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vendredi 31 janvier 2014

Entrevue du CNC #8 : Pierre-Antoine, responsable du cercle Les Non-Alignés

Cercle non conforme

Deuxième partie


4) Quels sont les mouvements politiques français qui vous semblent intéressants ? Pourquoi ?

J’essaye d’avoir une vision œcuménique de tout ce qui existe actuellement comme « offres » dans la mouvance nationale ou européenne. Et tout ce qui existe en la matière m’intéresse. J’observe aussi tout ce me qui semble pertinent à l’extérieur de notre mouvance, car le génie européen et français n’est pas cantonné aux sphères qui prétendent le défendre ou le ressusciter, loin s’en faut.

En ce moment, en France, il y a bien-sûr le Front National dont on parle sans arrêts (pour étouffer la visibilité de l’UMP dans un simple calcul politique à gauche ?).
FN qui va peut-être se dissoudre prochainement dans une recomposition globale à droite par le RBM. Significatif est ainsi le nombre de personnalités ou futurs candidats qui rejoignent Marine mais n’adhèrent pas au FN qui est de toute façon une coquille vide et une étiquette, certes la seule que connaissent nos compatriotes.
Puis il y a aussi les « tea-partys » français : la « Manif pour tous », le « Printemps français », ou encore les « bonnets rouges » qui mobilisent et incarnent parfaitement la colère des classes moyennes mais qui, avec leurs mots d’ordre anti-hollande peuvent très bien s’intégrer aussi dans un possible scénario de recomposition à droite et de manipulation générale. « Agiter le peuple avant de s’en servir » rappellerait ici Pierre Hillard en citant Talleyrand.

De tout cela, les « bonnets rouges » semblent les plus intéressants, car laissant plus de marge de manœuvre aux gens comme nous en interne. Mais il ne faut pas se faire d’illusions quant aux possibilités réellement révolutionnaire de ces groupes. Ce qui doit compter le plus, pour les cercles comme nous ou vous, c’est d’accompagner le changement de paradigme en cours et d’essayer de nous constituer en réseau d’influence culturelle et d’entraide sociale. La configuration insurrectionnelle est envisageable uniquement si tout est réuni pour une action préparée et cohérente qui puissent aboutir si les conditions s’y prêtent.

Il y a aussi ce qui reste d’identitaires encore actifs qui oscillent quant à eux entre coups d’éclats et « buzz » militants et tentatives de s’intégrer au bloc des droites en cours d’édification (bon courage aux architectes de cette construction !). Là encore, de par mon trajet, je considère que la mouvance identitaire a raté l’occasion historique d’unir la droite radicale dans un projet de société commun. Ils avaient –nous avions- enfin réussi une synthèse militante entre action, pensée et mode vie, comme nos camarades italiens de Casapound mais adaptée à la France. Espérons que de cette expérience, ceux des meilleurs éléments identitaires sauront rebondir et participer à l’élaboration de la synthèse nouvelle qui ne manquera pas d’émerger à terme.

Il y a évidemment aussi la mouvance plus protéiforme encore que l’on désigne comme « dissidence », et qu’incarne Dieudonné et Soral. Chacun, à son niveau accomplissant avec leurs proches, un travail jamais vu en France jusqu’ici. Le « buzz de la quenelle » peut agacer les militants métapolitiques les plus formés mais quelle réussite incroyable sur un sujet aussi épineux que le sionisme, sujet que lâchement, une grande partie de la droite radicale n’osait même plus évoquer. Le travail d’Alain Soral et d’Egalité et Réconciliation est juste révolutionnaire en matière d’intelligence politique. Je trouve très pertinente la remarque d’Alain Soral qui dit dans son dernier entretien ce qu’il répète souvent : « On a remarqué depuis des années en France que les manifestations de rue n’amènent jamais à rien et que le système est tellement bien verrouillé que la politique politicienne nous amène toujours finalement à respecter et à nous soumettre aux règles du système de domination. En réalité, je fais donc de la politique mais différemment, en fonction des deux constats que je viens de vous énoncer. »

