Par Damien Theillier.
Telle est la conviction de Pierre Robert, agrégé de sciences économiques et sociale et professeur en classes préparatoires, qui a consacré en mai 2018 une note à l’Institut Sapiens intitulée « Comment élever le niveau des Français en économie ? »
Selon lui, les Français dans leur ensemble n’ont pas une connaissance satisfaisante des mécanismes économiques de base de l’économie de marché. Et les enquêtes internationales montrent que cette ignorance est plus marquée chez nous que dans les autres pays européens.
Qu’il s’agisse de l’effet de l’inflation sur les rendements des actifs, des niveaux de risque des différents placements ou du mécanisme des intérêts composés, seuls 31% des Français fournissaient une réponse correcte sur ces trois points, contre 53% des Allemands et 50% des Suisses (2010).
Lorsqu’on interroge les Français, dans deux cas sur trois les sondés ne connaissent ni l’ordre de grandeur du PIB, ni celui de la dette publique, deux indicateurs pourtant essentiels.
73% (trois Français sur quatre) ne savent pas évaluer ce qu’un employé au SMIC coûte à son entreprise. Et 38% pensent que la situation de notre commerce extérieur est bonne, alors qu’elle est mauvaise !
Cette ignorance touche tous les milieux, selon Pierre Robert. Elle affecte également la classe politique, les fonctionnaires, les juges, la plupart des intellectuels et la majorité des journalistes. Une telle situation, explique l’auteur, ne peut que nuire au dialogue social, freiner les réformes et empêcher notre pays de mettre pleinement en oeuvre son potentiel d’innovation et de croissance
On assiste également à des polémiques stériles dans les médias. Par exemple la polémique récurrente autour de la cagnotte fiscale. Dès lors que les déficits seraient moindres que prévus, beaucoup pensent qu’il y aurait une cagnotte à redistribuer. Pourtant le fait que les déficits passent sous la barre des 3% n’est pas la garantie d’une bonne santé économique. Pour cela ne faudrait-il pas d’abord rétablir l’équilibre des finances et baisser la dépense publique ?
Ce pilotage de l’économie par l’État a bien fonctionné pendant les Trente Glorieuses. À l’époque, l’économie française était en phase de rattrapage. Mais nous ne sommes plus dans le même régime de croissance. Aujourd’hui notre économie est tournée vers l’innovation et requiert une participation active.
Pour l’économiste américain Edmund Phelps, l’auteur de La Prospérité de masse (Odile Jacob, Paris, 2017), une économie moderne « pratique avant tout des activités visant l’innovation ».
Pour avancer
Pire, ils ont une vision biaisée de l’économie, presque caricaturale. Ils présentent l’économie de marché avec un pessimisme excessif, en mettant l’accent presque exclusivement sur ce qui ne va pas. En réalité, il existe une véritable contre-culture économique, très hostile à l’adaptation nécessaire de notre économie aux mutations du monde actuel.
Ajoutons que dans les grandes écoles ainsi qu’à l’École nationale de la magistrature, l’enseignement de l’économie est tout simplement absent.
Les conséquences de cette hostilité ont été mises en évidence par Edmund Phelps, qui estime qu’une telle attitude coûte un point de croissance par an, soit 23 milliards d’euros, la moitié de la dette de la SNCF.
En conclusion, Pierre Robert préconise d’adopter une approche disciplinaire plus large
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Telle est la conviction de Pierre Robert, agrégé de sciences économiques et sociale et professeur en classes préparatoires, qui a consacré en mai 2018 une note à l’Institut Sapiens intitulée « Comment élever le niveau des Français en économie ? »
Selon lui, les Français dans leur ensemble n’ont pas une connaissance satisfaisante des mécanismes économiques de base de l’économie de marché. Et les enquêtes internationales montrent que cette ignorance est plus marquée chez nous que dans les autres pays européens.
Qu’il s’agisse de l’effet de l’inflation sur les rendements des actifs, des niveaux de risque des différents placements ou du mécanisme des intérêts composés, seuls 31% des Français fournissaient une réponse correcte sur ces trois points, contre 53% des Allemands et 50% des Suisses (2010).
