La surveillance d'Internet, rendue légale sans l'intervention d'un juge par la dernière loi de programmation militaire, continue de faire réagir. Interview.
Les partisans de la loi expliquent que la France est en guerre...
Le premier danger ici est que la surveillance n'est plus un dispositif exceptionnel concernant uniquement le terrorisme, mais devient la norme. Le texte proposé, par la notion très vague de "informations et documents traités ou stockés", permet une surveillance totale de la géolocalisation, l'enregistrement des communications, mais aussi la surveillance de notre activité en ligne, ce qui veut dire grosso modo de toute notre vie. Pire, cette surveillance pourra s'effectuer en direct. D'ailleurs, la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité, chargée de vérifier la légalité des autorisations d'écoutes, ne pourra rien empêcher, car elle interviendra a posteriori (48 heures après avoir été alertée) et, rapportant au Premier ministre, n'aura aucun pouvoir de sanction en cas d'abus. Pas sûr qu'elle se fasse entendre ! Bref, cette loi signe la fin de la séparation des pouvoirs et donne à l'exécutif les clés d'un système de surveillance généralisée.
Que voulez-vous dire par là ?
Qu'il n'y aura plus de limite. Ce texte va bien au-delà de la lutte contre le terrorisme en proposant que ces écoutes servent notamment à protéger les intérêts scientifiques et économiques de la France. Par exemple, des champs qui englobent les antinucléaires, des associations oeuvrant pour la transparence des entreprises, des opposants à la création d'un nouvel aéroport, mais aussi potentiellement l'identité des sources de journalistes dans une affaire anticorruption... C'est ni plus ni moins que la préparation d'un État totalitaire.