Ceci ne doit pas être pris selon moi comme un encouragement à abandonner le militantisme de terrain pour autant mais bien à apprendre à l’orienter de manière différente. Ainsi, si des groupes de rue efficaces - comme les jeunesses nationalistes par exemple ou les identitaires - s’orientaient vers le social et l’entraide communautaire comme le fait le MAS, ceci en parallèle de la révolution cognitive d‘ER, tout cela dans un climat de droitisation de la France avec le FN, on arriverait alors dans une configuration intéressante où tout le monde trouverait à exercer ses talents et sa volonté de participer au redressement de la France. Depuis les nouvelles élites politiques non-alignés comme Aymeric Chauprade au Front National jusqu’au militant de rue ou de terroir, tout le monde devrait pouvoir exprimer son patriotisme à sa mesure dans nos rangs si nous savions mieux coordonner nos compétences et les différences nécessaires entre mouvements patriotes. Si l’on arrime toutes ces réalités au nouveau « nomos de la terre » en cours de réalisation autour de la Russie, on arrive alors à une configuration réellement « révolutionnaire-restauratrice » comme je la définis dans un texte à paraitre.  

Après, et plus proche de nous, il y a toute la mouvance métapolitique, qui pour moi est essentiel. Avec surtout « Méridien Zero » : la référence contre-culturelle en France et le mouvement qui est lié, le MAS. Avec aussi tous les cercles comme vous qui gravitez autour ou le journal-réseau Rébellion, qui devient toujours mieux à chaque numéro. On pourrait rajouter aussi le balbutiant réseau « Maison Commune » de Laurent Ozon ou bien encore l’institut Polémia de Le Gallou.

Il ne s’agit pas d’un mouvement mais dans ce rapide panorama j’inclurai aussi la revue « Eléments » qui jouent un rôle central dans la vie des idées politiques en France et qui devient actuellement la publication la plus intelligente et la plus contemporaine. Un travail fondamental, tout autant, voir plus que celui de nombre de mouvements politiques éphémères.

Pour autant, dans ce panorama, la droite radicale française brille par son absence en tant que mouvance organisée. Je pourrais en rester là, sur la forme, mais je ne peux pas ne pas évoquer certaines raisons qui ont empêché jusqu’à présent la structuration d’une mouvance radicale organisée et sérieuse en France, à l’image de l’Italie par exemple avec Casapound.

Vous connaissez peut-être le principe de dissolution et coagulation – «solve et goagula » - qui pour les néo-platoniciens rythment la vie de l’univers ? On a l’impression, en France, qu’au niveau des mouvements alternationaux radicaux, on arrive jamais à rejoindre vraiment la phase de coagulation. On assiste même à un éclatement perpétuel de notre mouvance politique en une multitude de micro-réseaux animés par très peu de personnes et centrés généralement autour d’une ou deux personnes aux idées et au vues un peu plus forte que leurs camarades. Internet, dont le fonctionnement est justement la mise en réseau, ne faisant qu’accentuer ce phénomène. En soi ça ne serait pas un problème insurmontable si l’on savait un peu mieux coordonner nos actions entre nous et entre les différentes initiatives, au moins ponctuellement. Il faudrait peut-être commencer dès aujourd’hui, par exemple en ce qui concerne les manifestations prévues début 2014. Ceci afin de ne pas se retrouver comme au printemps dernier, assez désorganisé et démuni au moment où
se présenterait peut-être une occasion d’agir.

Alors qu’est-ce qui empêche l’émergence d’une mouvance nationale-révolutionnaire plus ambitieuse en France ?

Déjà peut-être est-ce spécifique à l’histoire de la droite radicale française qui n’a jamais pu accoucher d’un réel mouvement  « ni droite - ni gauche » d’ampleur comme le fascisme en Italie. Alors que cette convergence du socialisme avec le nationalisme est précisément apparue en France à la fin du XIX ème siècle, comme l’a très bien démontré l’historien Israélien Zeev Sternhell. Mussolini ayant toujours regardé Georges Sorel comme un de ses maitres.

