. Il évolua lentement vers une perception “vorticiste”, mouvement qu’il opposa aux esthétiques antérieures ainsi qu’au conservatisme anglais. Tout naturellement, le vorticisme voulait être une esthétique appropriée au monde de son temps. L’œuvre principale, la plus connue, les Cantos, contient 117 poèmes dont la rédaction s’étale de 1917 à 1968. On y découvre l’envergure prodigieuse de son talent et l’immensité de sa culture. Il y utilise les principales langues européennes ainsi que le mandarin, qu’il maîtrisait au même titre que l’arabe. Quoique l’anglais prédomine, il se sert abondamment d’expressions provençales, grecques, latines, françaises, espagnoles et surtout italiennes, affirmant que certaines idées doivent être exprimées dans leur langue initiale pour ne pas les altérer. On est loin ici des camarillas contemporaines pour lesquelles la traduction mensongère est la base du commerce de niaiseries pieuses. Les mafias s’abattront sur lui, authentique génie – hors du commun – de la littérature du XXème siècle. Le motif de la haine fut que, depuis l’Italie qu’il aimait tant, il parla à Radio Rome durant la seconde guerre mondiale, incitant les USA à ne pas entrer dans le conflit puis se faisant l’avocat d’une paix honorable. Lorsque l’Italie fut envahie par l’armée US avec l’aide de la mafia italienne, Pound fut arrêté, enfermé dans une cage exposée aux intempéries. On n’oubliera pas qu’aux Etats-Unis il fut condamné à la prison pour trahison. Parce que le monde de la culture devait beaucoup au poète, quelques personnalités dont Hemingway, qu’on saluera donc au passage, obtinrent son transfert dans un hôpital psychiatrique. Lorsqu’il put enfin sortir, il abandonna les USA au profit de l’Italie qui avait été une Patrie adoptive. En arrivant il promit de ne plus faire de déclarations, après avoir affirmé que finalement il avait pu sortir d’un asile d’aliénés peuplé de 180 millions d’habitants. On se souviendra aussi qu’en descendant du bateau Christophe Colomb qui le déposa à Naples le 9 juillet 1958, il salua à la Romaine sa patrie d’adoption.



Un écrivain maudit


Si Pound n’est pas apprécié dans les médias, la raison en est son immense lucidité. Il a accepté la responsabilité historique d’écrire à contre courant, d’être un rebelle à temps complet. Son talent secouait la médiocrité et le mensonge. Son œuvre fonctionne comme un miroir dans lequel les trafiquants voient leur infâmie. Tout cela a été délégitimé par l’industrie du spectacle et les prédicateurs médiatiques. L’écrivain contemporain, celui pour qui les lobbys obtiendront un prix “ en souvenir de Nobel”, n’est plus qu’un propagandiste du meilleur des mondes. Pound reste l’ultime manifestation de l’esprit, incarne l’aède antique même si en ce moment les shopping center ont remplacé le forum.

Mais l’œuvre est là, les “Cantos prohibidos” contre l’usure ont été formulés, le poète est toujours debout, immortel. Il en sera ainsi jusqu’à ce que ces chants fassent tomber les murs des marchés spéculatifs, envoient les usuriers dans des marmites remplies d’eau où ils finiront en bouillie comme l’ont mérité, au cours du temps nombre, de faux-monnayeurs.


 

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