Robert Neboit
Lorsque
Mariano Rajoy parvient au pouvoir en novembre 2011 le Parti populaire
venait d’obtenir la majorité absolue dans les deux chambres du parlement
en écrasant Parti socialiste du calamiteux Zapatero qui venait de subir
une défaite historique en passant de 43 % à 28 % des voix. Cinq ans
plus tard aux élections suivantes de décembre 2015 la donne change
radicalement avec la fin du bipartisme PP – PSOE : le PP recule à 28 des
voix et perd la majorité et les socialistes font pire encore avec 22 %,
deux nouvelles forces politiques Podemos (décalque espagnol du slogan
Yes we can d’Obama…) rassemblement de mouvements gauchistes et
Ciudadanos (Citoyens) mouvement de centriste prétendant s’opposer aux
sécessionnistes tout en refusant le moindre nationalisme espagnol.
Podemos talonne le PSOE avec 20 %, et Ciudadanos est à 14 %. Faute de
coalition gouvernementale les espagnols durent retourner aux urnes six
mois plus tard en juin 2016. Le PP améliore son score mais reste
minoritaire. Rajoy n’obtiendra que laborieusement l’investiture en
octobre à la quatrième tentative grâce au soutien conditionnel
de Ciudadanos. Après seulement huit mois de gouvernement et suite au
scandale de corruption Gürtel une motion de censure PSOE vint de
l’emporter vendredi 1erjuin et met fin au gouvernement Rajoy
et espérons-le à son existence politique. Il laisse la place à Pedro
Sanchez dirigeant d’un PSOE minoritaire soutenu par l’extrême gauche et
les sécessionnistes basques et catalans. Et Rajoy osera se vanter
d’avoir laissé l’Espagne dans un meilleur état que lorsqu’il était venu
au pouvoir !
Qu’il
ose dire cela ne peut être compris que si l’on se rend compte que pour
lui la politique semble se restreindre au seul domaine de l’économie.
Aura-t-il au moins réussi dans ce domaine ? Pas vraiment. Son résultat
n’est pas catastrophique mais sans être glorieux pour autant. Certes le
chômage a diminué mais cela a été accompagné de la précarisation de
l’emploi et de la baisse des salaires ceci avant tout les jeunes. Enfin
il n’a pas su réduire le déficit public.
Mais
ce n’est pas l’économie qui a causé la chute de Rajoy, c’est son
incontestable échec politique et moral après sept ans de pouvoir. Echec
d’un homme qui aura trahi consciencieusement ses électeurs en leur
faisant miroiter des convictions de droite durant les campagnes
électorales et qui une fois élu a mené une politique au fond pas si
différente de celle de Zapatero.
Sur
le plan sociétal il a continué sur la voie de la promotion coercitive
de l’idéologie antifamiliale LGBT. Il a fait approuver plusieurs lois
qui sous prétexte de défendre les droits des homosexuels vont bien
au-delà et prétendent réprimer la liberté d’expression des défenseurs de
la famille traditionnelle.
Sur
le plan idéologique il se met à la remorque de l’antifranquisme, et
plus encore il en tolère tous les excès, notamment en n’abrogeant pas en
cause la liberticide Loi de la mémoire historique qu’avait fait voter
Zapatero et qui prétend instaurer une vérité officielle antifranquiste
et pro Front Populaire. Il laisse ainsi à la gauche antifranquiste le
monopole du récit national et lui donne ainsi les moyens de formater les
nouvelles générations dans l’exécration d’un régime qu’elles n’ont pas
connu.
La
situation démographique est catastrophique et il n’a rien fait pour y
remédier. Le taux de natalité est un des plus faible d’Europe. Enfin
l’immigration ininterrompue fait que pour la première fois de son
histoire le pourcentage d’étrangers a atteint les 10 % de la population.
En
politique intérieur il n’a pas su s’opposer aux diverses forces
sécessionnistes qui tendent à la balkanisation de l’Espagne Certains
observateurs superficiels lui font gré d’une opposition supposée
énergique au sécessionnisme catalan. La réalité est moins glorieuse.
Rajoy a certes appliqué, mais comme à contre cœur, l’article 155 de la
Constitution pour faire face à la déclaration d’indépendance qui avait
suivi le référendum organisé par les sécessionnistes et qui ne
respectait aucune des garanties procédurales habituelles. Mais les
réactions les plus vigoureuses sont venues du peuple espagnol avec de
nombreuses manifestations pour l’unité de l’Espagne, les plus
importantes ayant lieu à Madrid puis à Barcelone. Et aussi du roi
Philippe VI qui fit un discours énergique et sans compromission. Il n’a
résolu en rien la crise puisqu’aux élections du 21 décembre au parlement
de Catalogne le bloc indépendantiste, même s’il ne recueille que 47,5 %
des voix, conserve la majorité. La raison de cet échec est que Rajoy
n’a pas utilisé tous les pouvoirs que lui conférait cet article. Il
aurait dû s’attaquer au monopole radio télévisuel de la Généralité pour
faire respecter la pluralité des idées, défendre l’enseignement de la
langue espagnole et la neutralité idéologique dans le système éducatif
catalan. Mais il n’en a pas eu le courage par manque de convictions. Il
s’est réfugié frileusement dans la simple défense de la légalité
constitutionnelle, ne réalisant pas que pour défendre valablement une
constitution encore faut-il défendre en même temps l’héritage historique
et l’unité de la nation sans lesquels aucun contrat social n’a de sens.
Sa politique face aux forces sécessionnistes a toujours consisté, sous
couvert de ‘dialogue’ à les acheter sous forme d’avantages financiers.
Il avait d’ailleurs déjà pratiqué ce système pour financer son parti,
semblable en cela à ses concurrents socialistes. C’est cette politique
qui l’a fait tomber. Le parti nationaliste basque a accepté des
avantages budgétaires pour ensuite le trahir en négociant avec le parti
socialiste le maintien de ces mêmes avantages !
Le
gouvernement de Sanchez s’annonce encore pire que celui de Rajoy, il
sera dépendant du bon vouloir de l’extrême gauche et des nationalistes
catalans et basques.
La
solution ne pourra venir que d’un sursaut des patriotes espagnols lors
des élections générales anticipées qui seront très probablement
inévitables. Le Parti populaire est irréformable idéologiquement et
semble en très mauvais posture. Il faut souhaiter l’apparition d’un
mouvement de droite nationale qui s’attaquera aux problèmes du pays dont
les deux principaux sont les régionalismes sécessionnistes et
l’immigration incontrôlée. Le mouvement de droite national Vox dirigé
par Santiago Abascal semble avoir des chances réelles d’avoir des élus
aux prochaines élections. Il pourrait représenter une alternative
crédible pour restaurer l’unité de l’Espagne et lui redonner grandeur et
dignité.