Les Français, après avoir irradié leurs voisins européens des idées de 1789 avaient en fait théorisé la solution à leurs maux les plus sérieux : l’alliance du patriotisme et du syndicalisme révolutionnaire contre la ploutocratie bourgeoise.

Avant la première guerre mondiale il y eu l’expérience du cercle Proudhon, mais dont la plupart des animateurs, hormis Georges Valois, furent sabrés par la première guerre mondiale. Première guerre mondiale qui fût le vrai grand drame de notre civilisation européenne et tout particulièrement de la France qui vit sa jeunesse la plus courageuse disparaître dans les flammes de cette « Apocalypse de la modernité » pour reprendre le titre d’un livre d’Emilio Gentile. De là, alors que l’Italie connaissait après-guerre la fusion du nationalisme et du socialisme – ce qui d’une certaine manière avait été prévu par l’interventionnisme de Mussolini – et allait retrouver comme centralité politique l’idée fondatrice de Rome - dans un pays où l’Etat était encore à construire - le nationalisme français, lui, n’arriverait jamais à renverser ni même à subvertir la république. Cette « république qui gouverne mal mais se défend bien » selon le mot de Maurras. Puis, après la seconde guerre mondiale, la défaite de l’Allemagne allait avaler avec elle ce qui restait de la droite radicale française qui s’était engagée dans le processus de collaboration pour un nouvel ordre européen. Après guerre il ne restait là encore que des décombres et quelques volontaires errants épars au milieu de ce champ de ruines. Là où, à l’inverse, en Italie, dès la défaite, s’organiserait le Mouvement Social Italien (MSI), prédécesseur à bien des égards du Front National de la grande époque.

Intéressant aussi l’histoire du FN, qui de plateforme des droites radicales dans les années 70 est passé par diverses phases jusqu’à devenir aujourd’hui le défenseur d’une vision de l’Etat gaulliste industriel de la cinquième république après avoir historiquement émergé dans l’antigaullisme et l’Algérie française. L’histoire a de ces détours … Qui sont pourtant bien compréhensibles avec un minimum de vision et de connaissance historique et surtout d’agilité d’esprit. Cette dernière étant la spécificité des Non-Alignés et d’E&R dans notre mouvance je pense.

Là encore, malgré toutes les expériences tentées en parallèle du FN ou à l’intérieur de celui-ci, il semble bien que la mouvance radicale française ne puisse pas arriver à exister en tant que mouvement politique organisé. Voir là-dessus le passionnant ouvrage de Nicolas Lebourg : « Le Monde vu de la plus extrême-droite ».
Un sujet que ce transfuge d’Unité Radicale connaît bien …

Pour ma part j’en arrive de plus en plus à considérer que notre travail métapolitique doit se concentrer sur trois axes : l’influence culturelle, la formation politique et métapolitique, et le volontariat social. 

L’influence culturelle par la construction de contre-médias contemporains toujours plus pointus et professionnels. La formation, par la création d’une école de cadre indépendante de tout mouvement constitué, un peu comme le fût le GRECE en son temps mais avec une partie plus grande part accordée aux pratiques communautaires et à la formation humaine. Quelque chose qui s’inspirerait du modèle éternel de l’Académie antique mais adapté aux conditions de notre époque. Le projet Métapolis que j’aimerais mettre en place allant en ce sens. Nous verrons bien si cela est réalisable ou chimérique. Enfin le social, à l’exemple du MAS mais avec peut-être plus de visibilité et surtout avec peut-être la participation de groupes au fort potentiel humain qu’ils dispersent dans des actions pas toujours bien ajustées au niveau de la pertinence et de la communication. Je ne néglige rien ni personne, je pense que tout le monde peut-être utile s’il fait preuve de bonne volonté pour aller dans la bonne direction. 

