La mère d’un contrevenant poursuit un policier de Villemomble qui l’a éborgnée dans la rixe familiale.
Sur cette image extraite d’une vidéo amateur, filmée au cours de
l’intervention de policiers appelés pour mettre un terme à un rodéo,
Fatouma
(en boubou gris au centre à gauche) prend son visage dans la main, après sa blessure par un tir d’origine non certifiée.
Cette femme de 59 ans a été mutilée le 25 juin 2013 par ce qui pourrait
être un flash-ball, selon les uns, mais une grenade de désencerclement,
selon les autres.
« Ma vie est gâché; ça fait cinq ans que je ne peux plus travailler,
j’avais retrouvé des ménages mais quand le patron a su que j’avais perdu
un œil, il a refusé de m’employer », raconte Fatouma, 58 ans, qui
n’envisage pas qu’un tel antécédent de bagarre avec des policiers n’est
pas le meilleur CV possible.

Cette Ma Dalton dit maintenant appréhender le procès qui s’ouvre ce
mardi devant la cour d’Assises de Seine-Saint-Denis. Car le policier,
Antoine C., 40 ans accusé du tir mutilant n’est pas le seul à la barre.
Deux fils de la victime seront aussi jugés, ainsi que deux autres
policiers, pour des violences croisées.
« Cette affaire n’aurait pas pu sortir il y a vingt ans », raconte
Steeve Ruben, avocat de Fatouma et de ses deux fils, convaincu que ces
images video aurait mis à mal la version policière, qui décrivait une
situation d’une extrême tension face à une famille déchaînée de
perturbateurs de quartier.
Ce soir-là, la police tentait de mettre fin à un rodéo de motos.
Deux conducteurs, sans casque, ni plaque d’immatriculation avaient
réussi à filer.Une arrestation avait avorté et les policiers mis en
difficulté avaient dû déclencher une balise de sécurité, réservée aux
situations les plus délicates.
Makan, fils de Fatouma, alors âgé de 20 ans, qui était présent lors de
l’échaufourée fut condidere comme l’un des assaillants, avant qu’un
autre policier, à moto, arrive en hurlant « c’est pas lui ! »,
suffisamment fort pour être audible sur l’enregistrement d’un voisin.
Mohamed, qui s’était porté en soutien de son frère, devait être incommodé par du gaz lacrymogène.
Sachant ses fils arrêtés, Fatouma est descendue comme d’autres
riverains, alertés par les cris et les déflagrations, dans une ambiance
des plus confuses. Un jeune élu UMP avait été aspergé de gaz
lacrymogène, une mère de 47 ans, à la recherche de son fils, s’était
effondrée, probablement touchée par un tir de flash-ball à la poitrine,
mais sans conséquences vitales. Fatouma, elle, a perdu son œil gauche. A
en croire la presse a l’écoute des fauteurs de troubles, aucun des
individus mentionnés ne semble donc responsable des troubles aux
riverains.
Vingt-huit voitures de police avaient pourtant convergé sur les lieux en
renfort. Les deux frères avaient été placés en garde à vue.
Trois responsables de l’ordre public mis en accusation
L’enquête a confirmé que Makan n’avait rien à voir avec le rodéo
initial, mais trois fonctionnaires se voient mis en accusation pour
avoir rente de rétablir le calme dans le quartier, malgré l’agressivité
de la famille en furie. Antoine C. pour le tir mutilant et deux
fonctionnaires de 26 et 33 ans à l’époque pour des violences sans ITT.
L’avocat des parties civiles, spécialisé dans les plaintes contre
policiers, Steeve Ruben, a refusé que les faits soient
correctionnalisés, préférant « un vrai débat en profondeur », aux
Assises, pour l’exemple. Il a été entendu, au moins sur ce point puisque
le procès est prévu sur neuf jours, jusqu’au 6 juillet.
« Cette durée est invraisemblable, réagit Me Daniel Merchat, avocat du
policier accusé du tir mutilant. Je n’ai jamais vu une affaire aussi
confuse que celle-ci. »
Le Parquet de Bobigny avait demandé que les affaires soient séparées,
avec d’un côté les violences jugées par le tribunal correctionnel, et de
l’autre, le tir mutilant aux Assises, mais la chambre de l’instruction a
considéré plus « judicieux » de juger tout le monde en même temps. Y
compris les deux fils de Fatouma, jugés pour violences et rébellion.
Autre incongruïté de ce procès, plusieurs personnes sont à la fois
jugées et victimes. « Ça risque d’être difficile à comprendre pour les
jurés tirés au sort », estime Frédéric Gabet, avocat d’un policier,
toujours présumé innocent, comme les deux autres.
Pasidupes pour lagauchematuer.fr