« La votation du 9 février “contre l’immigration de masse” ne représente qu’un angle d’attaque très partiel mais très efficace parce qu’il convoque et touche à la totalité culturelle, politique et identitaire de la Suisse, tout en constituant un révélateur privilégié de cette dernière. » (Les Observateurs.ch – 2/12/2013.)
♦ Dimanche 9 février 2014, il faudra tourner ses regards vers la Suisse. Le peuple s’y prononcera par référendum, à la demande de l’UDC et d’Oskar Freysinger, contre l’immigration de masse. André Posokhow, consultant, auteur du rapport de Polémia sur le coût de l’immigration, présente les arguments de l’initiative suisse.
Polémia.
Nous savons que l’Allemagne, l’Italie et la Grande-Bretagne
connaissent des problèmes d’immigration similaires à ceux de la France.
Nous savons moins que la situation de la Suisse est tout aussi
alarmante. Cela ne va pas sans réactions dans ce pays, petit par la
taille géographique, qui s’inquiète pour son espace national.
Un parti politique, l’UDC, dont la figure emblématique est Oscar
Freysinger, est à la pointe de la lutte contre ce qu’il qualifie
d’invasion. C’est lui qui avait obtenu une majorité hostile à l’érection
de minarets lors d’un référendum qu’il avait initié. Aujourd’hui un
collectif, le Comité interpartis contre l’immigration de masse, a lancé
une initiative populaire contre l’immigration de masse. Cette initiative
donnera lieu à une « votation » le 9 février 2014.
Ce Comité a produit un Argumentaire : « La démesure nuit à la Suisse ».
Polémia a jugé utile de le faire connaître et de commenter les points
qui pourraient intéresser plus particulièrement les lecteurs français.
En effet les Suisses sont un peu moins prisonniers du conformisme moral
et intellectuel et de la censure politique qui pèsent sur ce thème en
France.
Le constat démographique
En adhérant au système de la libre circulation des personnes qui l’a
forcée à abandonner son contingentement de l’immigration, la Suisse a
renoncé en 2007 aux instruments lui permettant de gérer le nombre
d’immigrants. Depuis, les statistiques explosent. Entre 1980 et 2012 le
nombre d’étrangers vivant en Suisse a augmenté de plus de 956.000 et
celui des Suisses de 747.000 du fait des naturalisations. A fin 2013 le
bilan s’établira à un peu plus de 80.000 entrants (p. 8 de
l’Argumentaire).
Fin juin 2013 la Suisse comptait 8,09 millions de personnes. Malgré
un fort taux de naturalisation, la proportion d’étrangers a atteint
23,3% en 2012, soit près de 1,9 million (p. 9). Tout porte à croire que
la population de la Suisse atteindra 10 millions de personnes en 2035 si
l’immigration n’est pas gérée de manière ciblée (p. 7). Enfin, à ces
décomptes officiels de population il faut ajouter le nombre des sans-
papiers qui se situe entre 90.000 et 300.000.
Il faut souligner qu’à la différence de la France la majorité des étrangers réguliers, environ 66%, provient de l’UE.
C’est donc un phénomène de mascaret démographique que ce pays voisin
de la France affronte et, comme l’affirme l’UDC, ne se trouve plus en
situation de gérer.
L’immigration de masse a peu d’effet sur la croissance et perturbe le marché du travail suisse
Certes, la Suisse a besoin de main-d’œuvre étrangère mais,
contrairement à ce qui est souvent affirmé, la croissance économique n’a
pas pour cause la libre circulation des personnes. La progression du
nombre d’emplois depuis 1990 en raison de l’immigration est réelle mais
doit être mise sur le compte du secteur public du fait de besoins nés de
l’immigration elle-même. En réalité, celle-ci crée des besoins qui
conduisent à de nouvelles entrées de migrants pour les satisfaire. Elle
s’autogénère. C’est ce qui explique que, si le PIB augmente, les
conséquences sur le PIB/habitant et sur la croissance économique par
habitant sont très faibles (p. 22).
L’Argumentaire affirme, sur la base d’études officielles suisses,
qu’il existe une pression sur les salaires des nouveaux entrants mais
surtout que les salaires demeurent bloqués du fait de l’immigration même
en période de haute conjoncture.
Depuis la libéralisation de la circulation des personnes le nombre de
chômeurs demeure élevé pour la Suisse et plus particulièrement pour les
étrangers. Alors que la part des étrangers dans la population totale
est de 23%, elle est de 47% au nombre des chômeurs enregistrés.
L’étranger venant de l’UE bénéficie de l’assurance chômage au bout de
quatre semaines de présence sur la base de son salaire suisse alors que
pour un Suisse ce n’est possible qu’après 12 mois de cotisation (p. 16).
Enfin, les travailleurs suisses connaissent une forte pression du
fait des frontaliers et surtout de ce que l’Argumentaire appelle les
faux indépendants qui travaillent sur les chantiers suisses à des
salaires de dumping. On retrouve la même problématique que celle des
travailleurs détachés en France.
L’immigration aggrave la situation précaire des institutions sociales suisses
Alors que la proportion d’étrangers dans la population totale est de
23%, la proportion moyenne des étrangers dans l’assurance chômage,
« l’assurance-invalidité » et l’aide sociale s’établit à 46%, soit le
double (p. 25).
Concernant l’assurance-vieillesse les nouveaux immigrants sont pour
le moment des contributeurs nets. Mais ce ne sera plus le cas dans
l’avenir car ils sont appelés à devenir des bénéficiaires nets.