On ne peut pas non plus ne pas évoquer certaines pathologies lourdes qui affectent un grand nombre de personnes dans nos mouvements : infatuation de l’ego jusqu’au délire, mythomanie légère chez beaucoup, lourde et avérée chez certains. 
On commence par se faire passer pour plus gros ou plus important que l’on n’est réellement et, à force de petits arrangements répétés avec le réel, on finit par devenir un menteur habituel, voire pire, un manipulateur. Globalement, on constate une difficulté voire même le refus d’un minimum d’autocritique et d’examen de soi.

Alors, à décharge de nos « milieux », tout cela existe bien entendu ailleurs mais ne sommes-nous pas censés être une alternative, donc être différent ? Tout cela a aussi des causes extérieures indépendantes de notre volonté. Vivre en permanence sous la pression permanente du politiquement correct, comme en apnée au milieu de la société libérale-consumériste et de codes psycho-sociaux que nous rejetons peut évidement rendre un peu fou-fou. C’est étudié pour : l’ingénierie sociale est là pour comprimer et déstructurer notre être de manière radicale et intime. L’incommunicabilité entre les personnes est promue, diffusée, élaborée par des gens qui savent y faire en matière de déstructuration des rapports sociaux. Presque plus aucune famille n’est normale aujourd’hui, mais chaque famille pense son mal-être comme unique et spécifique alors que comprendre les raisons extérieures de ce mal-être aiderait tant de personnes à y voir un peu plus clair et à souffrir un peu moins. C’est d’ailleurs plus cela le vrai but d’une opération comme « le mariage pour tous », plus encore que d’imposer les mœurs des homosexuels : déstructurer un peu plus l’anthropologie naturelle en détruisant le mariage. N’oublions pas que pour ceux qui nous gouvernent, le but est de créer le citoyen-abeille habitant d’une cellule de la ruche globale. Le triomphe de la géométrie et la défaite de l’humain.
La haine de l’humain et l’amour de la géométrie …

Face à cela, quand tout est organisé dans le sens de la destruction et de l’anéantissement de la personne humaine (au nom de l’humanisme et des droits de l’homme bien-sûr), il est effectivement difficile de rester normal. Et, on le sait, ce qui est normal n’est pas forcément la norme. Quand la norme est contre nous, quand la dictature soft que nous combattons prend la forme quasi panthéiste de la « concrétude des choses » et de tous les aspects de nos vies, il est difficile de ne pas sombrer dans le chaos et la dépression. L’extrême-droite - comme l’extrême-gauche - n’est pas une force de proposition mais bien une forme avancée de ce chaos contemporain entretenu. Il devient de plus en plus dur d’échapper à la pathologie sociale géante pour tout le monde. Il faut essayer d’être lucide : nous vivons dans l’inverse d’une société, nous vivons dans une « dissociété » savamment entretenue et organisée. On parle beaucoup de dissidence actuellement, la première dissidence actuellement serait de tenter d’être ou de redevenir normal. Plutôt que de se croire autre chose que ce que l’on est parce-que l’on souffre de ne pas être reconnu pour ce que l’on voudrait être. Il faut sortir du vouloir-être quelque chose ou quelqu’un et essayer d’être soi-même, d’aller au bout de soi-même si l’on en est capable, avec les autres ou seul. En gros s’en tenir à des principes tel que : ne pas mentir, ne pas dissimuler, ne pas tromper, dire ce que l’on pense à ceux qui s’engagent à vos côtés ou au moins essayer de le formuler le plus clairement possible. Arrêter de se construire des châteaux d’esprit qui n’existent pas dans le réel, arrêter de comploter à sa propre réussite sur le dos des autres. Reconnaitre les hiérarchies naturelles dans un groupe.  Reconnaître et respecter celui qui t’est supérieur comme celui qui t’est inférieur. Récompenser celui qui travaille le plus et non pas celui qui fait le plus le malin sur internet ou ailleurs. Se mettre à l’épreuve du réel et travailler, toujours travailler. Etre un constructeur, un bâtisseur de cette intelligence collective que tous nous voulons voir émerger pour contrer, celle, diabolique, qui mine nos sociétés et nous empêchent d’être heureux. Viser toujours plus haut que le but.

