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dimanche 4 mars 2018

Latin et grec ancien dans le secondaire : trop beau pour être vrai !

Une circulaire du ministère de l’Éducation nationale vient de paraître au Bulletin officiel pour éclaircir la position des LCA (langues et cultures de l’Antiquité, c’est-à-dire l’enseignement du latin et du grec ancien) au collège et au lycée. 

Il semble que Jean-Michel Blanquer veuille frapper un grand coup et réaliser les rêves les plus audacieux des enseignants de lettres classiques : il rappelle que cet enseignement doit être « résolument ouvert à tous », « sans considération [du] niveau scolaire dans les autres disciplines » de l’élève souhaitant suivre un enseignement de langues anciennes, que cette possibilité doit également être offerte aux élèves qui veulent apprendre une troisième langue vivante ou encore intégrer une classe bilangue en collège et une section européenne en lycée, que les horaires doivent être adaptés pour que ces cours ne soient pas systématiquement placés en début, en fin de journée ou sur la pause méridienne, que l’option peut être ouverte sans quota minimal d’élèves, qu’on évitera les regroupements sur trois niveaux et que, si l’on devait les regrouper, cela ne devrait pas avoir pour conséquence la réduction de sa quotité horaire d’enseignement, que les horaires en collège peuvent être adaptés en fonction du projet pédagogique de l’enseignant ; ainsi, en latin, on pourra utiliser les horaires prévus par le ministère, 1 h en 5e et 3 h en 4e et 3e, ou bien réorganiser les horaires pour utiliser 2 h en 5e et 3e et 3 h en 4e, par exemple. La circulaire confirme également que les LCA peuvent être considérées comme des enseignements facultatifs et des EPI (enseignements pratiques interdisciplinaires).
En résumé, le bonheur sur Terre !

 Mais il faudra demander à monsieur Blanquer si cette circulaire, qui s’applique en l’état actuel de l’enseignement au collège et au lycée, ne sera pas rendue totalement obsolète par la réforme du lycée en cours, ce qui aurait un impact inévitable sur cet enseignement au collège, à plus ou moins long terme. 

On peut également s’inquiéter de la section 4.1 de cette circulaire qui informe qu’une certification complémentaire de latin ou de grec ancien pourra être demandée, à partir de la rentrée 2018, par des enseignants de lettres modernes, de langues, d’histoire-géographie et de philosophie qui voudraient enseigner le latin ou le grec ancien, dans l’hypothèse où l’établissement ne disposerait pas d’enseignant de lettres classiques, précise la circulaire. Mais il existe déjà la possibilité d’obtenir une mention complémentaire et cette démarche concerne toutes les disciplines, pas seulement le latin et le grec ancien, tandis que la certification complémentaire était réservée jusqu’ici aux enseignements artistiques pour lesquels il n’existe pas de concours spécifique (cinéma et danse, par exemple), au FLE (français langue étrangère) et à la DNL (discipline non linguistique, c’est-à-dire, par exemple, l’enseignement de l’histoire-géographie en anglais). Le danger réside donc en ce que la spécificité des enseignants de lettres classiques se diluerait, voire disparaîtrait au profit de disciplines qui paraîtraient plus pragmatiques. Mais rassurons-nous : les crédits pédagogiques de lettres classiques resteront indépendants de ceux de lettres modernes, pour l’instant… 

Restons donc vigilants devant des effets de manche, certes démonstratifs, mais qui pourraient se révéler n’être qu’un arbre conservateur qui cache la forêt progressiste.

Bertrand Dunouau

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