Marc Rousset
Matthew Chamberlain, directeur du London Metal Exchange(LME) a déclaré le 21 mai au quotidien South China Morning Postqu’un
contrat à terme yuan/or pourrait être bientôt lancé. L’information peut
paraître anodine aux néophytes des problèmes financiers internationaux,
mais elle est cependant d’une importance primordiale car elle signifie
tout simplement dans un avenir très proche la fin inéluctable de la
suprématie du dollar et son remplacement partiel par le yuan et l’euro,
en fait le chamboulement complet du système financier international
actuellement sous le joug impérialiste du roi dollar. Il se trouve que
le propriétaire du LME à Londres est le HKEK (Hong Kong Exchanges and Clearing)
qui a déjà lancé à Hong Kong un contrat à terme or/yuan et qui permet
déjà à ses clients d’utiliser la devise chinoise pour garantir des
opérations montées par son intermédiaire.
N’oublions
pas que la BNP a été scandaleusement condamnée en 2016 à 9 milliards de
dollars d’amende, pour avoir tout simplement utilisé des dollars afin
de financer le commerce avec des pays tels que l’Iran, sous embargo
américain. Seule la compensation finale des investissements ou des
exportations des pays concernés s’était pourtant faite sur le territoire
américain, par l’intermédiaire d’un compte de la BNP à New York. Il
était donc « normal » que le droit américain s’appliquât à l’ensemble
des opérations commerciales et financières.
Il
importe donc que les technocrates euro-ricains de Bruxelles sortent de
leur torpeur, et se grattent, comme les Chinois, un peu la tête, afin de
se préparer à ne commercer qu’en euros. La moindre des choses aurait
été, suite à cette amende ignoble, d’en appliquer une de même montant à
Goldman Sachs pour avoir manipulé et présenté des comptes frauduleux sur
la Grèce, ce qui avait eu pour effet de faire entrer la Grèce dans la
zone euro avec des profits gigantesques pour Goldman Sachs tandis que
les dettes grecques calamiteuses furent assumées par les contribuables
des Etats européens dont la France qui s’étaient portés directement
garants des prêts accordés à une Grèce en faillite.
Lors
du dernier forum économique international de Saint-Pétersbourg, dans le
cadre du Club de Valdaï, l’intervenant Jim Rogers a déclaré que le
dollar perdrait son statut de monnaie de réserve avant 2030 et qu’une
multitude de nations telles que le Brésil, la Russie, la Chine, l’Inde,
l’Iran, la Turquie et d’autres pays en voie de développement « sont en train de créer une devise concurrente »,
sans préciser sa pensée. Il semble en fait que cette devise concurrente
sera l’or ou plus précisément des monnaies internationales telles que
le yuan « off-shore » qui sera, lui, convertible en or. On assisterait
ainsi à un retour du Gold Exchange Standard, les pays réglant
leur solde de balance commerciale par transport physique de l’or en
avion ou acceptant de garder comme monnaie de réserve des yuans à la
place du dollar, sachant qu’ils sont convertibles en or à Hong Kong ou
sur le marché de Londres, grâce à ce nouveau contrat à terme yuan/or à
venir.
C’est
ainsi que si les États-Unis empêchent l’Iran, suite à la politique des
sanctions, d’utiliser le système de paiement international bancaire
Swift en dollars, ou de payer en dollars l’Allemagne pour des achats
d’équipements ou de recevoir des dollars lors des ventes de pétrole à
son premier client, la Chine, l’Iran et la Chine par exemple, solderont
directement leurs comptes internationaux avec de l’or ou l’Iran vendra
ses yuans sur le marché de Londres pour être payé en or.
Ce
n’est pas pour rien que la Russie a triplé ses réserves d’or à 1800
tonnes durant ces dix dernières années, que la Chine, productrice de 450
tonnes par an, détient déjà dans ses coffres 4000 tonnes d’or, que
l’Iran et la Turquie ont aussi augmenté fortement leurs réserves d’or.
Les
dernières sanctions de Trump contre l’Iran pourraient être la goutte
d’eau qui fait déborder le vase, avec un effet de boomerang mortel pour
la suprématie du dollar. JP. Morgan prédit l’once d’or à 1700 dollars
l’année prochaine. Comme a pu le dire Hölderlin : « Là où est le danger est aussi ce qui sauve ».