Il y a une chose que j’essaye personnellement de ne pas oublier et qui me semble fondamentale : l’assurance d’avoir raison n’annule pas la nécessité de se conformer à la « décence commune », y compris avec nos ennemis, mais d’abord évidemment avec nos proches. Notre prochain, c'est-à-dire celui qui est à côté de nous. Oui cette notion fondamentale de « décence commune » qu’à mis en exergue Jean-Claude Michea, en la reprenant à Orwell et qu’on met souvent de côté au prétexte que l’on pense avoir raison. Mais cette décence commune existe et elle est encore ressentie par une grande partie de notre peuple, qui est celle à qui nous devrions vouloir nous adresser en priorité. Et trop souvent on l’oublie, ou pire on la confond avec le « politiquement correct », alors qu’elle en est l’exact opposé. Le politiquement correct étant basé sur la censure et la dénonciation alors que la décence commune est en fait basé sur le respect et la « philia », l’amitié sociale chez les grecs. On pense, par exemple, que puisque l’on a raison de constater un phénomène énorme comme l’immigration, on est excusé par avance pour les outrances verbales ou physiques que l’on commettrait en exprimant notre mécontentement. On fait alors des provocations faciles ou des blagues potaches totalement contre-productives qui nous discréditent comme possible alternative politique (« Taubira retrouve la banane », Mario Borgezio quant à lui fait le singe etc). Une fois compris que l’on est allé trop loin, on va dissimuler nos pensées ou notre manière d’être, afin d’être respectable ou éligible (le pire). Choses dont se régalent les « médias-menteurs » avec leurs micros et caméras cachées à chaque reportage sur « l’extrême-droite » depuis toujours.

Pire, tous nos principes sont bafoués chaque fois que l’un de nous parle mal d’un camarade, dès qu’il se fait l’égout vivant de tous les ragots sur les uns ou les autres ; chaque fois qu’un meneur discute en cachette avec un tel ou une telle qui est très influent et qui va peut-être lui permettre d’arriver SEUL, là où il sera enfin reconnu pour ce qu’il vaut vraiment. Loin de tous ces loosers qui l’empêchent de briller et de trôner, seul et fier comme le soleil ! Mais en oubliant que même le soleil a besoin des autres pour être contemplé.

Tout le cortège d’opposition politique extrémiste doit être rejeté comme un surgeon ultime du libéralisme-libertaire. L’extrémisme politique est une des formes, comme le communautarisme, du libéralisme-libertaire. Tout autre chose est la radicalité, lieu où nous essayons de nous tenir et de nous maintenir contre vents et marrées.
Dans ce cadre là, pour moi, le monde de la  politique contemporaine c’est le monde de la pathologie et des turpitudes humaines au même titre que celui de la finance mais à un plus niveau médiocre et minable. En face de cela, et pour ne pas sombrer dans le repli total sur la sphère du privé, nous avons un outil que nous devons réhabiliter et redéployer : c’est la métapolitique.  

