Contrairement
à ce qu’affirment la vulgate officielle et quelques-uns de ses
perroquets marginaux affublés du titre complaisant de « dissidents », la
mondialisation est réversible et peut être mise en échec. À la
condition toutefois de préparer dans les faits, le quotidien et les
esprit une véritable alternative culturelle et comportementale.
Depuis 2011, IDées est la maison d’éditions du Bloc Identitaire.
Après avoir publié cinq ouvrages, voici le sixième : un recueil qui
entend bâtir un autre monde… riche en diversité authentique.
Anti-mondialiste pro-local se
veut un livre de combat à la fois pédagogique et réaliste. Les auteurs
partent d’un constat simple : la fin des années 1990 et le début des
années 2000 ont vu le triomphe médiatique de la contestation à l’égard
de la mondialisation libérale et de son bras armé idéologique, le
mondialisme. Mais cette vive opposition, incarnée en France par le
syndicaliste paysan José Bové, n’a pas encouragé l’enracinement et les
identités bio-culturelles. Bien au contraire ! D’abord «
anti-mondialistes », ses militants, sortis de la gauche radicale, de
l’extrême gauche et de l’écologie sociétale, se dénommèrent vite assez
rapidement d’« altermondialistes », c’est-à-dire favorables à « un autre
mondialisme donc, souligne Arnaud Naudin, se voulant une sorte
d’internationalisme bon enfant où toute forme d’affirmation identitaire
au sein du combat contre la globalisation serait non seulement mal vue
mais surtout combattue. Un internationalisme qui semble proclamer que
seuls les peuples du Sud bénéficient de ce fameux droit à disposer
d’eux-mêmes (selon la fameuse formule identitaire) (p. 9) ». Dès lors, «
ce livre est politique parce qu’il place les partisans de
l’altermondialisme face à leurs contradictions en arrimant la
relocalisation des activités à la relocalisation des êtres. Pour le dire
autrement, en affirmant clairement le lien entre localisme et identité
(p. 11) ». D’ailleurs, dans un extrait du programme pré-présidentiel
d’Arnaud Gouillon en 2012, on lit que les « altermondialistes […] ne se
veulent, comme leur nom l’indique, que des mondialistes alternatifs aux
libéraux (p. 15) ». Qu’ils soient ou non militants au Bloc Identitaire,
les identitaires dans toutes leurs sensibilités ont compris
l’importance de répliquer à la mondialisation par le thème novateur de
la démondialisation. On retrouve aussi dans ce volume une
recension du bref essai éponyme d’Arnaud Montebourg rédigé au moment des
primaires socialistes.
Avant même d’être économique, la démondialisation
est d’abord politique et culturelle. Est-ce ensuite étonnant que Arnaud
Naudin considère que « le politique doit primer sur l’économie (p. 10) »
? Animateur parisien du Projet Apache, Alban Ferrari s’attaque, lui, au multiculturalisme, ce terme mensonger qui désigne en réalité l’indistinction marchande des peuples et des êtres. Il promeut en revanche un véritable polyculturalisme
enraciné et rappelle à ce sujet que « la polyphonie des cultures n’est
pas antagoniste avec le besoin d’unité, dans le cadre d’une civilisation
commune. Dans notre cas, la civilisation européenne (p. 46) ». Ce
Francilien défend fort logiquement le maintien et la diffusion des
langues vernaculaires européennes qu’il ne faut pas confondre, comme le
font les « régionalistes progressistes », avec les langues accompagnant
l’immigration allogène de peuplement. « Pratiquer et transmettre une
langue régionale à ses enfants est une forme de résistance face à
l’uniformisation, écrit Alban Ferrari. […] Relocaliser la culture
langagière chez nous c’est défendre à la fois la langue française et les
langues françaises (p. 46). »
Principale figure du Bloc Identitaire,
Philippe Vardon-Raybaud se place volontiers sous l’identité et la
liberté afin de contrer l’uniformité et l’égalité. En s’affirmant «
Nissart, Français et Européen (p. 27) », il souligne une évidence pour
l’instant bien oubliée ces temps-ci : « L’Europe est une réalité
géographique, historique, culturelle, spirituelle et… ethnique (p. 28). »
Aussi constate-t-il que « si l’identité est un héritage, elle doit
aussi être une volonté (p. 29) ». Alban Ferrari traduit ce volontarisme
par la nécessité d’innover en puisant dans la riche trame mémorielle,
patrimoniale et culturelle ancestrale. « Créativité et audace au service
de son identité (p. 49). »
Citoyen
helvétique, Jean-David Cattin explique le fédéralisme et la démocratie
semi-directe en vigueur chez lui. Il en retrace l’histoire, mentionne la
courte guerre civile du Sonderbund en 1847 et ne cache pas que
les imperfections du système politique suisse subverti par des
organismes internationaux comme l’Union soi-disant européenne ou d’États
criminels tels les États-Unis d’Amérique, toujours désireux de
soumettre les peuples rétifs. Pour lui, « le peuple suisse ne vit donc
pas dans un paradis démocratique et n’est pas aussi libre et souverain
qu’il pourrait l’être, mais il est évident qu’en comparaison européenne
la Suisse est une anomalie qui pourrait peut-être servir de modèle ou en
tout cas d’inspiration pour l’Europe de demain (p. 86) ».
Mais la partie intellectuelle la plus féconde concerne le localisme, la décroissance et la relocalisation.
Cette dernière « est l’application d’autres règles que celles du libre
échange international […]. Face à l’uniformité des objets mondiaux
jetables et uniformes, elle secrète de l’authenticité, de l’art, de la
culture (p. 19) ». Écologique (et véritablement écologiste), la
relocalisation s’oppose « au mondialisme, sans tomber dans les travers
du nationalisme et de l’étatisme autoritaire, lointain et technocratique
(p. 20) ». Sa démarche s’inscrit dans le localisme, cette «
pratique saine puisqu’elle consiste, entre autres bienfaits, à
redynamiser l’économie d’un territoire (p. 40) ». « Se situant à la
jonction de l’écologie et de l’économie, le localisme est à même de
façonner un monde apaisé dans ses relations économiques, un monde plus
juste (p. 15). » Ainsi découle-t-il la singulière et originale
proposition d’« extraire du carcan étatique les solidarités collectives
(santé, retraites, etc.) pour les rendre locales et transparentes (p.
21) ».
Quant
à Julien Langella, il estime que le localisme rejette de manière la «
centralisation [qui] est un vampirisme : il saigne le pays et aspire
toutes ses forces vives, pillant les provinces comme les pays développés
(p. 63) ». Il tient surtout à développer une conception révolutionnaire
de la décroissance. Remarquant que « les décroissants actuels,
coincés entre leur filiation gauchiste – libertaire et leur apologie du
local, ne sont pas très à l’aise avec ces notions d’enracinement et de
terroir. Normal : c’est nouveau pour eux. La relocalisation a un “ rôle
stratégique ” au sein du projet décroissant : penser global, agir local
(p. 59) », il invite les identitaires à combattre la construction de
nouvelles lignes à grande vitesse, la diminution inquiétante des
surfaces arables (essentielles pour l’indépendance alimentaire) au
profit d’espaces bétonnés, le productivisme agricole, l’usage des
O.G.M., la privatisation du vivant par les multinationales prédatrices…
Il est évident que, pour Julien Langella, « la décroissance est notre
avenir obligé : mieux vaut anticiper et choisir de l’accompagner, pour
avoir son mot à dire dans l’élaboration de la société qui s’ébauchera
par la suite plutôt que subir les affres des restrictions, du
rationnement et du chaos social qui en résultera (pp. 57 – 58) ».
Comme
le relève Arnaud Naudin, « il n’est pas possible de dissocier
décroissance, souveraineté alimentaire, ou relocalisation des activités
industrielles de la question identitaire. En effet, promouvoir ces trois
principes revient à défendre la diversité, mais surtout le terroir,
l’enracinement, et donc à un moment ou un autre le substrat
ethnoculturel propre à chaque civilisation (p. 10) ». Une planète enfin
relocalisée est plus que souhaitable; elle est indispensable.
L’anti-mondialisme conséquent, fondamentalement identitaire – car
populaire -, a par conséquent un bel avenir devant lui !
Georges Feltin-Tracol
• Jean-David Cattin, Alban Ferrari, Julien Langella, Arnaud Naudin, Philippe Vardon-Raybaud, Anti-mondialiste pro-local, IDées, Nice, 2013, 89 p., 10 €.