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mercredi 17 janvier 2018

Si la droite française suivait l’exemple du chancelier autrichien…

Rencontre et conférence de presse commune, vendredi, à l’Élysée, entre Emmanuel Macron et Sebastian Kurz, le nouveau chancelier d’Autriche. Rencontre peu ordinaire : le leader du parti populaire autrichien (ÖVP) s’est allié au FPÖ, qui fait partie du même groupe que le Front national au Parlement européen. Front national que notre Président considère comme l’ennemi n° 1. 

« Les faux jumeaux au chevet de l’Europe », selon Europe 1. En fait, ils ne se ressemblent en rien. Le chancelier autrichien, à 31 ans, donne une leçon de précocité politique. Notre Président, qui vient de fêter ses 40 ans, déjà marqué par ses premiers mois de mandat, paraît presque vieux à côté de lui. Sur l’Europe, principal objet de leur rencontre, d’importantes divergences, même si, dans les mots, elles sont atténuées, plus par intérêt politique que par courtoisie diplomatique.
Kurz, dans ses déplacements internationaux, fait passer Macron avant Angela Merkel, qui n’a pas encore formé son gouvernement avec le SPD (version de l’UMPS à l’allemande), flattant ainsi son narcissisme. Pour lui couper l’herbe sous le pied, il affirme vouloir mener une politique pro-européenne : il faut le juger « sur son programme et sur ses actes ». Il veut surtout limiter les transferts de pouvoir vers Bruxelles et freiner l’immigration. Rappelons qu’il fut l’un des initiateurs de la fermeture de la route des Balkans.
Bref, il fait ce que demandent la majorité des Autrichiens : un peu plus de souveraineté et moins d’immigration. Ce libéral est, à coup sûr, un populiste, dangereux pour la démocratie !
 Macron ménage celui qui doit prendre, le 1er juillet, la présidence de l’Union européenne. S’il ne fait pas d’allusion précise aux affaires intérieures d’Autriche, il glisse tout de même qu’il « déplore l’extrême droite partout » et la combat en France. Ajoutant : « Mais, si elle est là, c’est que nous avons échoué à répondre aux angoisses dont elle se nourrit. » Il est persuadé qu’avec « davantage d’Europe », tout ira mieux. Comme si on pouvait soigner un mal par le mal. C’est tout le fonctionnement de l’Europe qu’il faudrait revoir !
Emmanuel Macron devrait pourtant s’interroger davantage sur la signification de l’alliance du nouveau chancelier autrichien avec le FPÖ. Elle n’est pas simplement de circonstance : bien avant les élections, Sebastian Kurz tenait ses positions sur la souveraineté et l’immigration. Par son existence même, elle constitue un argument de poids pour ceux qui, en France, souhaitent un rapprochement entre le parti Les Républicains de Laurent Wauquiez et le Front national.
Macron, lancé par un gouvernement socialiste, fait une politique économique de droite tout en étant soutenu par une partie de la gauche. Il rectifiera sans doute le cap sur les questions sociétales. Qu’attendent Laurent Wauquiez et Marine Le Pen pour s’associer dans une action commune largement souhaitée par leurs électeurs ?
Si le président de LR est sincère quand il défend la France rurale, les classes moyennes et une économie libérale tempérée de préoccupations sociales, il n’est pas loin des thèses soutenues par le Front national. Bref, ils pourraient ensemble construire l’Europe des nations et rompre avec l’Europe technocratique de la finance. Pour fonder une telle coalition, quelques compromis seront nécessaires. Mais le compromis n’est-il pas le seul moyen de faire bouger les choses et d’aller de l’avant ?

Philippe Kerlouan

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