Thomas Guénolé
La Commission nationale consultative des
droits de l’homme a publié, le 9 avril dernier, son rapport annuel sur
le racisme, l'antisémitisme et la xénophobie. Le constat est sans appel :
si les Français deviennent plus tolérants, les actes à caractère
racistes augmentent. Pour le politologue Thomas Guénolé, il faut ouvrir
un vrai débat national sur le racisme en France.
Oui, les Français sont lourdement racistes. Ce n’est pas une opinion : c’est un constat scientifique. La Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) a en effet publié les résultats de sa grande enquête sur la tolérance en France pour l’année 2014, et ils sont terrifiants.
Des résultats qui donnent la nausée
Sans entrer dans le détail de toutes les données collectées, une brève sélection permet de se faire une idée de la gravité du problème. Pour 1 Français sur 10, traiter quelqu’un de "sale Noir" ne doit pas être condamnable en justice. Pour 6 Français sur 10, les juifs ont un rapport particulier à l’argent. Pour 4 Français sur 10, les juifs ont trop de pouvoir en France.
Pour 6 Français sur 10, on a plus de chances d’accéder aux aides quand on n’est pas Français. Pour 4 Français sur 10, les Arabes constituent en France un groupe à part. Pour 8 Français sur 10, non seulement les Roms exploitent très souvent leurs enfants, mais ils vivent essentiellement de vols et de trafics. Le reste est à l’avenant : pour le résumer d’une phrase, les résultats de cette enquête donnent la nausée.
Constater que les Français sont majoritairement racistes et faire l’effort de quantifier le problème pour le prouver scientifiquement, c’est une chose. Réagir au problème, c’en est une autre. Alors, que faire ?
Un vocabulaire pseudo-culturel pour alibi
En premier lieu, il est urgent que les médias mettent devant leurs responsabilités les éditorialistes qui propagent des idées racistes. Lorsqu’Eric Zemmour déclare prendre le pari que 90-95% des délinquants mineurs sont soit des Noirs soit des Maghrébins, cela signifie qu’il n’a aucune preuve : or, postuler ce type de généralité sans preuve, c’est du racisme.
Lorsque Philippe Tesson explique que selon lui, ce sont les musulmans qui "amènent la merde" en France, c’est un cas d’école de vocabulaire pseudo-culturel pour accuser les Arabes d’être une population criminogène. Ce racisme utilisant un vocabulaire pseudo-culturel pour alibi est d’ailleurs de plus en plus répandu.
Or, dans les cas malheureusement récurrents d’éditorialistes tenant des propos incontestablement racistes, on assiste depuis une dizaine d’années à un assoupissement généralisé de leurs confrères, leur capacité d’indignation et de contre-argumentation vigoureuse s’émoussant de plus en plus sous l’accusation d’être "politiquement correct".
Pour mémoire, ce ne sont pas les contradicteurs d’Eric Zemmour qui sont politiquement corrects : c’est juste Eric Zemmour qui est raciste.
Boycotter les auteurs de propos racistes
Plus largement, les grands médias devraient assumer de boycotter d’office tout auteur de propos incontestablement racistes. Par exemple, le député UMP du Var Jean-Sébastien Vialatte, commenta des actes de vandalisme en 2013 en ces termes :
"Les casseurs sont sûrement des descendants d’esclaves".
Un boycott médiatique généralisé à son égard serait justifié. Il va de soi que le rétablissement de cette censure antiraciste ferait hurler plusieurs mégaphones du racisme contemporain : les médias de droite dure, les médias d’extrême droite, et les sites Internet d’extrême droite raciste de type "Riposte laïque" ou "Boulevard Voltaire". Cela suppose donc que les grands médias assument ceci : oui, la liberté d’expression s’arrête là où commence la parole raciste.
En outre, dans le sens du rapport de 2009 du CSA sur le racisme et les discriminations dans l’audiovisuel français, il est visiblement urgent de mettre à la télévision davantage de présentateurs qui ne soient pas des hommes blancs. La sous-représentation des "minorités visibles" (en clair, principalement les Arabes et les Noirs) est en effet un cas d’école de racisme. Incidemment, selon le CSA, davantage de diversité à l’antenne entraînerait mécaniquement une baisse des préjugés racistes.
Il faut crever l’abcès
Enfin, il est indispensable et urgent d’ouvrir un vrai débat national sur le racisme en France. Il ne s’agit plus d’ânonner paresseusement, mécaniquement, que "le-racisme-c’est-mal". Il faut qu’on en parle vraiment : en organisant des débats contradictoires, en donnant la parole à des témoignages de victimes du racisme ordinaire, en multipliant les reportages, en diffusant des documentaires sur ce problème, etc.
À cet égard, il est d’ailleurs nécessaire que les grands médias assument un rôle de pédagogie antiraciste : en s’adressant à l’intelligence des gens, pour leur démontrer, un par un, que chaque cliché raciste est faux.
Bref, il faut absolument que notre pays ait une véritable conversation nationale sur son problème de racisme. Il faut crever l’abcès.
