PARIS (Reuters) – Le Parlement français a
définitivement adopté mercredi le projet de loi sur les retraites, une
réforme clé du quinquennat de François Hollande jugée trop timide par
les institutions économiques internationales, dont la Commission
européenne.
Au Sénat, où la gauche dispose d’une faible majorité, le texte a été
par deux fois rejeté du fait du vote contre du groupe Front de gauche
mais l’Assemblée a le dernier mot.
Les groupes PS et des radicaux de gauche ont voté pour. Le Front de
gauche a voté contre, de même que ceux de l’UMP et de l’UDI (centriste).
Les écologistes se sont abstenus.
Le Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, s’est déplacé à l’Assemblée nationale pour saluer cette l’événement.
« Nous arrivons à un moment très important dans la vie politique » a
dit le chef du gouvernement dans les couloirs de l’Assemblée nationale.
« C’est une vraie réforme en profondeur qui permet de sauver notre
système par répartition qui était en danger, en péril. Nous l’avons
sauvé par ce vote. »
Cette « réforme à la française », « équilibrée et qui est le fruit
du dialogue social », modifie selon lui le système « en faisant porter
l’effort de façon équitable entre les actifs, entre les entreprises et
puis entre les retraités ».
Le projet de loi prévoit un allongement de la durée de cotisation
dans les secteurs privé et public à 43 ans à l’horizon 2035 ainsi qu’une
hausse générale de 0,3 point en quatre ans des cotisations salariales
et patronales.
Elle ne touche ni aux régimes spéciaux, ni à l’âge légal, qui reste
fixé à 62 ans, et prévoit la création à partir de 2015 d’un compte
personnel de prévention de la pénibilité qui permettra de bénéficier
d’une réduction de la durée de cotisation pour obtenir une retraite à
taux plein.
La date de revalorisation annuelle des pensions de retraite est décalée de six mois, du 1er avril au 1er octobre.
DOUTES DE LA COMMISSION EUROPÉENNE
En contrepartie, l’aide à l’acquisition d’une complémentaire santé
(ACS) sera revalorisée de cinquante euros pour les retraités touchant
une pension entre 770 et 967 euros et le minimum vieillesse sera
revalorisé l’an prochain les 1er avril et 1er octobre d’une somme
correspondante à l’inflation.
Le texte ne fait pas l’unanimité à gauche.
« C’est un texte de régression sociale qui ne garantit ni l’avenir,
ni la justice de notre système de retraite. Au contraire il le
fragilise », a dit Marc Dolez, l’orateur du groupe Front de gauche.
A droite, on la trouve beaucoup trop timide à l’heure où l’UMP
propose de retarder l’âge de départ à 65 ans. Le principal parti
d’opposition a d’ailleurs annoncé qu’il déposerait jeudi un recours
auprès du Conseil constitutionnel.
Pour le centriste Charles de Courson, cette réforme « restera
l’emblème d’une fausse et injuste réforme, impropre à garantir l’avenir
des retraites ».
L’écologiste Valérie Massonneau a expliqué que les Verts
s’abstenaient « pas pour nous opposer à l’ensemble du texte » mais
« parce que plusieurs mesures sont inacceptables », comme l’allongement
de la durée de cotisation.
Dans sa recommandation aux ministres des Finances de l’UE publiée le
15 novembre dernier sur le programme de partenariat économique présenté
le 1er octobre par la France, une obligation pour un pays en déficit
excessif, la Commission a émis des doutes sur les ambitions de cette
réforme.
Elle a jugé qu’elle réduirait « le déficit du système des retraites mais ne suffira pas à l’éliminer d’ici 2020″.
Elle regrettait que les régimes spéciaux et ceux de la fonction
publique présenteront « un déficit significatif à cette date » et que
les scénarios macro-économiques dans ce domaine restent « trop
optimistes ».
La poursuite des réformes structurelles est la condition posée par
l’exécutif européen en échange d’un délai de deux ans, jusqu’en 2015,
pour réduire le déficit français sous la barre des 3% du PIB.