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lundi 15 janvier 2018

NOËL, FÊTE CULTURELLE ET RELIGIEUSE

Noël est sans doute la fête qui condense le plus l’identité de notre civilisation. C’est la commémoration joyeuse de la nativité du Christ, mais comme la date de cet événement est inconnue, elle a été fixée, avec une erreur de quelques jours, au solstice d’hiver. Ce choix lui a permis de se confondre avec les cultes païens qui étaient pratiqués dans l’Empire romain, celui de Mithra, celui du « Soleil Invaincu ». La naissance de Jésus, unique dans l’Histoire, venait ainsi correspondre à la renaissance annuelle du soleil. Avec la christianisation du monde romain puis de l’Europe païenne, la fête chrétienne de Noël s’est substituée aux festivités qui accompagnaient la reconquête du jour sur la nuit.
Cette fête a donc le privilège d’être à la fois celle d’une foi à vocation universelle et celle d’une aire géographique pour laquelle les saisons sont marquées. La religion chrétienne est avant tout un culte des pays tempérés où l’agriculture et la vie sédentaire dominent. Le catholicisme en a été la parfaite illustration. La crèche provençale et ses santons l’incarnent à merveille. Le Noël de l’hémisphère sud est, dans le fond, plus « purement » chrétien puisque le régime climatique y est inversé. Et cela permet de mieux percevoir le sens que prend cette fête quand la naissance du Christ remplace la renaissance du Soleil. Le temps linéaire de l’Histoire, où les événements ne se produisent qu’une fois, prend le pas sur le temps cyclique des civilisations-horloges.

La venue du Messie a une signification pour l’ensemble de l’humanité, quels que soient les climats sous lesquels elle vit. Elle donne un sens à son histoire, et à la vie de chaque homme, celui de la rédemption par l’Amour. Amour de Dieu pour ses créatures, adoration des hommes pour leur Dieu, fût-il un enfant dans une étable, et charité des humains les uns envers les autres. Le christianisme est une religion universelle qui s’adresse à la liberté de chaque homme. Il ne prétend pas au royaume terrestre, mais seulement à guider chaque personne vers son salut, en s’appuyant sur le témoignage du Christ des Évangiles. Si cette vocation n’est pas directement politique – loin s’en faut -, elle revêt, en raison même de la nature sociale de l’homme, une dimension collective. L’Église l’a rappelé à de maintes reprises. L’encyclique de Benoît XVICaritas in veritate demeure un monument à cet égard. Il y a, dans ce texte, une exigence d’équilibre et de responsabilité qu’on aimerait toujours voir à l’œuvre dans des déclarations plus récentes. Le Saint-Père rappelait notamment la spécificité du christianisme, son originalité absolue que d’aucuns auraient tendance à estomper : « La liberté religieuse ne veut pas dire indifférence religieuse et elle n’implique pas que toutes les religions soient équivalentes. »
L’une des particularités de la religion chrétienne que Benoît XVI rappelait constamment était son appui sur la foi, mais aussi sur la raison. La charité doit être vraie, sincère, mais elle doit aussi se soucier de la réalité, de la vérité des faits et des choses. Le jugement du dernier pape sur les migrations semblait, par exemple, plus réaliste que l’étonnante comparaison faite entre les migrants, pour la plupart économiques et sans famille, avec la situation de la sainte Famille fuyant le meurtre des nouveau-nés.« Les énormes flux migratoires, souvent provoqués et ensuite gérés de façon inappropriée », écrivait le Saint-Père qui, dans son encyclique, appelait au développement, non à l’assistance, au respect des droits des migrants, non à l’encouragement d’un phénomène « provoqué » par les intérêts que la mondialisation met en jeu. La volonté d’éradiquer les signes de l’identité chrétienne, et même pré-chrétienne, de notre culture, et l’accueil d’un nombre trop important de migrants étrangers à notre civilisation et dont certains professent une religiosité hostile à celle-ci, sont les signes inquiétants d’un aveuglement irresponsable jusqu’à être suicidaire.
Le christianisme rendu à lui-même apporte beaucoup au monde, mais à condition qu’il ait encore la possibilité d’être lui-même, préservé des deux menaces que dénonçait Benoît XVI : le laïcisme et le fondamentalisme.