La métapolitique, c’est la conjonction de la grande politique avec le quotidien. C’est tout ce qui est politique et culturel mais qui n’est pas dans le champ de la politique politicienne. Ce qui ne signifie pas pour moi que nous ne devons pas avoir de liens avec les mouvements politiciens parlementaires, mais nous ne devons pas en faire l’alpha et l’omega de notre vision du monde comme certains, c’est ridicule. Les mouvements politiques ont leur agenda : les élections. Nous nous avons le nôtre : la vie communautaire que nous devons organiser. On ne peut pas jouer sur deux tableaux à la fois. Ce qu’il faut c’est être soi-même et se constituer en vrai force de proposition autonome et adulte qui puisse montrer à notre peuple des voies politiques alternatives. On ferait bien, dans notre courant, de s’inspirer, comme le font Eléments et Alain de Benoist, de la mouvance protéiforme des écologistes indépendants et du courant pour la démocratie directe, ou encore des travaux d’un Etienne Chouard. Par ses travaux il a effectivement effectué une critique radicale du système parlementaire d’une profondeur et d’une limpidité que rarement un ennemi de la gueuse à droite est capable d’articuler. Pour autant il manque à M.Chouard toute la culture de l’anticapitalisme de droite qui l’empêche de sortir complètement du paradigme gauche/droite. Et peut-être aussi encore quelques illusions sur la capacité des êtres humains à vivre en démocratie sur une vaste échelle. A l’inverse, trop souvent le pessimisme et la misanthropie rampante mine l’homme de droite et l’empêche d’agir. Et l’action est libératrice comme nous rappelle tous les jours nos amis de Casapound.

Je pense qu’il y a un texte à lire sur toutes ces questions, car il est issue d’une grande expérience militante, c’est « les abeilles et les fleurs » de Gabriele Adinolfi.
Il figure en fin de son abécédaire : « Pensées Corsaires ». On y trouve exposées de manière limpide toutes les raisons des échecs successifs de la droite radicale, particulièrement au niveau de l’humain. Ce texte devrait être lu par tous cadres politiques de la mouvance actuelle selon moi. Nous en éditerons une version en ce sens dans le cadre des formations Métapolis. Chaque militant devrait connaître ce texte. On peut lire aussi le très intéressant « l’insurrection qui vient » dans le camp d’en face, qui montre un très bon exemple d’autocritique de la part de membres de l’extrême gauche militante, la bande à Julien Couppat. Il faut être réaliste et voir ce que l’on pèse vraiment. Comme moi par exemple qui vous réponds ici et fait le malin mais n’ai en fait que très peu d’influence et de puissance dans mon quotidien où la plupart des actions de ma vie ne dépendent pour l’instant que du bon vouloir des multinationales ou de l’Etat.

Tous les mouvements et initiatives ne sont que des outils pour le but principal qui est le nôtre : le retour et la résilience de l’esprit de communautés des peuples ethno-européens sur le sol et la terre de leurs pères. Notre principal travail est le lent tissage d’une communauté. C’est tout ce qui compte réellement au-delà des formes politiques transitoires et précaires, plus précaires encore que notre faible mais indestructible condition humaine. Comme le chiendent et la mauvaise herbe des chemins nous renaissons et repoussons toujours. Pour combien de temps encore ?


5) Quels sont pour vous les auteurs historiques incontournables ? Vers quels auteurs dirigeriez-vous un jeune militant ayant soif d’engagement pour l’aider à se structurer doctrinalement?

Nous ne sommes ni marxistes, ni sémites, notre vision du monde ne peut être résumé par aucune table de la loi ou livre-programme de manière définitive. Ce que ne comprennent pas par exemple tous les talmudistes de la dissidence qui s’étripent en ligne ou en privé sur des questions doctrinales qui sont certes importantes mais ne constituent pas l’essentiel de ce que nous sommes. Comme disait Bardèche, « on serait bien en peine de trouver la bible du fascisme ». Et c’est normal puisque ce que nous sommes se condensent bien plus souvent en images fortes et en verbe vivant qu’en lettre morte. Nous sommes Esprit et pas lettre morte.