Lorsqu’on interroge les Français, dans deux cas sur trois les sondés ne connaissent ni l’ordre de grandeur du PIB, ni celui de la dette publique, deux indicateurs pourtant essentiels.
73% (trois Français sur quatre) ne savent pas évaluer ce qu’un employé au SMIC coûte à son entreprise. Et 38% pensent que la situation de notre commerce extérieur est bonne, alors qu’elle est mauvaise !
Cette ignorance touche tous les milieux, selon Pierre Robert. Elle affecte également la classe politique, les fonctionnaires, les juges, la plupart des intellectuels et la majorité des journalistes. Une telle situation, explique l’auteur, ne peut que nuire au dialogue social, freiner les réformes et empêcher notre pays de mettre pleinement en oeuvre son potentiel d’innovation et de croissance
On assiste également à des polémiques stériles dans les médias. Par exemple la polémique récurrente autour de la cagnotte fiscale. Dès lors que les déficits seraient moindres que prévus, beaucoup pensent qu’il y aurait une cagnotte à redistribuer. Pourtant le fait que les déficits passent sous la barre des 3% n’est pas la garantie d’une bonne santé économique. Pour cela ne faudrait-il pas d’abord rétablir l’équilibre des finances et baisser la dépense publique ?
Quelles sont les causes de ce manque de culture économique ?
Elles sont d’abord historiques et culturelles. L’économie a toujours eu un rôle secondaire dans notre pays, explique l’auteur de ce rapport. En 1944, le Conseil national de la Résistance a conçu un programme qui faisait de l’État le maître d’oeuvre de la reconstruction.Ce pilotage de l’économie par l’État a bien fonctionné pendant les Trente Glorieuses. À l’époque, l’économie française était en phase de rattrapage. Mais nous ne sommes plus dans le même régime de croissance. Aujourd’hui notre économie est tournée vers l’innovation et requiert une participation active.
Pour l’économiste américain Edmund Phelps, l’auteur de La Prospérité de masse (Odile Jacob, Paris, 2017), une économie moderne « pratique avant tout des activités visant l’innovation ».
Pour avancer
elle se nourrit d’une culture économique motivante aussi bien que de motivations financières. Une société à dynamisme fort requiert des individus qui ont grandi avec certains comportements, et certaines croyances, qui les poussent à saisir des occasions qui promettent de les enthousiasmer par leur nouveauté, de les intriguer par leur mystère, de les défier par leur difficultés et de les inspirer par les nouvelles perspectives qu’elles représentent.En négatif, cela signifie que l’ignorance économique favorise le corporatisme, donc la défense étroite des intérêts en place, qui elle-même étouffe le dynamisme de l’économie.
Un rejet de l’économie de marché et de l’entreprise
Il y a une seconde série de causes qui touchent à l’enseignement de l’économie en France, explique Pierre Robert. Les manuels scolaires et les programmes dans le secondaire sont trop vastes et couvrent des champs trop variés dont aucun n’est au final maîtrisé : démographie, sociologie, sciences politiques…Pire, ils ont une vision biaisée de l’économie, presque caricaturale. Ils présentent l’économie de marché avec un pessimisme excessif, en mettant l’accent presque exclusivement sur ce qui ne va pas. En réalité, il existe une véritable contre-culture économique, très hostile à l’adaptation nécessaire de notre économie aux mutations du monde actuel.
Ajoutons que dans les grandes écoles ainsi qu’à l’École nationale de la magistrature, l’enseignement de l’économie est tout simplement absent.
Les conséquences de cette hostilité ont été mises en évidence par Edmund Phelps, qui estime qu’une telle attitude coûte un point de croissance par an, soit 23 milliards d’euros, la moitié de la dette de la SNCF.
En conclusion, Pierre Robert préconise d’adopter une approche disciplinaire plus large
qui ne soit pas aussi centrée sur les mathématiques et les techniques quantitatives mais fasse plus de place à l’histoire de la pensée économique, à l’épistémologie de la discipline et aux autres sciences sociales. Cela aurait d’autant plus de sens qu’auront été posées dans le secondaire les bases du raisonnement en économie.Cela suppose que les professeurs aient été correctement formés à cette double tâche lorsqu’à l’université ils préparent le mastère de formation aux métiers de l’enseignement, de l’éducation et de la formation.
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