« (De Gaulle) un Machiavel de première force,
totalement dépourvu du moindre scrupule,
dès qu’il estime engagée la “raison d’État”
et selon les seuls critères que lui dicte son esprit »
Entretien avec Bernard Plouvier, préfacier du livre de Lucien Gallimand Origine et déviations du Gaullisme. De Gaulle agent de Reynaud ?, éditions Déternatotalement dépourvu du moindre scrupule,
dès qu’il estime engagée la “raison d’État”
et selon les seuls critères que lui dicte son esprit »
Bernard-Plouvier.
Il apporte des documents dont la plupart sont inédits et n’ont pas été repris par les auteurs universitaires et académiques… et l’on comprend pourquoi : ils contredisent en partie la présentation usuelle des faits de ces années de guerre. Le second intérêt de l’ouvrage est d’apporter une hypothèse singulière à propos des événements de l’été 40.
Car l’auteur n’est pas n’importe qui !
Fonctionnaire de l’Instruction publique, puis de l’administration préfectorale, Lucien Galimand parvient à se faire élire député radical-socialiste en 1936, dans la Chambre du Front Populaire. Il est particulièrement réceptif aux bruits de couloirs de la Chambre au mois de mai 1940. N’étant pas Franc-maçon, il vote sans état d’âme en juillet 1940 les pleins pouvoirs constitutionnels au maréchal Pétain. Il entre en Résistance en 1941, passe à Londres en 1943 et s’engage dans les Forces Françaises Libres. En 1944, il est officier à l’état-major des FFI, dirigé par le général Koenig. Ce n’est donc pas, loin s’en faut, un antigaulliste-né.
Lucien Galimand développe une hypothèse singulière sur le rôle de De Gaulle…
Elle tient en deux points : les deux compères Churchill et Reynaud s’entendent à la fois pour désigner un ou deux pantins, qui serviront de boucs-émissaires, de façon à faire signer une capitulation de l’armée de métropole, et pour continuer la lutte dans l’Empire français. Reynaud, belliciste acharné, est d’abord tout désigné pour servir de porte-étendard, mais il se trouve qu’un général de brigade à titre temporaire, réfugié en Grande-Bretagne le 17 juin, dénommé de façon plus que symbolique De Gaulle, a de remarquables dispositions et une forte attirance pour les jeux politiques.
C’est même un Machiavel de première force ?
Oui, totalement dépourvu du moindre scrupule, dès qu’il estime engagée la « raison d’État » et selon les seuls critères que lui dicte son esprit.
De simple « pion » dans le jeu Churchill-Reynaud, il passe au statut de premier résistant à l’armistice, puis d’emblème de la Résistance à l’ennemi. Un personnage historique de grande ampleur est né, qui transforme l’aventure pour le moins incertaine de la France Libre de l’été 40 en image d’Épinal, puis en épopée, utilisant au mieux de ses intérêts l’héroïsme des résistants de l’intérieur et celui des soldats de l’armée d’Afrique du Nord, qui vont se battre à merveille en Tunisie, en Italie, puis des côtes de Provence au Danube.
Galimand a l’immense mérite de nous présenter la préhistoire du phénomène.
(entretien recueillis par Fabrice Dutilleul, publié dans le quotidien Présent)
Origine et deviations du Gaullisme. De Gaulle agent de Reynaud ? Lucien Galimand, Éditions Déterna, collection « Documents pour l’Histoire », 184 pages, 25 euros. Pour commander ce livre, cliquez ici.
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