Notre vision du monde tient plus du mythe en action que d’une théologie absolue. Bien que l’arrière plan théopolitique soit évidement fondamental pour nous. 
Ce serait justement l’un des objets du cursus de formation du projet Métapolis que de délivrer une formation des idées adéquates. Gabriele Adinolfi conseillait dans un de nos entretiens de commencer par lire les journaux politiques des acteurs des évènements du « siècle court ». On pourrait conseiller entre autres ceux de Drieu la Rochelle, Jünger, Goebbels (plus polémique …), Emmanuel Mounier, ou encore celui de Jacques Benoits Méchin (que je découvre en ce moment). Ce dernier est riche de découvertes hallucinantes. Ainsi que les mémoires du Général de Gaulle par exemple ou de Savitri Devi (plus polémique là encore mais intéressant). Généralement  tout ce qui permet de comprendre de l’intérieur et directement à la source, par ceux qui l’ont vécu, la structure et les ressorts intimes de la crise essentielle que traverse l’Europe depuis le début du XXème siècle et de laquelle notre époque n’est que la suite logique. Je conseillerai aussi les bonnes biographies d’auteurs comme Mircea Eliade ou Mishima, essentielles pour comprendre notre temps.

Au-delà de cela, je diviserais les lectures à donner à un jeune militant en plusieurs catégories plutôt qu’en titres ou auteurs car il existe une foule d’auteurs intéressants qu’il faudrait lire dans les champs d’idées qui nous intéressent. On ne peut pas tout lire et surtout, mieux vaut maitriser parfaitement un certains nombres de lectures essentielles que de s’éparpiller en tous sens. Je diviserais les lectures militantes ainsi.

Nature et retour au réel :
- « Le monde plein » du naturaliste suisse Robert Hainard et généralement la plupart de son travail. Ceci afin de se doter d’une sensibilité à la nature et au monde réellement européenne.
- « Le sang noir » de Bertrand Hell. Essentiel sur les archétypes les plus profonds de l’animisme européen toujours présent en nous.
- « Dictionnaire amoureux de la chasse » Dominique Venner

Formation du caractère et philosophie de l’histoire :   
- « Ecrits historiques et philosophiques : pensées » Oswald Spengler
- « Pensées pour moi-même » Marc-Aurèle
- « Vie des hommes illustres » Plutarque
- « Journal de prison » Corneliu Zelea Codreanu
- « Guide spirituel (le chemin des ascètes) » Tito Collander
- « La guerre comme expérience intérieure » Ernst Jünger

Géopolitique :
- « Chronique du Choc des civilisations » Aymeric Chauprade
- « Géopolitique : constantes et changement dans l’histoire » Aymeric Chauprade
- « Les empires et la puissance » Jordis Von Lohausen (fondamental)
-  « Globalia » Jean-Christophe Rufin
- « Les espérances planétariennes » Hervé Ryssen
- « les mythes fondateurs de la politique israélienne » Roger Garaudy
- « le lobby pro-israélien et la politique étrangère américaine » Mearshmeir et Watt
- « Pour une Europe européenne » Henri de Grossouvre
- « Le grand échiquier » Zbigniew Brzezinski (les objectifs américains sans complexes, le « Mein Kampf » des mondialistes !)

Vision du monde et histoire :
- « Doctrine du nationalisme » Jacques Ploncard d’Assac
- « Pensées corsaires » Gabriele Adinolfi
- « le Fascisme vu de droite » Julius Evola
- « Mishima » collection « Qui suis-je » chez Pardès
- « la droite révolutionnaire » Zeev Sternhell
- « Orages d’acier » Ernst Jünger
- « les jeunes fauves du führer » Jean Mabire
- « le siècle de 1914 » Dominique Venner

Tradition :
- « La cité antique » Numa Fustel de Coulanges
- « Les indo-européens » Jean-Haudry
- « Les Celtes » Christian Guyonvar’ch
- « le sacré et le profane » Mircea Eliade
- « Hagakure » Yamamoto Jôchô

Je me permets de renvoyer ici à des vidéos de critiques littéraires que j’ai commencé à produire. Je vais essayer à rythme régulier de faire une chronique des livres qui me semblent important à conseiller à nos camarades.

