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lundi 10 février 2014

Iran: Washington menace les entreprises françaises

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Téhéran était plongé sous la neige, entre lundi et mercredi, lors du séjour de la délégation du Medef.
Le voyage inédit d'une centaine de patrons français en Iran qui s'est achevé mercredi a provoqué les critiques de John Kerry, le chef de la diplomatie américaine. Mais Washington a aussi des arrière-pensées commerciales.

La visite historique à Téhéran d'une délégation de plus de cent représentants d'entreprises françaises, entre lundi et mercredi, n'a pas été appréciée à Washington. John Kerry, le chef de la diplomatie américaine, a menacé les sociétés françaises. «Si les Français peuvent envoyer des hommes d'affaires là-bas (en Iran), a-t-il déclaré mercredi soir sur CNN, ils ne peuvent pas violer les sanctions. Ils seront punis s'ils le font et ils le savent». 

Quelques heures plus tôt, le Kerry s'était entretenu au téléphone avec son homologue français Laurent Fabius. Le voyage des patrons français organisé par le Medef n'est «pas utile», a déclaré John Kerry, selon l'un de ses subordonnés. «Téhéran n'est pas ouvert au commerce et aux affaires parce que la levée des sanctions est assez provisoire, assez limitée et assez ciblée», a commenté Wendy Sherman, sous-secrétaire d'État chargée des affaires politiques.

En réponse, Pierre Moscovici, le ministre de l'Économie, avait indiqué mercredi soir que la visite du Medef n'était pas un signe de «laxisme» de la France vis à vis des sanctions contre l'Iran mais «un pari sur l'avenir». À la suite de l'accord intérimaire conclu en novembre dernier entre l'Iran et le groupe «5+1» (États-Unis, Chine, Russie, France, Royaume-Uni et Allemagne) sur le programme nucléaire iranien, une petite partie des sanctions internationales a été levée à partir du 20 janvier. Le commerce de pétrole brut, de gaz et de produits raffinés iraniens reste sous embargo des États-Unis et de l'Europe, mais certains avoirs gelés ont été débloqués et certains échanges autorisés. L'accord de Genève prévoit que cette levée des sanctions est réversible si les négociations n'aboutissent pas à un accord définitif d'ici six mois.

Boeing et GM en embuscade

Dans ce contexte sensible, le Quai d'Orsay avait dûment chapitré les patrons voyageurs, comme le Figaro l'avait raconté la semaine dernière. Même un diplomate américain, Peter Harrel, avait convié une partie de la délégation à l'ambassade, à Paris pour leur rappeler les sanctions en vigueur. Le Medef avait d'ailleurs entouré le voyage d'une certaine discrétion et les représentants de Renault, PSA, GDF Suez, Total, Alstom, l'Oréal ou encore Lafarge avaient pris soin de souligner que le voyage était «exploratoire», et qu'aucun contrat ne serait signé.

À Téhéran, malgré la neige qui a recouvert la ville, l'accueil du conseiller du président Rohani, Mohammad Nahavandian, et de responsables de la Chambre de commerce, a été chaleureux. Le chef de la diplomatie iranienne, Mohammad Javad Zarif, qui avait rencontré John Kerry le week-end dernier à Munich, a fustigé les commentaires du Département d'État sur la visite des Français. «Ce genre de déclarations n'aide pas et pourrait même avoir un impact négatif» sur les négociations sur le nucléaire, a-t-il déclaré.

Inédite par son effectif, la délégation du Medef n'était pas la première à venir tâter le terrain commercial à Téhéran. Des Autrichiens, des Britanniques et des Italiens avaient précédé les Français. Des Américains aussi. General Motors et Boeing œuvrent déjà en coulisse et entendent bien rafler d'importants contrats, le jour où les affaires reprendront vraiment.