Un article du Monde d'hier traite d'un documentaire diffusé hier soir sur LCP :
"Il
y a un peu plus de quatre ans, en décembre 2013, le gouvernement
espagnol adoptait un avant-projet de loi visant à limiter le droit à
l’avortement. C’est à ce moment-là que Marie-Pierre Jaury décida de
réaliser un film autour de ce sujet, en allant voir les principales
personnes concernées. « Je ne voulais pas faireune enquête avec des chiffres et des spécialistes », a
déclaré la documentariste lors de la présentation du film. Elle s’est
donc rendue en France, au Canada et aux Etats-Unis pour rencontrer des
femmes ayant subi une interruption volontaire de grossesse. Afin de les
écouter et de faire entendre leurs témoignages.
Eugénie, Alicia, Laura, Melissa,
Caroline et Sarah avaient entre 15 et 30 ans lorsqu’elles ont eu recours
à l’avortement, par choix ou obligation. Du test de grossesse à l’intervention finale, elles racontent et analysent cette épreuve qui a façonné leur vie,
faisant d’elles ce qu’elles sont aujourd’hui. Leurs paroles sont
d’autant plus fortes qu’elles interviennent des années plus tard, avec
le recul et la distance nécessaires.
« I had an abortion » (« J’ai avorté »),
peut-on lire sur le sac de Melissa, qui, 16 ans après sa grossesse non
désirée, recueille les témoignages de femmes ayant vécu la même
expérience, pour en faire des podcasts. Une démarche aux accents thérapeutiques pour cette jeune fille qui, à l’époque, n’avait pas eu son mot à dire.
Certaines sont devenues militantes,
d’autres parviennent à évoquer cet épisode à haute voix, après des
années de silence, et c’est déjà beaucoup. Le documentaire souligne la difficulté de partager cette épreuve. Pourtant, ces femmes expliquent comment elles ont continué – et continuent – à « vivre leur vie », malgré la honte, la culpabilité et la solitude que certaines ont pu ressentir.
Les entretiens sont longs et riches,
Marie-Pierre Jaury laisse le temps à ses interlocutrices de s’exprimer,
sans filtre. Poignant, son documentaire met en évidence la
pression et la violence, sous-jacentes ou réelles, exercées par la
famille, la société et le corps médical qui font parfois de l’avortement
un tabou, une omerta. Surtout, il choisit de concevoir
l’avortement comme un moment constructeur et non destructeur dans la vie
de ces jeunes femmes."