Pierre Le Vigan |
A 2 ou 3 petits détails près, le livre de Nicolas
Lebourg et Joseph Beauregard est très bien documenté et fin tout autant
qu’honnête. Le lien entre les idées de François Duprat et sa
personnalité, et aussi son entourage, devait être fait. C’est le point
fort du livre. (Tout autant que l’enquête sur son assassinat qui laisse
penser que la piste somme toute la moins improbable viendrait de
l’ultra-droite, mais certainement pas du PFN d’alors). Pourquoi une
telle biographie à la fois politique, intellectuelle et humaine ? Parce
que dans le cas de Duprat on ne peut s’en tenir aux idées. Elles
existent pourtant bel et bien : Duprat est un NR, un
nationaliste-révolutionnaire. C’est même le fondateur de l’idée NR. A
l’évidence il la tire au peu trop du côté du néo-fascisme – au risque de
desservir sa cause - mais nous sommes dans les années 70, à peine 30
ans après la guerre, alors que maintenant, 70 ans ont passé depuis les
années 40. Ceci explique sans doute cela.
Duprat n’était pas raciste (malgré des contacts sulfureux) et expliquait qu’il faut s’attaquer aux promoteurs de l’immigration et non aux immigrés - même s’il n’hésite pas, parfois, à instrumentaliser la xénophobie. Il n’est même pas « racialiste » contrairement à Europe Action (l’ancêtre de la Nouvelle droite dans les années 60). Et il n’était pas antiaméricain, contrairement à la Nouvelle droite dés les années 70.
Duprat n’était pas raciste (malgré des contacts sulfureux) et expliquait qu’il faut s’attaquer aux promoteurs de l’immigration et non aux immigrés - même s’il n’hésite pas, parfois, à instrumentaliser la xénophobie. Il n’est même pas « racialiste » contrairement à Europe Action (l’ancêtre de la Nouvelle droite dans les années 60). Et il n’était pas antiaméricain, contrairement à la Nouvelle droite dés les années 70.
Duprat fascinant (et pas seulement fascisant) car brillant et baroque, et doté d’une personnalité double, voire triple ? Sans doute l’était-il auprès de beaucoup de gens. Hypermnésique ? Certainement, et cela impressionnait beaucoup. Séducteur à la Guillaume Faye : sans doute un peu. Mais séducteur intellectuellement des hommes, plus que des femmes (encore qu'il ait vécu avec de belles femmes, nous dit-on, ce qui laisse présumer un charme certain).
Voyons une vidéo d’entretien avec lui, sur internet : surprise pour quelqu ‘un dont les idées étaient quelque peu excitées (cf. ses textes dans Année zéro), il a une voix très douce. un coté très calme et posé. Une personnalité multiple, perverse dirons certains. Le terme parait excessif. Duprat a un côté authentique en même temps que joueur. Il a souffert authentiquement de l’échec de son premier mariage. Duprat n’est pas un bloc d’insincérité, ce qui ne veut pas dire qu’il n’est pas capable de duplicité – en tout cas dans le domaine politique où il aime visiblement le billard à plusieurs bandes. En politique précisément, c’est un joueur, avant tout un joueur. "Monsieur, est-il vrai que vous faites de la politique ?" lui avait demandé un de ses élèves de son collège normand ? "Oui, c 'est pour me distraire" avait répondu François Duprat. Réponse certainement, là, pour le coup, tout à fait sincère.
Notes |
Nicolas Lebourg et Joseph Beauregard, François Duprat. L’homme qui inventa le Front national, Denoël, 2012, 382 pages, 23,50 E.