Par Nicolas Nilsen.
Je ne sais pas si vous avez jamais regardé un point de presse de
Najat Vallaud-Belkacem. Mais celui du 3 janvier 2014 est assez
stupéfiant. Comme c’était le premier Conseil des ministres de l’année
2014, je m’attendais à ce qu’il soit fort, tonique, déterminé, en tout
cas différent… Mais, comme vous le verrez ici,
plus soporifique que ça, pas possible : ennui profond de journalistes
accablés, et porte-parlotte à la langue de bois usée et ennuyeuse,
entrecoupant son ronron insipide de quintes de toux répétitives …
Mais l’essentiel n’est pas là. Après avoir longuement expliqué
[Attention, ça va être super chiant] qu’après 2 semaines d’interruption,
la session ordinaire du Parlement reprendrait le 7 janvier pour 8
semaines ; et que, comme le veut la tradition républicaine, une
suspension de 5 semaines est programmée à compter du 28 février, en
raison des élections municipales des 23 et 30 mars… et que sur ces 8
semaines de travail, le gouvernement maîtrisait l’ordre du jour de 4
semaines à l’Assemblée Nationale et de 3 semaines au Sénat, le reste
étant réservé à l’initiative parlementaire, au contrôle de l’action du
Gouvernement et à l’évaluation des politiques publiques… [je vous avais
prévenu que c'était ennuyeux]… soudain — au milieu de cet immense
charabia assommant, barbant, casse-pieds, insipide, monotone,
soporifique et sans intérêt — la Najat, lâche cette phrase (à 21:27) :
« On peut très bien procéder par Ordonnances… »
On peut très bien faire progresser les projets en adoptant des décrets, et en procédant par ordonnances comme nous l’avons fait par exemple sur la question de la simplification des règles en matière de logement, voilà…
Comme ça, pouf, entre deux toux et les bâillements des journalistes,
la Porte-parlotte du gouvernement nous balance qu’ils ont dû évoquer
cette possibilité au cours du Conseil des Ministres ! Ils sont au plus
bas dans les sondages, et au plus bas dans la confiance des Français, et
ils envisageraient carrément de passer par-dessus la représentation
parlementaire en procédant par ordonnance ?
Jusqu’à nouvel ordre on est encore en démocratie représentative et
les réformes relèvent du domaine de la loi. La Constitution prévoit
effectivement que le gouvernement puisse demander au Parlement
l’autorisation de prendre par ordonnances, pendant un délai limité, des
mesures qui sont normalement du domaine de la loi mais, réfléchissez un
peu : pour quel motif le ferait-il ?
Hollande et Ayrault sont là depuis plus d’un an. Au lieu de
s’attaquer aux vrais problèmes, ils ont choisi leurs priorités :
discuter de mariage gay, de rythmes scolaires, de prostitutions,
d’ouverture des magasins le dimanche, d’écotaxe… Et ils viendraient
maintenant nous dire que, toutes affaires cessantes, il faudrait
procéder en urgence par Ordonnances et passer sur la tête du Parlement
(dont je me moque) mais surtout par dessus la tête de la démocratie
représentative ? Et bricoler entre eux, à l’Elysée, des réformes qui
engagent l’avenir de la France ? Leurs textes sont tellement mal ficelés
que même le Sénat les rejette. Et ils voudraient continuer sans le
Parlement ? On croit rêver !
Je crois que ce Gouvernement a tout simplement perdu le sens de la démocratie.
Je n’en aurais pas parlé si je n’avais pas entendu cette histoire
d’Ordonnances évoquées à deux reprises aujourd’hui à France Inter : au
Journal de 13h et également au Journal de 19h. Donc c’est bien que la
petite musique de la Najat-Porte-Parlotte fait son chemin chez les
journalistes serviles qui répètent l’information sans même s’en étonner
ou s’en indigner. Il est vrai que le droit constitutionnel ne doit pas
être leur truc non plus…