L’immigration ne permettra jamais d’assainir le problème de
l’assurance-vieillesse qui a pour origine une plus grande espérance de
vie et un changement de structure démographique (p. 26) et permet
simplement de le reporter sur les générations futures.
Enfin, l’Argumentaire s’appuie sur une étude récente sur le bilan
fiscal de l’immigration en Suisse pour indiquer que ce bilan est appelé à
se développer négativement à long terme (p. 26).
L’immigration de masse pèse lourdement sur les ressources de la Suisse
L’Argumentaire rejoint la pensée de Maurice Allais et la logique de
l’exercice auquel s’est livré J.Y. Le Gallou en 2012 pour évaluer les
besoins que déclenchent 80.000 immigrants supplémentaires chaque année
(hors les clandestins). C’est impressionnant. Citons en quelques-uns :
- -34.500 logements ;
- -3 hôpitaux ;
- -600 infirmiers ;
- -300 classes d’école ;
- -500 enseignants ;
- -72 écoles ;
- -62 bus
- -752 millions de personnes-kilomètres de voitures de tourisme sur la route.
La croissance démographique rapide et incontrôlée de ces dernières années dans un pays montagneux de 41.000 km2
a pour effet que la route et le rail sont engorgés et ont atteint la
limite de leur capacité. L’agrandissement des infrastructures de
transport est indispensable ; son coût prévu est astronomique : 170 Mds
FS. Il en va de même pour l’énergie dont la consommation par le
contingent annuel de nouveaux migrants représente 630 millions kWh.
Les conséquences de l’immigration de masse sur le marché du logement
sont sensibles. Il en résulte une augmentation massive des loyers,
notamment dans les villes. De nombreux Suisses quittent les
agglomérations, ce qui entraîne une hausse de la mobilité, la dispersion
de l’habitat et, partant, la perte de terres cultivables. Ce phénomène
est identique à celui de la France où on nous affirme qu’il faut
construire 500.000 logements par an sans nous préciser pour qui. De même
on sait que notre pays perd la surface d’un département par bétonnage
tous les 10 ans en pleine panne de croissance.
L’immigration de masse pollue le système éducatif suisse
L’immigration de masse a des conséquences graves pour le système
éducatif : proportion élevée d’étrangers, baisse des performances
scolaires, renforcement du soutien scolaire, inversion du processus
d’intégration, fuite de familles économiquement aisées, criminalité
juvénile.
Comme en France l’immigration de masse s’accompagne de criminalité
La Suisse, pays traditionnellement paisible, connaît une forte
progression de la criminalité, en particulier pour ce qui concerne les
crimes et les délits graves. En 2012, 58% des personnes condamnées selon
le Code pénal étaient des étrangers.
L’identité suisse est menacée
Selon l’Argumentaire, l’immigration de masse constitue une menace
pour l’identité, la religion et la culture suisses. Limitons nous à
quelques citations :
- -« L’immigration de masse que subit notre pays depuis plusieurs années remet de plus en plus en question ces valeurs ou les repousse à l’arrière- plan pour les remplacer par des valeurs importées ».
- -« De plus en plus de Suisses se sentent étrangers dans leur propre pays ».
- -Dans le domaine du travail, « Des chefs étrangers apportent une nouvelle culture de direction et préfèrent engager des collaborateurs ayant les mêmes origines et conceptions qu’eux. »
- -« Conséquence d’une immigration démesurée et des frontières ouvertes, la composition religieuse de la population résidente a changé. On compte par exemple aujourd’hui quelque 400.000 musulmans en Suisse. Certes, une minorité seulement d’entre eux sympathisent avec les idées islamistes, mais les immigrants musulmans proviennent souvent de pays qui ne connaissent pas un ordre juridique démocratique. Ils véhiculent des idées du droit et de l’ordre qui sont incompatibles avec notre régime juridique et nos règles démocratiques. Exactement comme nous devons nous adapter aux règles locales en tant qu’hôtes d’un Etat musulman, nous devons rigoureusement exiger la même chose des immigrants musulmans. Il est hors de question de tolérer des sociétés parallèles avec leurs propres règles de droit. En aucun cas notre régime légal libéral ne doit céder devant la charia et il est exclu que nos tribunaux considèrent comme une circonstance atténuante les origines musulmanes d’un accusé. Il est absolument inacceptable de tolérer, voire d’encourager en Suisse des pratiques comme les mariages forcés, les assassinats “pour l’honneur”, la vendetta, les mutilations sexuelles des femmes, le mariage de mineurs ou encore la polygamie. »
Conclusion
L’UDC considère comme capital de pouvoir faire venir la main-d’œuvre
dont la Suisse a besoin, si celle-ci n’est pas disponible sur le marché
du travail fédéral. Mais il est tout aussi important que ces migrants
quittent le pays lorsqu’ils n’ont plus d’emploi.
L’afflux actuel conduit la Suisse à augmenter massivement les
ressources. Une partie importante des immigrants sont nécessaires pour
occuper les postes supplémentaires imposés par l’immigration. En
réalité, l’immigration de peuplement génère de nouveaux besoins de
main-d’œuvre et d’immigration. C’est un processus sans fin qu’il faut
remplacer par une immigration temporaire de travail en fonction des
besoins réels de la Suisse et d’eux seuls.
L’UDC considère comme nécessaire que la Suisse puisse gérer de sa
propre autorité l’entrée des étrangers. Dans ce même Argumentaire, elle
propose des solutions qui seront soumises aux lecteurs de Polémia dans
une prochaine contribution.
André Posokhow