Par Solenn de Roy
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Le
ministre du Budget, Bernard Cazeneuve, appelle les ministres à faire
des économies drastiques. Ceux-ci redoutent une «purge» dans tous leurs
budgets.
C'est un épouvantable casse-tête. François Hollande,
qui réunit samedi à l'Élysée un deuxième conseil stratégique de la
dépense publique, se trouve au pied du mur: après les avoir promis, le
chef de l'État doit désormais trouver ces fameux «50 milliards, au
moins», destinés à réduire le déficit public
et à financer le pacte de responsabilité pour les entreprises. Les
réunions se sont enchaînées à l'Élysée depuis la conférence de presse du
14 janvier. De son côté, le ministre du Budget, Bernard Cazeneuve,
a entamé son tour de chauffe, recevant à tour de rôle les ministres,
appelés à faire des économies drastiques. «Ça va être la purge,
s'inquiète un poids lourd de la majorité. Tous les budgets vont être
touchés. Les ministres sont affolés. Ils ne savent pas comment faire…
Bref, c'est l'horreur.»
Le ministre de l'Éducation, Vincent Peillon,
a semé le trouble en évoquant mercredi une piste de travail explosive:
le gel provisoire des promotions et avancements pour l'ensemble des
fonctionnaires. Soit 1,2 milliard d'euros d'économies par an. Une proposition que Peillon a ensuite démenti avoir évoquée.
Mais cette hypothèse de travail, poussée par la Cour des comptes depuis
des années, se trouvera bien - «sans surprise», selon un proche du
dossier - au menu des discussions du conseil stratégique. «Quand vous
êtes dans un exercice d'économies très important, vous ne vous
interdisez rien, reconnaît un conseiller élyséen. On veut regarder tous
les sujets.»
Reste que la «fuite» du ministère de l'Éducation
nationale a agacé à l'Élysée, où l'on souhaite aller vite sur un dossier
périlleux, en évitant à tout prix les «couacs» anxiogènes, à quelques
semaines des municipales. Samedi, les ministres devraient être une
nouvelle fois priés d'éviter de «parler à tort et à travers», selon un
conseiller élyséen. «Attention à la méthode!, prévient le député PS
Christophe Caresche. Il faut éviter d'égrener les pistes d'économies, au
risque de coaguler les mécontentements. Cela reviendrait à griller une à
une les cartouches, avant même les arbitrages rendus.» Devant des
proches, Cazeneuve a confié qu'il était «soulagé» que le dossier soit
centralisé à l'Élysée. «Il ne voulait pas que les ministres aient des
cordes de rappel», explique un proche.
«Mission impossible!»
Au
gouvernement et dans la majorité, le pari hollandais suscite de
l'inquiétude, voire du scepticisme. «Mission impossible!, tranche le
conseiller d'un ministre régalien. Jérôme Cahuzac
disait il y a un an qu'il fallait trouver 5 milliards d'économies: on
les cherche encore… Le président n'arrivera pas à trouver 50 milliards
en grattant ici ou là. Il va devoir supprimer certaines missions de
l'État. Ce serait une première!» «On a limé un à un les tuyaux de
l'orgue mais cette méthode du rabot, c'est terminé, confirme un ministre
de la «task force» priée de dessiner les scénarios d'économies.
Maintenant, la question, c'est: quel tuyau on enlève?» Un proche du
président n'élude pas: «On fera des réformes de structure, on redonnera
du sens aux missions de l'État, sinon on n'y arrivera pas. Il n'y a pas à
tortiller.»
Pari audacieux pour un président impopulaire. «En
prenant la main sur ce dossier, Hollande s'attend à être jugé sur les
résultats, observe un conseiller. Il est très déterminé. N'oublions pas
qu'il est issu de la Cour des comptes. Il kiffe l'idée d'un État qui
fait mieux avec moins.» Un dirigeant PS soupire: «Ce faisant, il se met
au centre du champ de tir.»