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vendredi 21 mars 2014

Municipales : les points chauds du premier tour

Tiphaine Le Liboux 
Municipales : les points chauds du premier tour
 
Quelles sont les grandes villes qui pourraient basculer à droite et à gauche ? Celles qui font figure de test pour les différents partis ? Celles où les affaires pèseront sur le scrutin ? Où y a-t-il des dissidences qui viennent concurrencer le leadership local ? Tour d'horizon des grandes villes à enjeux.
Le 14e arrondissement de Paris : la campagne de NKM en miniature

« Nathalie Kosciusko-Morizet joue sa peau dans le 14e arrondissement », a récemment commenté Jean-Pierre Raffarin. « Si elle le gagne et qu'elle perd le global, l'honneur est sauf. »
Prendre Paris relève désormais de l'exploit pour l'UMP, alors que sa candidate a multiplié les erreurs de com' et les ratages durant la campagne.

Même dans le 14e où elle se présente, NKM risque d'être battue. Confrontée à une quinzaine de dissidences dans la capitale, l'adversaire de la socialiste Anne Hidalgo, n'a pas non plus réussi à empêcher l'UMP Marie-Claire Carrère-Gée de constituer sa propre liste dans cet arrondissement emblématique.

Présenté comme un arrondissement de reconquête pour la droite, le 14e est dirigé par la gauche depuis plus de dix ans. Au premier tour, la socialiste Carine Petit est créditée de 55 % d'intention de vote. C'est dix points de plus qu'au début du mois de février.

Marseille : la victoire se joue dans quelques quartiers


A la tête de deux tiers des villes de plus de 100 000 habitants, le PS ne peut espérer reprendre qu'une seule grande ville à la droite : Marseille. Comme à Paris et Lyon, dans la deuxième agglomération de France le mode de scrutin est particulier. Le nombre d'élus varie en fonction des secteurs administratifs partageant ces trois villes, et le maire n'est pas forcément le candidat qui obtient le plus grand nombre de voix au total.

A Marseille, droite et gauche détiennent aujourd'hui chacune quatre secteurs (réunion de deux arrondissements), pour un conseil municipal comptant 51 conseillers de droite, 49 de gauche et un élu Front national. Le basculement d'un secteur peut donc déterminer l'élection.

Pour devenir maire et empêcher l'UMP sortant, Jean-Claude Gaudin, d'être élu pour un quatrième mandat consécutif, le socialiste Patrick Mennucci concentre ses efforts sur les 3e et 6e secteurs, ceux qui ont le plus de chance de basculer. Le PS pourrait gagner le 6e secteur si le dissident UMP, crédité de 13% des intentions de vote au premier tour décidait de se maintenir au second.

Dans le 3e, le dernier sondage en date (IFOP pour 20 Minutes et i-Télé, 18 mars) confirme la tendance observée dans quatre précédentes études : la candidate PS, Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée aux personnes handicapées et à la lutte contre l'exclusion est donnée victorieuse au second tour, avec 43 % des voix.

La gauche peut espérer gagner dans trois des quatre secteurs tenus par la droite, mais elle est fragilisée dans le 2e, par une dissidence PRG, soutenue par le sénateur et président du conseil général socialiste Jean-Noël Guérini, plusieurs fois mis en examen et en cours d'exclusion au PS.

Hénin-Beaumont : la ville test du FN


S'il a présenté un nombre record de 596 listes, le FN n'espère vraiment gagner que dans un tout petit nombre de villes. Hénin-Beaumont en fait partie.

Dans cette ancienne cité minière du Pas-de-Calais dont Marine Le Pen se sert comme ancrage populaire, le secrétaire général du Front national, Steeve Briois, candidat à toutes les municipales depuis dix-neuf ans, part cette fois légèrement favori.

