Pour faire bonne mesure, on a rappelé in extremis, Madame le ministre
Florence Parly de son lieu de vacances, laquelle a pu ainsi honorer la
cérémonie de sa présence et nous sauver du déshonneur total.
Il y a cent ans, le 8 août 1918, commençait la bataille d’Amiens,
bataille décisive qui marquait le début d’une offensive majeure des
Alliés face à l’Allemagne. L’opération engageait des troupes
britanniques, canadiennes, australiennes et françaises.
L’opération fut un succès et signa le début du recul
allemand. Au prix néanmoins de lourdes pertes : 46 000 morts parmi les
troupes franco-britanniques contre 40 000 morts du côté allemand.
Il est dans la culture britannique de commémorer les victoires
militaires parfois avec complaisance, parfois avec une vision discutable
de l’Histoire, en parfait contraste avec notre indifférence. Ainsi,
outre-Manche, Dunkerque est une humiliante reddition française.
Quasiment une victoire stratégique pour eux. Le récent film Dunkerque
en témoigne fort bien. Les Britanniques célèbrent Trafalgar. Nous
refusons de fêter Austerlitz. Mieux encore : c’est un acteur américain
qui incarne Napoléon tandis que nous envoyons des navires pour fêter le
200° anniversaire de la victoire de l’amiral Nelson.
Un certain politiquement correct historique est passé par là : Napoléon
est celui qui a rétabli l’esclavage aux Antilles. De la Première Guerre
mondiale, un courant d’historiens a surtout voulu retenir les mutineries
de 1917 et les fusillés pour l’exemple.
Sans doute est-ce dans cette logique que s’inscrit l’absence d’Emmanuel
Macron ou, à la rigueur, celle d’Edouard Philippe, pour accueillir le
Prince William et la Première ministre Theresa May, venus aujourd’hui,
ainsi que de nombreux diplomates canadiens, américains et australiens,
commémorer cette bataille dans la magnifique cathédrale d’Amiens.
Je l’avoue, j’ai une fâcheuse tendance à l’exagération. La France, bien
sûr, a pris sa part dans cette commémoration et n’a pas lésiné sur les
moyens. La cérémonie d’hommage s’est faite en la présence de Geneviève
Darrieusecq en personne. Geneviève qui ? La secrétaire d’Etat aux
Armées. Et pour faire bonne mesure, on a rappelé in extremis, Madame le
ministre Florence Parly de son lieu de vacances, laquelle a pu ainsi
honorer la cérémonie de sa présence et nous sauver du déshonneur total.
Le Maire d’Amiens, Brigitte Fouré, a fait part de sa déception. Certains
élus picards n’ont pas hésité à parler de « faute diplomatique ». Faute
diplomatique sans aucun doute : c’est conforter l’image d’une France
oublieuse et ingrate, trop heureuse d’appeler les Anglo-Saxons à la
rescousse et qui ne pense même pas à dire merci. Faute historique :
c’est une occasion perdue de rappeler – et pas seulement aux plus jeunes
– ce que fut cette campagne. Faute humaine surtout car il ne s’agit pas
seulement de retirer une facile gloriole d’une victoire fût-elle
majeure mais surtout de rappeler à notre souvenir et notre conscience
nationale, ce que nous devons aux soldats tombés sur la plaine picarde,
et aussi sur les champs de Flandres, et au fort de Verdun… Et la liste
serait longue, elle risquerait de durer quatre ans.
Mais que l’on se rassure. Emmanuel Macron a un mot d’excuse. De la part
du directeur de la Mission du Centenaire de la Première Guerre mondiale,
Joseph Zimet, qui explique que le Président est présent à de nombreuses
commémorations de la Première Guerre mondiale et ne saurait être
partout.
Florence Labbé pour ripostelaique.com