Albator est initialement un manga créé en 1969 par Leiji Matsumoto puis adapté en dessin animé par les japonais dans les années 80. Il s’agit de l’histoire de capitaine Harlock, qui durant toute sa vie (fictive) qui se déroule au XXXe siècle devra défendre la Terre contre les menaces extérieures qui veulent s’en emparer. L’univers d’Albator intégrait certains éléments de la mythologie et de l’histoire germanique (l’or du Rhin, Wotan, le Walhalla, …).
Les japonais ont eu
l’idée d’adapter le personnage d’Albator dans un univers sensiblement
différent dans ce film d’animation réalisé selon les meilleures
techniques actuelles du cinéma d’animation japonais. La démarche peut
déjà être interrogée. D’une part nous sommes actuellement en pleine
période des remix des séries ou des films cultes des années 80 (à venir,
Robocop du côté américain). Si on compte déjà le nombre ahurissant de
remake (King Kong) ou d‘adaptation de comics (Iron man, Spiderman, Hulk,
etc…) on se demande déjà si les producteurs actuels ne manquent pas
d’imagination. Du côté japonais, on peut surtout se questionner sur la
volonté de récréer un héros japonais pour faire concurrence à la
pléthore de héros des Etats-Unis. D’autre part, le choix a été fait de
faire un film d’animation, là où les états-uniens tournent de véritables
films, c’est donc une démarche totalement différente, qui maintient le
caractère « fictif » du personnage principal.
De ce point de vue
l’animation est plutôt réussie, certains passages pourront rappeler La
Guerre des Etoiles, mais les japonais ont réussi à créer un univers très
différents. La qualité graphique varie cependant au cours du film, le
début ressemble à une cinématique de jeu vidéo alors que certains
passages sont tellement bien réalisés qu’on se croirait dans de vrais
décors. Autre élément qui pourra paraître inégal, le travail sur les
personnages. Certains personnages sont très travaillés, comme Yattaran,
alors que les personnages féminins sont moins travaillés et assez
clichesques (vous me direz que c’est propre à l’animation japonaise).
Autre élément assez amusant, les humains du futurs qui ont fuit la Terre
sont tous blancs et quelques uns un faciès de type japonais, mais il
faut croire que les autres types n’ont jamais réussis à quitter la
Terre…
Du point de vue de
l’histoire, c’est là que le bat blesse. Les humains ont du quitter la
Terre et coloniser d’autres planètes, puis ils ont voulu revenir sur la
Terre, ce qui a déclenché une guerre, et donc il a été décidé que la
Terre serait un sanctuaire inviolable, du nom de Gaia. Albator, qui
n’est d’ailleurs pas un corsaire, mais un pirate, veut parvenir à
détruire l’ordre des choses pour revenir à une situation où la nature
reprendrait ses droits sur l’agissement des hommes. On s‘éloigne assez
largement de l’histoire originale, bien que certains éléments soient
communs (par exemple la mort du meilleur ami d’Albator est rappelée dans
le film). Autre élément de l’histoire, la concurrence entre deux frères
: le plus âgé, Ezra, est Amiral de la flotte que doit vaincre Albator
et doit protéger Gaia de toute intrusion, et le plus jeune, Yama, qui
embarque sur l’Arcadia, le vaisseau d’Albator et doit donc espionner et
tuer Albator. On assiste ici à un nombre de revirement totalement
clichesques, où le doute assaille tellement Yama qu’il retourne sa veste
sans arrêt. L’histoire est vraiment le point faible du film, on a du
mal à rentrer dedans, c’est globalement peu élaboré et assez
moralisateur. Sans oublier la narration, pas toujours bienvenue. La fin
laissera surement le spectateur assez perplexe.
En revanche, on
appréciera les combats, qui ne tombent pas dans les éléments clichés du
cinéma asiatique, malgré la possibilité offertes par l’animation
graphique, on appréciera également Albator, personnage froid
extérieurement, mais animé par une véritable flamme intérieure. Du point
de vue politique, le film peut avoir un intérêt, par exemple, le
vaisseau d’Albator est totalement autonome et ne dépend donc pas des
sources d’approvisionnement du système en place, ce qui lui permet de se
déplacer à sa guise. Albator est un mythe, qui donne envie à certains
de le rejoindre, malgré une sélection difficile, pour œuvrer vers un
monde meilleur (pensent-ils) qui se débarrasserait de l’oligarchie au
pouvoir : un ramassis de vieux ventripotents qui se réunissent dans une
sorte de Sénat à l’écart de la population et qui ont créé une religion
artificielle pour cacher la vérité sur l'état de Gaïa. L’Arcadia devient
alors la patrie des hommes libres, de ceux qui veulent changer le monde
et ici l’univers. Enfin autre élément remarquable, les deux camps en
présence se battent tous les deux pour la même illusion (l’image qu’ils
ont de la Terre) mais au fur et à mesure que cette illusion s‘efface,
les uns combattent pour maintenir l'illusion alors qu’Albator combat
pour la vérité. C’est ce point que j’ai trouvé le plus intéressant. La
morale écologique du film qui pointe du doigt la surpopulation et le
fait que l’homme est inutile à la vie m’a beaucoup moins convaincu.
En conclusion, les
points forts du film sont l’univers d’Albator et l’animation graphique
et le gros point faible est l’histoire. Nous avons quitté la salle avec
une impression mitigée, voire défavorable pour certains.
Jean/CNC