Maillage militant du territoire, prise en charge des affaires quotidiennes des habitants, et volonté d'apparaître comme le seul recours au « tous pourri », dans la ville où le maire PS, Gérard Dalongeville, condamné pour clientélisme, a dû abandonner son fauteuil en cours de mandat, Hénin-Beaumont fait figure de ville test pour la stratégie politique du FN.
Pau : le quitte ou double de François Bayrou


François Bayrou à Pau le 7 novembre 2013, lors de l'annonce de sa candidature à l'élection municipale.

Les 23 et 30 mars, François Bayrou joue gros. Après avoir échoué deux fois à conquérir la ville (en 1989 et 2008) et candidat déçu aux législatives de 2012, le co-président de l'alliance centriste Alternative UDI-MoDem, part cette fois favori face au député PS David Habib.

François Bayrou s'est allié avec le candidat UMP Eric Saubatte, malgré les réticences du président de l'UMP, Jean-François Copé. Donnant à contrecoeur son accord à cette alliance, le chef de l'UMP refuse toujours d'apporter son soutien à un François Bayrou qu'il accuse d'être l'un des « artisans de la défaite » de Nicolas Sarkozy en 2012. Le patron du MoDem avait, dans l'entre-deux tours, pris position en faveur de François Hollande.

L'UMP dénonce aussi le laissez-faire du chef des centristes dans certaines villes, Dijon par exemple, où les élus MoDem sont engagés dans des alliances avec la gauche depuis 2008.

Montreuil : la bataille des gauches


La droite n'a aucune chance à Montreuil (Seine-Saint-Denis), mais depuis l'annonce surprise de l'actuelle maire EELV, Dominique Voynet, de ne pas se représenter, la gauche n'a pas réussi à s'entendre.

Résultat, sur les huit listes qui s'affrontent, sept sont de gauche.

Il y a Jean-Pierre Brard, l'ancien maire communiste de la ville qui part sans le soutien de son parti le PCF, qui a investi Patrice Bessac. Face à eux, Razzy Hammadi, qui a ravi en juin 2012 le siège de député de Patrice Brard, mais qui n'a pas réussi à convaincre Mouna Viprey, une ancienne du PS, de le rejoindre.

Grenoble : EELV défie le PS


A Grenoble, EELV entend détrôner les socialistes à la tête la ville depuis 1995. Les écologistes se sont alliés au Parti de gauche et un collectif de citoyen ; le PC ayant lui rejoint la liste de Jérôme Safar, premier adjoint du maire PS sortant, Michel Destot. Alors qu'EELV a acté le principe de liste autonome au premier tour pour les villes de plus de 100 000 habitants, à Grenoble les écologistes ne veulent pas encore se prononcer sur le second tour. Arrivés en troisième position en 2008, ils avaient fait le choix de se maintenir.

Strasbourg : la grande ville que la droite espère reprendre au PS


Comme Toulouse, Strasbourg fait partie de ces villes dirigées par un maire PS que l'UMP espère reprendre. Mais la victoire ne sera pas facile. Le dernier sondage donne le sénateur et maire PS sortant, Roland Ries, et Fabienne Keller, candidate sous l'étiquette UMP-MoDem à égalité. Tous deux sont créditées de 50 % des suffrages, en cas de duel au second tour.

Si le PS devra faire sans les écologistes, la droite est fragilisée par la candidature UDI de l'ancien ministre du commerce extérieur puis de l'industrie (2002-2007) François Loos qui a décidé de se maintenir. Venu soutenir le lancement de la campagne du candidat en avril 2013, Jean-Louis Borloo a fait de Strasbourg un objectif prioritaire pour son parti.

Béziers : Ménard exempté de front républicain


Robert Ménard, fondateur de Reporters sans frontières et à la tête d'une liste soutenue par le Front national recueillerait 38 % d'intention de vote au premier tour, selon un sondage IFOP du 14 mars. Il devancerait ainsi la liste du député UMP Elie Aboud (34 %) et le socialiste Jean-Michel du Plaa (21%).