Aujourd’hui, ce n’est pas l’antiracisme qui est politiquement correct : c’est la parole raciste qui se répand confortablement sur nos ondes. Il est donc grand temps que chacun prenne sa part de responsabilité dans l’endiguement de la haine : par l’argumentation, par l’intransigeance ; et grâce au démontage patient, brique par brique, de la rhétorique mensongère des racistes.
Oui, les Français sont lourdement racistes. Ce n’est pas une opinion : c’est un constat scientifique. La Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) a en effet publié les résultats de sa grande enquête sur la tolérance en France pour l’année 2014, et ils sont terrifiants.
Des résultats qui donnent la nausée
Sans entrer dans le détail de toutes les données collectées, une brève sélection permet de se faire une idée de la gravité du problème. Pour 1 Français sur 10, traiter quelqu’un de "sale Noir" ne doit pas être condamnable en justice. Pour 6 Français sur 10, les juifs ont un rapport particulier à l’argent. Pour 4 Français sur 10, les juifs ont trop de pouvoir en France.
Pour 6 Français sur 10, on a plus de chances d’accéder aux aides quand on n’est pas Français. Pour 4 Français sur 10, les Arabes constituent en France un groupe à part. Pour 8 Français sur 10, non seulement les Roms exploitent très souvent leurs enfants, mais ils vivent essentiellement de vols et de trafics. Le reste est à l’avenant : pour le résumer d’une phrase, les résultats de cette enquête donnent la nausée.
Constater que les Français sont majoritairement racistes et faire l’effort de quantifier le problème pour le prouver scientifiquement, c’est une chose. Réagir au problème, c’en est une autre. Alors, que faire ?
Un vocabulaire pseudo-culturel pour alibi
En premier lieu, il est urgent que les médias mettent devant leurs responsabilités les éditorialistes qui propagent des idées racistes. Lorsqu’Eric Zemmour déclare prendre le pari que 90-95% des délinquants mineurs sont soit des Noirs soit des Maghrébins, cela signifie qu’il n’a aucune preuve : or, postuler ce type de généralité sans preuve, c’est du racisme.
Lorsque Philippe Tesson explique que selon lui, ce sont les musulmans qui "amènent la merde" en France, c’est un cas d’école de vocabulaire pseudo-culturel pour accuser les Arabes d’être une population criminogène. Ce racisme utilisant un vocabulaire pseudo-culturel pour alibi est d’ailleurs de plus en plus répandu.
Or, dans les cas malheureusement récurrents d’éditorialistes tenant des propos incontestablement racistes, on assiste depuis une dizaine d’années à un assoupissement généralisé de leurs confrères, leur capacité d’indignation et de contre-argumentation vigoureuse s’émoussant de plus en plus sous l’accusation d’être "politiquement correct".
Pour mémoire, ce ne sont pas les contradicteurs d’Eric Zemmour qui sont politiquement corrects : c’est juste Eric Zemmour qui est raciste.
Boycotter les auteurs de propos racistes
Plus largement, les grands médias devraient assumer de boycotter d’office tout auteur de propos incontestablement racistes. Par exemple, le député UMP du Var Jean-Sébastien Vialatte, commenta des actes de vandalisme en 2013 en ces termes :
"Les casseurs sont sûrement des descendants d’esclaves".
Un boycott médiatique généralisé à son égard serait justifié. Il va de soi que le rétablissement de cette censure antiraciste ferait hurler plusieurs mégaphones du racisme contemporain : les médias de droite dure, les médias d’extrême droite, et les sites Internet d’extrême droite raciste de type "Riposte laïque" ou "Boulevard Voltaire". Cela suppose donc que les grands médias assument ceci : oui, la liberté d’expression s’arrête là où commence la parole raciste.
En outre, dans le sens du rapport de 2009 du CSA sur le racisme et les discriminations dans l’audiovisuel français, il est visiblement urgent de mettre à la télévision davantage de présentateurs qui ne soient pas des hommes blancs. La sous-représentation des "minorités visibles" (en clair, principalement les Arabes et les Noirs) est en effet un cas d’école de racisme. Incidemment, selon le CSA, davantage de diversité à l’antenne entraînerait mécaniquement une baisse des préjugés racistes.
Il faut crever l’abcès
Enfin, il est indispensable et urgent d’ouvrir un vrai débat national sur le racisme en France. Il ne s’agit plus d’ânonner paresseusement, mécaniquement, que "le-racisme-c’est-mal". Il faut qu’on en parle vraiment : en organisant des débats contradictoires, en donnant la parole à des témoignages de victimes du racisme ordinaire, en multipliant les reportages, en diffusant des documentaires sur ce problème, etc.
À cet égard, il est d’ailleurs nécessaire que les grands médias assument un rôle de pédagogie antiraciste : en s’adressant à l’intelligence des gens, pour leur démontrer, un par un, que chaque cliché raciste est faux.
Bref, il faut absolument que notre pays ait une véritable conversation nationale sur son problème de racisme. Il faut crever l’abcès.
Aujourd’hui, ce n’est pas l’antiracisme qui est politiquement correct : c’est la parole raciste qui se répand confortablement sur nos ondes. Il est donc grand temps que chacun prenne sa part de responsabilité dans l’endiguement de la haine : par l’argumentation, par l’intransigeance ; et grâce au démontage patient, brique par brique, de la rhétorique mensongère des racistes.
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