Rédigé par Philippe Maxence
Le premier tour de l’élection présidentielle a laissé
un goût amer à ceux qui espéraient une alternance paisible après le
quinquennat désastreux de François Hollande. Emmanuel Macron a remporté
la première manche et, vraisemblablement la seconde, si l’on tient
compte des nombreux appels à voter pour lui qui se sont succédé depuis
la proclamation des résultats le soir du premier tour. Certes, Marine Le
Pen sera son adversaire, mais elle était attendue. C’est même en
fonction de sa présence certaine qu’a été organisée la solution Macron.Le produit Macron
Lancé comme un produit voici un an, il aura réussi, malgré son jeune âge, son rôle de secrétaire général adjoint de l’Élysée sous François Hollande et de ministre de l’Économie sous le gouvernement Valls, à se présenter comme le rassembleur de ceux qui, à droite comme à gauche, veulent le « meilleur » des deux grandes familles politiques françaises. De manière certainement subliminale, le vote Macron traduit un espoir monarchique, le rêve d’un chef de l’État au-dessus des partis et libre de gouverner en fonction du bien commun, piochant au besoin dans les solutions de droite ou de gauche.Un réveil qui sera douloureux
Le réveil n’en sera que plus douloureux. Macron n’est que le « produit » d’appel du mondialisme et des grands groupes financiers. Pierre Bergé, Xavier Niel, Patrick Drahi, Jacques Attali, sont parmi ses principaux soutiens. Leur agenda est simple : continuer à déréguler la société française, à l’ubériser économiquement tout en imposant une ubérisation morale avec l’ouverture à la marchandisation du corps. Il n’est pas exagéré de voir en Emmanuel Macron un « Hollande 2.0 » ; une nouvelle version plus attrayante et plus performante du social-libéralisme-libertaire. Libéral au plan économique et libertaire au plan moral, le tout placé le temps de la transition, sous la conduite de l’État, selon la bonne conception dirigiste du socialisme.Soutenue par une bonne partie du petit peuple, Marine Le Pen aura du mal à faire le poids. D’abord parce que le système, ayant anticipé son score, a réagi pour éviter l’équivalent du Brexit ou de l’arrivée de Trump au pouvoir. Ensuite, parce que l’on ne gagne pas un second tour sans alliés politiques. Le Front national est électoralement le premier parti de France, mais il est seul. Sauf si les électeurs de Fillon et de Mélenchon décident de ne pas suivre les consignes de vote des appareils politiques. Dans l’état d’emprise médiatique dans lequel sont enserrés les Français, on voit mal comment les reports de voix seraient décisifs pour que la candidate du Front national l’emporte au second tour.
Que faut-il faire ?
Le véritable redressement de la France ne passera pas par une victoire électorale. Elle nécessite un véritable effort sur le long terme, une réforme intellectuelle et morale, de très grande ampleur. Est-elle possible ?Qu’elle soit absolument nécessaire doit suffire pour travailler dans ce sens. Il est urgent de remettre de l’ordre dans les concepts, de se libérer de la fascination électorale qui repose sur l’opposition entretenue des Français les uns contre les autres. Un jeune philosophe vient à ce titre de publier un essai remarquable qui mérite que l’on s’y attarde. Dans Souveraineté et désordre politique, vaincre le nihilisme (Cerf, 208 p., 19 €), Guilhem Golfin s’attaque de front au concept de souveraineté dont il montre bien à la fois ce qu’il recouvre aujourd’hui comme réalités à défendre et d’ambiguïté en raison de ses origines modernes, clairement anti-chrétiennes. Le travail d’éclaircissement qu’il a opéré à ce sujet, en recourant à la fois à la philosophie classique et à la pensée chrétienne, évite de se laisser entraîner dans les fausses solutions générées par le système tout en préparant l’avenir. C’est un modèle du genre, véritable facteur d’espoir.
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