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jeudi 9 août 2018

Restaurateurs et hôteliers veulent embaucher des migrants !



Restaurateurs et hôteliers veulent embaucher des migrants !
Illustration : « Christy », cuisinier tamoul du café Le Paris (Streetpress)

Notre gastronomie est inscrite sur la liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité de l’UNESCO.
« Le repas fait partie de l’identité des Français. Il est aussi bien normand, provençal que bourguignon ou alsacien. « Par ailleurs, la gastronomie française est ouverte à d’autres influences, extrêmement variées, qui peuvent générer de nouvelles saveurs. C’est une notion d’ouverture dont il faut tenir compte, en adéquation avec la réalité d’aujourd’hui », observe Hubert de Canson, délégué permanent adjoint de la France auprès de l’UNESCO. »
Pour certains, la gastronomie française, c’est donc aussi la fondue chinoise à la noix de St-Jacques de Normandie, le döner kebab halal à l’agneau de l’Aveyron ou le poulet de Bresse sauce arachide…
A ce titre, les restaurateurs et hôteliers, soucieux de s’engager dans cette notion d’ouverture à l’autre, et confrontés à une pénurie de personnel, souhaiteraient pouvoir embaucher 130 000 migrants. Car en effet, dans un pays comptant plus de 3 millions de chômeurs, les Français boudent mystérieusement les métiers de plongeurs, serveurs ou cuisiniers.

Les restaurateurs veulent pouvoir embaucher des migrants

« 130 000 emplois sont à pourvoir dans le secteur de l’hôtellerie-restauration. » Le constat, dressé par Didier Chenet, président du Groupement national des indépendants (GNI) hôtellerie-restauration, est alarmant : restaurants et hôtels peinent à recruter.
En cause, selon Gaëlle Missonier, porte-parole de l’Union des métiers de l’hôtellerie (Umih) : la mauvaise image de ces professions et les conditions de travail souvent pénibles. « Aujourd’hui, les gens ont tendance à penser que si tu n’es pas bon en classe, tu finis dans l’hôtellerie-restauration », déplore-t-elle.
Didier Chenet abonde dans ce sens : « Ils boudent de plus en plus certains postes difficiles, comme celui de plongeur, par exemple. »

Et si l’une des solutions à cette pénurie de main-d’œuvre était d’embaucher des migrants ? C’est l’idée présentée par les professionnels du secteur au gouvernement, le 19 juillet dernier, à l’occasion du Conseil interministériel du tourisme.

« Les restaurateurs et les hôteliers sont dans les starting-blocks, explique Didier Chenet. On attend maintenant du gouvernement qu’il donne des papiers à ces personnes. La formation, le boulot, on est là pour les fournir. »
http://www.leparisien.fr/economie/les-restaurateurs-veulent-pouvoir-embaucher-des-migrants-05-08-2018-7844235.php
Et un salaire correct, des conditions de travail intéressantes, les restaurateurs et hôteliers peuvent-ils les fournir également ? Et la baisse de la TVA de 19, 6% à 5,5 % en 2009 , l’ont-ils un jour répercutée sur les prix à la consommation ?
La France reçoit plus de 80 millions de touristes : quels sont les hébergeurs en manque de « petites mains » soudanaises et érythréennes ? Le propriétaire d’une chambre d’hôte ou les hôtels pas chers des abords d’autoroutes ?
Et qui veut à tout prix son migrant-esclave ? La petite auberge de province ? Le restaurant gastronomique travaillant avec des producteurs locaux ? Ou bien les milliers de gargouilles à touristes, les bouis-bouis à mets préparés/surgelés ou les chaînes de restauration rapide (McDo, Quick halal, Subway, KFC…) et autres « food truck » à la mode ?
Un exemple parmi d’autres : ces cuisiniers et plongeurs de la communauté tamoule de Paris.
« Anushan, second de cuisine dans un restaurant « bistronomique » (tarif du steack tartare : 18 €) du Marais, vit à Saint-Ouen avec sa femme et ses deux enfants. Même chose pour Regan et pour Christy, plongeur/cuisinier au Paris.
Pourquoi autant de Tamouls dans les cuisines de Paris ? Un gérant, qui veut rester anonyme, répond d’abord que ce sont « essentiellement des Sri-Lankais et des Maliens » qui répondent lorsqu’il poste une offre d’emploi. Beaucoup de restaurateurs cherchent des Sri-Lankais [car] ils demandent moins et travaillent mieux.
Dans les faits, c’est un type qui sait se servir d’un micro-ondes. Au café Le Paris, on vient de commander un rôti de porc. En deux minutes, Regan reproduit sous nos yeux ces gestes qu’il connaît par cœur : découper trois tranches de porc que l’on disposera dans l’assiette. Ajouter trois grosses cuillères d’un gratin de pommes de terre préalablement préparé et stocké dans un Tupperware orange. Placer l’assiette dans un four micro-ondes. Sous ce micro-ondes, un jumeau se charge de réchauffer la sauce au poivre. Une minute trente passée, c’est chaud. Verser la sauce, ajouter quelques feuilles de salade aspergées d’une vinaigrette en bouteille. Et histoire de donner une touche gastro : disperser de la poudre de paprika sur les contours de l’assiette. Déposer le plat près de l’ouverture donnant sur la salle et faire tinter la clochette.
Comme les autres, Regan explique avoir appris « sur le tas ». La cuisine est rarement une vocation. A priori, le destin d’Anushan n’était pas de préparer des cochons de lait au romarin et aux olives à 27 € pour les hipsters du Marais : « Dans ma famille, on est menuisiers. »
Regan et Christy, les deux cuistots du Le Paris, sont sur le pont depuis sept heures et ne débaucheront pas avant 16 heures. Au total plus de 45 heures par semaine, payées environ 1 500 euros. Les Tamouls « c’est une main d’œuvre pas chère et qui bosse », vante le gérant du « resto bistronomique ». Et ils acceptent d’être ultra-flexibles : « Les Français imposent des conditions, or je ne peux pas faire un planning à la carte. »
Ils acceptent de travailler pour « 4 ou 5 euros de l’heure », explique Tharshan, de l’ORT. Leur méconnaissance du français les bloque dans leur carrière, quand elle ne se retourne pas tout simplement contre eux. Devant un Léon de Bruxelles du quartier Opéra, on rencontre Chakram. Habillé d’un élégant costume violet, ce cuisinier d’origine bangladeshie et délégué CGT raconte une pratique courante pour se débarrasser des employés qui demanderaient de meilleures conditions de travail : « Si quelqu’un parle au directeur, comme il ne parle pas bien français, le directeur dit qu’il s’est fait insulter. Ça se fait beaucoup. »


Pas sûr, en effet, de donner envie aux chômeurs français de s’engager dans la restauration. Mais ces 130 000 « migrants », une fois installés en France, munis de papiers et bénéficiant de notre généreuse protection sociale, continueront-ils vraiment à trimer dur pour pas cher ?