Une triangulaire se profile donc au second tour et l'hypothèse du front républicain pour faire barrage au candidat FN, ne tente ni le PS ni l'UMP. Malgré la consigne officielle de Solférino, la gauche locale, dans l'opposition depuis dix-neuf ans, ne veut pas se sacrifier et disparaître pendant six nouvelles années de la vie municipale.

De toutes façons, l'UMP ne veut pas du soutien de son rival, conforme en cela à la position officielle du parti de Jean-François Copé. Ne prendre parti ni pour l'extrême droite ni pour la gauche en cas de triangulaires.

Cannes : les deux UMP s'affrontent


Dans un département qui abrite l'une des plus grosses fédérations UMP de France, les élections municipales voient se reproduire, à l'échelle locale, la bataille qui a opposé Jean-François Copé et François Fillon pour la présidence de l'UMP.

Résultat, pour le premier tour, l'UMP n'a donné son investiture ni à David Lisnard, soutenu par François Fillon, ni à Philippe Tabarot, soutenu par Jean-François Copé. Nicolas Sarkozy a aussi choisi son candidat. A l'occasion du concert cannois de sa femme Carla Bruni, il a donné son soutien à David Lisnard.

Corbeil-Essonnes : les affaires ne profitent pas à la gauche divisée


Malgré les soupçons d'achats de vote, le sortant Jean-Pierre Bechter (UMP-UDI), qui a, en dernière position sur sa liste, le sénateur UMP Serge Dassault, entend garder la ville.

Mis en examen, le 17 janvier, pour « recel du produit d'infractions d'achats de votes », « financement illicite de campagnes électorales », « acceptation de dons » et « dépassement du plafond des dépenses électorales », le bras droit de Serge Dassault arriverait en tête avec 51 % des voix au second tour, selon un sondage IFOP pour 20 Minutes et i-Télé.

Il peut compter sur une gauche qui partira en ordre dispersé. Côté PS, Carlos Da Silva, le suppléant de Manuel Valls à l'Assemblée, conduit une liste rassemblant aussi EELV et quelques communistes. Contre lui, la candidature dissidente PS de Martine Soavi. Et, candidat déçu en 2001, 2008, 2010, le communiste Bruno Piriou, soutenu par le PCF.

Aix-en-Provence : la droite défaite par les affaires


La maire sortante et figure de la droite provençale Maryse Joissains-Masini est non seulement affaiblie par une enquête sur d'éventuels emplois fictifs, mais également par des dissidences. Si l'actuelle maire d'Aix-en-Provence devrait sortir en tête au premier tour, l'issue du second tour est encore très incertaine.

En plus de la liste PS, menée par Edouard Baldo, deux autres listes, créditées chacune de 10% d'intentions de vote selon un sondage Ipsos France3-La Provence du 18 mars, sont en mesure de se qualifier pour le second tour : la liste du Front national conduite par Catherine Rouvier et celle de l'ex-MoDem François-Xavier de Peretti. Le centriste compte plusieurs socialistes sur sa liste. Il pourrait fusionner avec celle du PS entre les deux tours.
Bastia : le retour des nationalistes


A Bastia, le nationaliste Gilles Simeoni pourrait faire tomber la dynastie Zuccarelli – du nom du maire PRG sortant –, au pouvoir depuis un demi-siècle. Fils du leader historique du FLNC, Edmond Simeoni et avocat d'Yvan Colonna, Gilles Simeoni table sur les divisions de la gauche pour l'emporter. Deux listes de radicaux de gauche sont engagées dans la bataille. Celle du « fils spirituel », François Tatti, l'un des adjoint du maire Emile Zuccarelli, et celle de Jean Zuccarelli, son véritable fils.

Les nationalistes sont aussi en position de force à Ajaccio, où ils sont appelés à jouer les arbitres entre Simon Renucci, le maire divers gauche sortant, et Laurent Marcangeli, le challenger UMP au second tour. Ajaccio est la seule grande ville de Corse où les différents courants nationalistes sont parvenus à sceller un accord.
 
Notes: