L’enlèvement samedi 24 décembre 2016, à Gao, de la Franco-Suisse, Sophie Pétronin (66 ans), directrice de l’ONG d’aide à l’enfance Aide, illustre les aléas de la sécurisation du Mali, quatre ans après le déclenchement de l’opération «Serval», où l’on dénombre par ailleurs près de 200 «Casques Bleus» de l’ONU tués en mission dans ce pays durant cette même période.
La France et le Mali célèbrent le 11 janvier le 4e anniversaire de l’opération Serval pour la stabilisation du septentrion malien, alors que le pré carré africain de la France paraît gangréné par le djihadisme sahélien et que l’ordonnateur de l’intervention française au Mali François Hollande est en phase terminale de son unique mandat.
Cible régulière des coups de butoir des djihadistes, le Mali est soumis à de fortes pressions pour la ratification du traité de coopération en matière de défense entre la République française et la République du Mali, terme ultime d’un jeu de billard à trois bandes, initié par l’irruption du groupement djihadiste Ansar Eddine, dans l’échiquier malien.
La pression française est si forte que Paris n’a pas hésité à tout mettre en œuvre pour museler les contestataires au nouvel ordre post-colonial en voie d’imposition d’Aminata Dramame Traoré, la prestigieuse ancienne ministre de la Culture du Mali, au parlementaire Omar Mariko, chef du parti Sadi, tous deux interdits de séjour en France.
Ainsi donc un allié de fraîche date de la France, le Qatar, a entrepris la déstabilisation d’un allié de longue date de la France, le Mali, sans que l’ami des deux pays, la France, ne pipe mot sur la mauvaise manière faite par le nouveau riche à l’un des plus important contributeur de «chairs à canon» africain des deux guerres mondiales du XXe siècle. En toute impunité, sans la moindre action coercitive à son égard.
Mais l’instrumentalisation par le Qatar du groupe djihadiste Ansar Eddine contre le Mali a servi de prétexte à la France pour opérer un retour en Force sur la scène malienne et de s’exonérer à bon compte de son passif colonial.
Ce faisant, le Mali est perdant à double titre : Il a blanchi la France de son passif colonial et doit subir à nouveau la présence militaire française aux conditions de son ancien colonisateur, avec l’édification d’une base militaire à Kidal, dans le nord-Mali, la première depuis l’indépendance du pays, en 1960.
Quel crédit accorder dans ce contexte au privilège de juridiction invoqué par la France en faveur de ses nationaux, alors qu’elle fait preuve de sa grande mansuétude à l’égard du Qatar, le déstabilisateur du Mali, parallèlement à une lenteur anormale à actionner la machine judiciaire concernant les abus sexuels commis en Afrique par des soldats français fussent-ils des «Casques bleus».
La décision de l’Union Africaine de se doter fin janvier 2016, d’une juridiction inter-africaine spécifique pour juger les dirigeants africains coupables de crimes de guerre a constitué, dans ce contexte, un geste de défiance et de méfiance à l’égard des puissances occidentales, particulièrement de la France, qui n’hésite pas à envoyer devant le CPI, à La Haye, Laurent Gbagbo et protège Guillaume Soro.
La France qui a protégé toute sa vie durant Joseph Désiré Mobutu, malgré ses exactions, qui a aidé à l’intronisation impériale de Jean Bedel Bokasssa, réclame pour ses citoyens la protection juridique afin, non de les châtier, mais de les protéger contre leurs propres abus comme en témoigne la lenteur judiciaire dans mise en œuvre dans le châtiments des abus sexuels commis par les soldats de l’armée française dans des opérations de maintien de la paix en Afrique.
Pis, la référence dans le préambule du traité de Défense France Mali aux dispositions en vigueur à Djibouti et aux Comores est de mauvais augure car ces deux confettis d’empire sont tout bonnement des bases de souveraineté française sous une apparence d’état indépendant. Elle suggère en filigrane le sort réservé au Mali.
Le traité de défense est en fait un remake des Traités des Capitulations entre Solimane Le Magnifique et François 1er. François ternaire reproduit le même système en instaurant une immunité de juridiction à l’égard des Français, en excluant le Mali du bénéfice de la réciprocité. De sorte qu’un malien qui commet une infraction en France, sera prioritairement lynché à l’image du comique du début du XX me siècle «chocolat, battu mais content». Quitte à présenter des excuses à posteriori, pour un «affreux malentendu». La crainte n’est pas imaginaire.
Il en sera de même avec la coopération franco-africaine. Les pays fournisseurs de Djembé (Togo, Gabon) seront traités d’une manière obséquieuse à la Qatar, les autres, à la trique, «charters de la honte». Sinon comment expliquer la tolérance de François Hollande à l’égard de la corruption d’IBK, son partenariat avec le casinotier Michel Toumi, sinon que par le copinage de l’Internationale Socialiste.
La diaspora Malienne en France, rouage essentiel de l’économie malienne ; point de jonction avec la France
Amedy Coulibaly, l’assassin de la policière de Montrouge et le preneur d’otage de l’hyper cacher de la porte de Vincennes, en janvier 2015, de même que son compatriote malien, Lassana Bathily, le sauveur des otages de ce même hyper cacher, éclairent d’un jour nouveau la présence d’une importante diaspora malienne en France, un rouage essentiel de l’économie malienne, point de jonction avec la France, à l’arrière plan de l’opération Serval au Mali.
Si Serval (petit félin du désert) au Mali et Sangaris (papillon) en Centrafrique ont enrichi l’onomastique des opérations militaire en Afrique de deux codes-barres en 2013, bouleversant les données géostratégiques, ces deux interventions françaises dans son pré-carré, de même que les avatars électorales au Gabon ont néanmoins créé une nouvelle dynamique, dont le Mali, la RCA, au-delà l’Afrique francophone dans son intégralité, en pâtiront et en paieront longtemps le prix.
Les interventions militaires françaises répétitives en Afrique ont eu pour effet second de blanchir la France de son passif colonial en raison du fait que le recours au pouvoir colonial pour restaurer son indépendance plombe définitivement tout discours sur l’indépendance et la dignité du fait de la vénalité et la couardise de la classe politique africaine, particulièrement malienne, son indignité et son absence de sens patriotique.
Le trafic, en parallèle, des djembés et des mallettes au delà du tolérable, en toute indécence, a constitué une pratique qui fait honte à toute l’Afrique et à la France en ce qu’il n’appartient pas au tiers monde arabo-africain de soutenir le train de vie de l’élite politico-médiatique française et ses vacances paradisiaques, sur le budget du contribuable des peuples affamés.
Une honte à l’Afrique de nourrir ses bourreaux en ce que la vénalité française et la corruption africaine, constituent une combinaison corrosive, dégradante pour le donateur, avilissante pour le bénéficiaire. Cette observation vaut pour l’ensemble de la clientèle africaine de la France.
La déliquescence de l’état Malien
Jamais pays n’a connu pareille décélération, où, en moins d’un semestre, -le temps du coup de butoir d’Ansar Eddine dans le Nord Mali et le coup d’Etat du capitaine Aya Sanogo-, le Mali s’est vu projeter dans une vertigineuse phase de fragmentation accélérée par la déliquescence de l’état et la régression de la société.
Le Mali est devenu une passoire : Le ministre malien de la Défense Tiéman Hubert Coulibaly fera les frais du chaos régnant, limogé le 3 septembre dans la foulée de la chute de la ville de Boni, dans le centre du pays, aux mains des djihadistes.
Ce limogeage est intervenu après plusieurs assauts djihadistes contre Bamako, notamment contre l’Hotel Radisson, deux mois après la meurtrière attaque de la base de Nampala par Ansar Eddine, se soldant par la mort de 17 soldats dans les rangs de l’armée gouvernementale.
Tous les grands secteurs de l’état sont en panne, alors que la classe politique se délecte, en toute inconscience de ses querelles byzantines, que la famine menace, que le Pouvoir est déconnecté des réalités du pays, l’armée démotivée par le formidable étalage de sa cupidité, la population plongée dans la désespérance. Avec en prime, une fois le forfait accompli, le sauf conduit vers l’exil et le pardon du mutique ATT, principal responsable de ce chaos, en retraite tranquille à Dakar.
Classé parmi les pays les moins avancés de la planète, le Mali est en outre affligé d’un parlementarisme hérité des pratiques corrosives de la défunte IIIe République française, où près de quarante partis politiques se disputent les faveurs des électeurs maliens, sur fond d’accusation de népotisme, de corruption et de gabegie.
Un procès aurait sans doute démontré l’incurie administrative et l’impéritie politique ; que le dispositif militaire déployé dans le Nord du Mali était factice de crainte d’un coup d’état contre le pouvoir à Bamako.
Que d’anciens diplomates en poste dans le Golfe se soient transformés en chef rebelles, tels Abdel Rahman Galla, ancien ambassadeur du Mali en Arabie saoudite, ou Yat Agali, ancien consul général à Djeddah, chef du mouvement «Ansar Eddine » (les partisans de la religion) donnent la mesure du délitement moral de l’élite de la nation.
Les prébendes et les sinécures ont pour fonction de calmer les appétits. Elles n’ont pas vocation à forger une conscience nationale.
Si le coup de force des jeunes officiers maliens, à quarante jours des élections présidentielles, a plongé le pays dans une zone de forte turbulence, la gangrène qui ravage ses élites a précipité le Mali dans la décomposition, dans le silence tonitruant d’un des plus éminents responsables de ce gâchis.
Quatre ans après son éviction, Amadou Toumani Touré demeure taiseux, réfugié au Sénégal, à l’abri des regards de même que sa fortune n un mutisme insupportable.
IBK au pouvoir : Une affaire de copinage et d’auto promotion au sein de l’Internationale socialiste
La propulsion d’Ibrahima Keita Touré (IBK) à la tête de l’état malien constitue un cas type d’une auto promotion au sein de l’Internationale socialiste : une affaire de copinage entre le socialiste François Hollande et l’ancien vice-président malien de l’Internationale socialiste, de même que le partenariat d’IBK avec des éléments représentatifs du grand banditisme corse, le réseau «Pasqua and co», une grosse magouille, porteuses de dividendes certains.
Une variante dans sa zone ultra-grise de la Françafrique, le pacte de corruption des élites à l’échelle transcontinental entre la France et l’Afrique, que tous jurent pourtant avoir définitivement enterré, qui se perpétue pourtant dans de nouvelles déclinaisons.
L’affaire IBK-TOMI a apporte la preuve que la démocratisation du Mali sous le tandem Hollande IBK est une supercherie de la même manière que l’instauration de la démocratie en Libye par les missiles tomahawk grâce au tandem Sarkozy BHL a été une mystification.
Tant en Libye qu’au Mali, qu’en Syrie, qu’en Ukraine, le pouvoir français dans ses variantes Nicolas Sarkozy et François Hollande apparaît comme un pays de hâbleurs et de bonimenteurs de foire, le grand perdant de la mondialisation le grand perdant de l’européanisation du continent le grand perdant de la bataille de Syrie et de Crimée, le grand perdant de l’Afrique.
En première ligne dans la guerre de prédation économique du versant sud de la Méditerranée, -avec le ciblage de la Libye et de la Syrie, deux pays sans endettement extérieur et disposant de réserves énergétiques-, la France se retrouve de plein fouet sur la ligne de front en Afrique, en confrontation directe avec ses anciens frères d’armes djihadistes du Monde arabe, qu’elle cherche à terrasser. Qu’il est douloureux le venin inoculé par la morsure d’un serpent nourri en son sein.
L’expédition punitive du Mali de janvier 2013 a présenté une configuration stratégique sensiblement différente des précédentes séquences (Suez, Bizerte, Kolwezi). Au Mali, face à des hordes furtives, la France a été sous perfusion technologique américaine, sous transfusion matérielle et humaine européenne et africaine (2.000 Tchadiens, 500 Nigériens), sous injection financière arabe.
Serval a traduit un effondrement de la capacité de projection de la puissance française. Un échec de la France dans son pré carré poserait la question de la légitimité de sa présence au sein du Conseil de sécurité en sa qualité de membre permanent doté d’un droit de veto.
Un statut octroyé, faut-il le rappeler, en dépit de sa collaboration avec l’Allemagne nazie sous Vichy, non pas tant pour sa contribution à l’effort de guerre allié, mais en raison de sa possession à l’époque d’un consistant empire colonial, désormais réduit à sa honteuse portion congrue de la Françafrique. Un éventuel échec réduirait le rôle de la France à celui d’un satrape régional.
Recourir pour le service après-vente au Tchad exonère un criminel de guerre mercenaire de la France de toutes ses turpitudes et couvre de ridicule le Mali, héritier du grand empire éponyme. Ce Mali, fierté de tant d’Africains à la recherche désespérée de leur gloire passée pour y puiser les bases d’un meilleur avenir. Un Mali ridiculisé par un lilliputien, jadis raillé pour sa dépendance post coloniale.
Tant le Mali que la République de Centre Afrique signent dans l’ordre subliminal le passage de relais de la France à ses protégés africains dans la gestion de la Françafrique, au terme de 40 ans d’intervention militaire en cinquante-trois ans d’indépendance africaine.
Maliens de France : Les enjeux stratégiques sous-jacents des relations franco maliennes
Le Mali avait vocation à être un élément fédérateur de l’Afrique occidentale, et non le chien de garde de la France, affecté à en faire le sale boulot, contrecoup de la politique néocoloniale de la France, sur le plan international, et de sa xénophobie, sur le plan interne.
Héritier d’un des grands empires d’Afrique, avec le Ghana, situé au cours de l’Afrique occidentale en connexion avec sept pays, en pleine zone du sahel, le nouveau foyer de tension internationale dans la zone sub-sahélienne dans la guerre contre l’AQMI, le Mali a vocation à redevenir un centre fédérateur, un élément de stabilisation de la vallée du Niger, tant par sa configuration géographique que son déploiement démographique à l’intérieur de l’Afrique que sur le continent européen, particulièrement la France.
Septième pays d’Afrique par sa superficie avec 1 241 000 km², le Mali se situe au cœur de l’Afrique Occidentale sans aucun débouché sur le mer, enclavé entre sept pays : le Burkina Faso, ex Haute-Volta (avec 1000 km de frontières), le Niger (821 km) à l’Est ; le Sénégal (419 km) et la Mauritanie (2237 km) à l’Ouest ; l’Algérie (1376 km) au Nord ; la Côte d’Ivoire (532 km) et la Guinée Conakry (858 km) au Sud. Cet immense pays est divisé en huit régions administratives : Kayes, Koulikoro, Sikasso, Ségou, Mopti, Gao, Tombouctou et Kidal, et un district : Bamako, la capitale.
Irrigué par deux grands fleuves et leurs affluents, le Niger (4200 km de la source à la mer) et le Sénégal (1700 km), le Mali dispose d’un réseau fluvial de 2 717 km qui le relie au Sénégal, de Koulikoro à Saint Louis et à la Guinée Conakry, de Bamako à Kouroussa. Le fleuve Niger permet également une navigation intérieure de Koulikoro à Tombouctou, en passant par Ségou, Mopti et Diré.
Le sous-sol du pays regorge entre autre de quelques-uns des minéraux les plus recherchés : or, uranium, lithium, phosphates, plomb, zinc, manganèse, fer, platine, étain, cuivre. L’industrie est embryonnaire, mais l’artisanat florissant.
Le Mali exporte essentiellement des matières premières : coton, or et bétail. Tandis qu’il importe surtout des produits finis : machines, outils, équipements, matériel de construction, essence, tissus et produits alimentaires.
Sous le nom de Soudan français, le Mali a été colonisé pendant près de 75 ans, de 1885 à 1960, par la France, apportant une contribution significative au combat de la métropole durant les deux guerres mondiales du XXe siècle (1914-1918, 1939-1945).
Un des principaux contributeurs du contingent des tirailleurs africains au cours des deux guerres mondiales (1914-1918 / 1939-1945) dont la France a été le théâtre au cours du XXe siècle, amputé de surcroît de ses débouchés maritimes, une donnée naturelle du pays, le Mali, héritier de l’Empire Mandingue développera une sorte de colère rentrée à l’égard de l’ancienne puissance coloniale. Ni vociférations, ni jérémiades, mais une froide détermination dans l’établissement d’une sorte de contiguïté passive vis-à-vis de son ancien colonisateur.
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