En fait en tentant d’écrire cette liste, comme à chaque fois,  je me rends compte de la difficulté d’établir une liste succincte de livres à conseiller. De plus en plus je ressens l’absence d’un véritable enseignement empirique et organique que l’on pourrait se transmettre d’homme à homme, de « maître » à élève. Plus les années passent et plus je me rends compte de l’importance de la première fonction dans la tripartition traditionnelle indo-européenne. Toute société a besoin de porteurs de mémoire qui guident et encadrent les combattants. Je me rends compte de la nécessité vitale d’une nouvelle classe sacerdotale contemporaine qui sache porter avec elle tout le temps et partout, les savoirs essentiels de notre civilisation. L’équilibre entre action et contemplation est la chose la plus importante pour un « homme différencié », mais pour la première fonction, la contemplation prime l’action. Pour la première fonction la contemplation est pour elle la forme ultime de l’action et du combat. Un homme seul dans son cabinet comme Guénon, Marx ou Dumézil n’a-t-il pas au fond une action indirecte plus immense que n’importe quel politique ?
Pour autant que seraient ses vues sans personnes pour les appliquer et vivre et mourir pour ? D’où la nécessité d’appartenir à une communauté car seul on est rien. Et si ça n’est pas le cas, d’où l’importance de tenter d’en constituer une. Ce que je persisterai à faire malgré les impairs et les désillusions. Désillusions nécessaires pour grandir et transmettre. Les années passant je me sens toujours plus proche de cette caste au sens guénonien. J’aimerais, à mon niveau, être un jour un « filid » ou un aède de notre cause comme d’autres en sont les « miles » ou les « dux ». Un porteur de mémoire et de civilisation.

Je pense aussi que nous devrions réhabiliter une figure, un archétype : le militant-pontifex. Pontifex au sens de celui qui créé des ponts entre les hommes mais aussi des ponts vers le monde des dieux. C’est la figure du Roi-prêtre, ou du Prêtre-guerrier.  L’Empereur en est la forme la plus haute, figure sacrée et politique tout à la fois qui uni à son sommet le pouvoir religieux avec le pouvoir temporel. 
Très intéressante à étudier aussi est la synergie qui existait dans le monde celte entre la caste des « sachants» (les druides et les filids) avec celles des guerriers qui protège l’ordre de la communauté et partant du cosmos et enfin avec celles des artisans qui eux reproduisent le monde et l’ordre social. 
Ordre traditionnel tripartite qui se maintiendra jusqu’à la fin du moyen-âge et que nous portons tous en nous malgré tout. Chacun est fait pour quelque chose, l’important est de bien se connaître pour savoir ce pourquoi l’on est fait et de laquelle des fonctions tripartites on se sent le plus proche.

Comme le dit le « Hagakure », l’entrainement du samouraï ne s’arrête jamais. De même pour la formation de l’esprit. Globalement il faut lire, écrire et faire de l’exercice physique sans cesse pour tout vrai militant. On a pas le choix, qui ne monte pas descend. On est comme les requins : condamné à nager pour ne pas sombrer !

6) Parmi les auteurs actuels, quels sont ceux qui vous semblent intéressant et vous paraissent renouveler la pensée « dissidente » ?

Actuels ? Numa Fustel de Coulanges, Franz Cumont, Georges Dumézil … D’une éternelle « actualité ». Non plus sérieusement, je dirais fondamentalement Eric Werner et ses indispensables : « l’avant-guerre civile » et « l’après-démocratie ». Deux livres qui résument tous les aspects du totalitarisme contemporain. Un des plus grands auteurs politiques contemporains. Il avait écrit aussi en son temps un très bon : « ne dites surtout pas que je doute » sur la censure et le révisionnisme. Après plus que des auteurs, c’est peut-être des maisons d’éditions alternatives qui font un travail indispensables comme les éditions « Xénia » de l’essayiste Slobodan Despot, « le retour aux sources » de l’incontournable Michel Drac, et évidement « Kontre Kulture », l’artillerie lourde en la matière. Comme livres non-alignés récemment j’ai particulièrement apprécié « le malaise est dans l’homme » de Pierre Le Vigan et « Pour une théorie du monde multipolaire » d’Alexandre Douguine, une claque géopolitique !
(fin deuxième partie)